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Brexit

Malgré l'accord sur la pêche, l'inquiétude demeure dans les bateaux français


AFP le 09/01/2021 à 10:Jan
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Autorités tatillonnes, concurrence des pêcheurs néerlandais : deux semaines après avoir obtenu un accord sur la pêche dans le cadre du Brexit et poussé un ouf de soulagement, les marins français espèrent voir disparaître de nombreuses zones d'ombre et leurs inquiétudes avec.

Sur le port de Roscoff, dans le Finistère, l’Écume des jours vient d’accoster sous un grand soleil. Le chalutier de 21 mètres revient d’une campagne de pêche de six jours dans les eaux britanniques. « Tout s’est bien passé », assure Eddy Karouche, aux commandes du navire dont les cales sont remplies de lottes, merlans, limandes, cardines et soles.

Cependant, selon lui, les bateaux des gardes-côtes anglais étaient nombreux en mer. « Avant, on les voyait un peu moins ; là ils montrent qu’ils sont présents », avance-t-il. Surtout, il n’a pas encore pu retourner dans la zone des 6-12 milles au large des côtes britanniques, très poissonneuses et souvent plus calmes pour naviguer, pour laquelle la liste des bateaux autorisés n’était toujours pas tombée, officiellement, vendredi en fin de journée.

« On va être hyper contrôlés, c’est certain », estime Dominique Thomas, patron armateur de l’Écume des jours, mais aussi de l’Itasca, un autre chalutier. Conséquence de cette vigilance des autorités britanniques, un chalutier irlandais a été empêché lundi de jeter ses filets au large de l’Écosse.

L’Itasca se trouvait dans les eaux anglaises le 1er janvier. « Le lendemain, un garde-côte est resté pendant 9 heures à tourner autour », assure M. Thomas, qui est aussi président de l’OP Cobrenord, qui regroupe 180 navires.

Cette vigilance peut s’expliquer par la déception des pêcheurs britanniques, qui espéraient « retrouver la jouissance exclusive de leurs mers territoriales », a rappelé à l’AFP le directeur général du comité national des pêches maritimes et des élevages marins (CNPMEM), Jean-Luc Hall. Or, « l’accord prévoit que ceux qui ont acquis des droits pourront continuer à pêcher », a-t-il ajouté.

Il n’avait cette semaine pas connaissance d’incidents, « parce que des deux côtés on a des patrouilleurs qui sont là pour se montrer et faire en sorte que ça se passe bien ».

Partie de ping pong

Vendredi, l’inquiétude était toutefois de mise dans les zones comme le détroit du Pas-de-Calais, dont les chalutiers se retrouvent rapidement dans les eaux britanniques lorsqu’ils lèvent l’ancre.

« C’est hyper compliqué, toutes les flottilles se retrouvent dans la zone française », a déploré Olivier Leprêtre, l’un des propriétaires du Marmouset 3, bateau étaplois qui quitte régulièrement le port de Boulogne-sur-mer pour aller taquiner la seiche, l’encornet ou le rouget-barbet, côté britannique. « C’est pour ça que je voulais que chacun reprenne ses eaux, le temps que tout se négocie, parce que là, la zone française va être anéantie en peu de temps », craignait-il.

Pêcheurs belges, hollandais, ou allemands, selon lui, viennent piller les poissons qui grandissent dans les zones nourricières proches des côtes françaises, tant la zone est étroite, au niveau du détroit, entre le côtes françaises et britanniques : « C’est un véritable saccage, tout simplement ».

Un peu plus à l’ouest, au large des côtes normandes, c’est un autre imbroglio administratif qui posait encore problème, vendredi, celui des droits d’accès aux eaux des îles anglo-normandes, Jersey principalement.

« Il y a une espèce de partie de ping pong entre la Commission européenne et puis Londres et certainement le gouvernement de Jersey où les politiques entre eux ne sont pas forcément d’accord », a déploré Dimitri Rogoff, directeur du comité régional des pêches de Normandie.

« On est dans un problème administratif ou politique, mais on va les avoir, ces permis ; il y a un petit délai », a-t-il toutefois temporisé. Il se dit « rassuré » par la visite jeudi de la ministre de la Mer Annick Girardin, tour à tour aux pêcheurs normands et bretons, afin de les rassurer sur la mise en oeuvre de l’accord conclu à la veille de Noël, entre Londres et Bruxelles.

Celui-ci prévoit une période de transition jusqu’à l’été 2026 pour renoncer à 25 % des captures européennes dans les eaux du Royaume-Uni.

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