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Dossier : Réforme de la PAC

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Pac et productions animales

Quels instruments pour un élevage durable et rémunérateur ?


TNC le 23/11/2020 à 08:Nov
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Pour la députée européenne Irène Tolleret, qui siège à la "Comagri", la réforme de la Pac sera pas applicable avant 2023 (©Pixabay)

Entre les attentes sociétales, le changement climatique et la nécessité de dégager un revenu décent, les productions animales font face à de nombreux enjeux. Et si des voix s’élèvent en faveur d’une réduction forte de l’élevage pour limiter ses conséquences négatives sur l’environnement, le climat, voire la santé, ces critiques doivent être mises en parallèle des bénéfices également apportés pour permettre l'élaboration de politiques agricoles optimisées.

La Pac peut favoriser l’adaptation des productions animales européennes aux enjeux économiques et environnementaux actuels. (©TNC/Pixabay)

Les agricultures européennes font aujourd’hui face à de nombreux enjeux qui concernent peut-être un peu plus fortement les productions animales, entre difficultés économiques, environnement, émissions de gaz à effet de serre par les ruminants ou les déjections, mais face également aux attentes sociétales en matière de bien-être animal et de santé. 

Lire aussi : Verdir l’agriculture européenne, les défis de la nouvelle politique agricole commune

Cependant, ces effets négatifs de l’élevage doivent être mis en parallèle « des effets positifs que peuvent avoir les productions animales, comme l’occupation de l’espace, le patrimoine, le stockage de carbone quand l’élevage est fortement basé sur l’herbe, le maintien de la biodiversité, explique Hervé Guyomard, directeur de recherche Inrae.

Dans l’ ouvrage Quelle politique agricole commune demain ? qu’il a coordonné avec Cécile Détang-Dessendre et publié en juin 2020 aux éditions Quae, un chapitre (1) est consacré à la problématique des productions animales et aux pistes de solutions que la nouvelle Pac pourrait apporter, en matière de durabilité et de rémunération.

Un équilibre à trouver

Ainsi, il faut trouver un juste équilibre entre la réduction des effets négatifs et la valorisation des effets positifs de l’élevage, explique le directeur de recherche. 

Et cet équilibre doit permettre l’atteinte d’un certain nombre d’objectifs, notamment des revenus plus élevés et plus stables pour les éleveurs, des impacts négatifs réduits sur l’environnement et la santé (baisse des émissions de GES, des fuites de nutriments dans les milieux et des utilisations d’antibiotiques), un accroissement de la fourniture des aménités positives ( stockage de carbone dans les sols sous prairies, maintien de paysages ouverts et diversifiés…), de meilleures conditions de travail en élevage, et des relations élevage-société apaisées.

Quels leviers dans la Pac ?

Dans ce contexte, l’ouvrage énonce un certain nombre de recommandations pour la mise en place « d’une politique agricole commune optimisée, en tenant compte de la diversité des espèces et des systèmes d’élevage ». « Le soutien budgétaire octroyé aujourd’hui aux exploitations d’élevage au titre des deux piliers de la Pac est élevé, ce qui ouvre la porte à d’importantes possibilités de réorientation au service d’une plus grande durabilité », indiquent les auteurs.

Voir aussi : Les propositions de la FNPL pour la future Pac

Pour favoriser la transition agro-écologique, la future Pac pourrait ainsi miser sur une conditionnalité forte et croissante dans le temps, « fondée sur une application plus stricte du principe pollueur-payeur et complétée par des incitations financières en vertu du principe fournisseur-bénéficiaire pour des efforts allant au-delà du minimum réglementaire », estiment les auteurs. Il apparaît nécessaire, pour cela, de passer d’une obligation de moyens à une obligation de résultat, afin d’aller vers les paiements pour services environnementaux. Pour favoriser une transition à grande échelle, ces dynamiques pourraient par ailleurs être encouragées au niveau du territoire, par exemple via un bonus d’agglomération.

Lire également : Biodiversité : la Pac jugée inefficace pour la protéger

Des bénéfices environnementaux mieux rémunérés

Les nombreux bénéfices environnementaux rendus par les prairies devraient par exemple être mieux reconnus et mieux rétribués, à partir d’une définition tenant compte de son âge, de sa composition et de sa conduite, et en allongeant la période permettant le classement en prairies et pâturages permanents, en la faisant passer de 5 ans aujourd’hui à 10 ans environ. La rémunération passerait par un critère de conditionnalité maintenu, complété par des aides ciblées sur les services rendus. «  Il faut se poser la question du maintien des aides couplées aux productions animales », estime en effet Hervé Guyomard, qui propose de les remplacer par des aides proportionnées aux services rendus.

Autre piste évoquée par les auteurs, pour les zones où l’activité agricole est difficile : l’ICHN pourrait être revue, avec des aides de compensation plus importantes des surcoûts liés à la localisation et en remplacement des aides couplées, pour favoriser le choix de la production la plus adaptée au territoire. Enfin, un niveau minimum de bien-être animal pourrait être intégré à la conditionnalité, pour répondre davantage aux attentes sociétales.

A lire aussi, ces articles parus autour du même ouvrage :
–  Pac et revenus agricoles : pourquoi la légitimité des aides directes est-elle souvent remise en cause ?
–  Agroécologie : quelle Pac pour favoriser la transition ?

(1) « La Pac, les productions animales et les consommations de produits animaux », par Hervé Guyomard, Zohra Bouamra-Mechemache, Vincent Chatellier, Luc Delaby, Cécile Détang-Dessendre, Jean-Louis Peyraud, Vincent Réquillard.

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