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Dossier : Réforme de la PAC

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Covid-19

Pas de rupture des appros, mais des tensions sur le transport des céréales


TNC le 26/03/2020 à 08:Mar
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Pour la députée européenne Irène Tolleret, qui siège à la "Comagri", la réforme de la Pac sera pas applicable avant 2023 (©Pixabay)

Dans ce contexte « inédit » de confinement, les agrofournisseurs et organismes de stockage s’adaptent et restent mobilisés pour assurer l’accompagnement des agriculteurs. Si la rupture côté appros ne semble pas à craindre, des problèmes logistiques perturbent l’acheminement des céréales vers les industries ou les terminaux d'exportation. La tension monte sur le marché français.

Pour lutter contre la pandémie de coronavirus, les agrofournisseurs s’adaptent, en déployant notamment les mesures barrières (distance entre personnes, lavage des mains, usage de solutions hydroalcooliques…). Leur stricte application est « demandée et rappelée quotidiennement aux personnes travaillant sur nos sites, et l’accès aux personnes extérieures est limité au strict nécessaire », confie Antoine Part, responsable communication externe chez Axéréal. Comme dans beaucoup d’autres entreprises en France, « l’ensemble des salariés dont les fonctions permettent le télétravail travaillent de chez eux depuis la semaine dernière ».

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Les activités se poursuivent, mais demandent quelques adaptations : « nous avons mis en place la remise des commandes en mode « drive » afin d’éviter au maximum les contacts physiques, des restrictions du nombre simultané de personnes dans les salles de pause et les escaliers, des bons de livraisons et factures électroniques, etc. », détaille Antoine Part. Même fonctionnement à la coopérative de Milly-sur-Thérain (Oise). Les tours de plaine ont également été réorganisés, explique Arnaud Clément, son directeur : « l’agriculteur appelle son conseiller pour lui indiquer la ou les parcelles à aller voir. Le conseiller se rend donc seul en tour de plaine et fait un compte-rendu téléphonique ensuite à l’agriculteur ».

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Une « organisation exceptionnelle » se met aussi en place chez Saint-Louis Sucre afin de « permettre aux inspecteurs de culture, dans les semaines à venir, d’assurer le suivi des betteraves sucrières, en temps réel et de délivrer tous les diagnostics et conseils nécessaires », expliquent les équipes du groupe sucrier. Pour l’heure, « les assistantes des services betteraviers sont disponibles par  téléphone et par e-mail pour répondre à toutes les questions administratives. […] Les inspecteurs de culture et logisticiens gardent une astreinte terrain pour les seuls cas d’urgence (réappro graines, …) et sont disponibles, sinon, par téléphone pour résoudre les éventuels problèmes ».

Pas de rupture pour le moment côté appros

Concernant les approvisionnements, Arnaud Clément ne craint pas, pour le moment, de ruptures d’engrais, de produits phytosanitaires ou de semences. Afin de « simplifier la production et favoriser l’efficacité », la coopérative Axéréal a toutefois choisi de « temporairement resserrer les gammes » pour beaucoup de ses productions.

« Les usines continuent à produire les solutions phytosanitaires indispensables à la production agricole, tout en garantissant la protection des salariés », affirme BASF France – Division Agro dans un communiqué. « En France, l’ensemble de nos collaborateurs se mobilise, car comme l’a rappelé le Gouvernement, l’agriculture est un secteur prioritaire et stratégique ».

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Mais alors que la demande est très forte en cette période, des problèmes sont apparus sur le transports des céréales, notamment pour l’acheminement des grains vers les industries, ainsi que vers les terminaux de chargement portuaires.

Une tension sur la logistique

Interrogé le 24 mars, Axéréal explique pouvoir « acheminer correctement l’ensemble de ses grains et productions pour honorer les contrats », mais alarme sur le fait que « la situation se dégrade progressivement ». La coopérative a constaté « une forte réduction de la circulation des trains, en baisse de 50 % la semaine dernière ».Or, « il est indispensable que le fret reste prioritaire dans la circulation ferroviaire, en soutien à notre secteur stratégique », prévient Axéréal.

Un courtier en céréales spécialisé dans le marché physique confirme le problème : « on entend quelques problèmes logistiques concernant le fret ferroviaire dû au droit de retrait des conducteurs de trains. Le droit de retrait s’applique aussi aux conducteurs de camion, mais ça fait moins de bruit. Rater un train et rater un camion, ce n’est pas le même volume ! »

Le transport routier, « fonctionne correctement sur la courte distance, mais avec des coûts très élevés par rapport à la normale sur la longue distance ». Outre les difficultés liées aux conditions de travail des chauffeurs (manque de point de restauration et de sanitaires), le problème concerne surtout les retours à vide des camions. Avec la fermeture de nombreuses usines, la demande en matériaux a baissé et des camions qui rentraient habituellement du port avec de la marchandise, rentrent sans rien. La situation entraîne mécaniquement un surcoût pour le trajet.

Le courtier souligne également que « la mise en place des mesures barrières a ralenti les rotations camion ». Le temps de chargement des camions est allongé, alors forcément, « le volume transporté n’est pas le même qu’habituellement ».

De son côté, la coopérative de Milly-sur-Thérain, qui connaît actuellement une « grosse vague d’expédition vers Rouen », tire parti de sa situation géographique. « Pour le moment, tous nos transporteurs sont au travail. Nous avons l’avantage d’être situé proche du port de Rouen, et la coopérative arrive à suivre la cadence ». « Si cela continue comme ça, les silos seront vides d’ici fin avril, prêts pour la moisson ! » Pour le directeur de la coopérative, le risque est plutôt du côté des OS qui « sont plus loins des ports, ceux situés par exemple dans l’est de l’Oise ou dans l’est de la Somme, pour lesquels les camions ne peuvent pas faire deux allers-retours dans une journée ».

Des restrictions sur le transport fluvial

Le transport fluvial n’est pas non plus épargné : « le marché du transport par péniche se tend aussi du fait de l’augmentation de la demande », explique Axéréal. VFN (Voies navigables de France) a notamment mis en place des restrictions horaires sur le canal à grand gabarit, par lequel transite un volume important de céréales. « À l’exception du Rhin, l’ouverture des installations pour la navigation commerciale pour le transport de marchandises est maintenue à ce stade mais sur une amplitude journalière réduite. Ces mesures pourront évoluer en fonction de la situation », a précisé VNF.

Concernant l’activité portuaire, « pour l’instant, les dockers sont présents, et les bateaux continuent de charger », affirme le courtier en céréales. Mais bien que les dockers soient disponibles pour charger, encore faut-il que la marchandise soit là. « L’acheminement de la marchandise dans les ports, c’est le « point d’interrogation », l’élément qui déterminera la bonne poursuite des exportations françaises ».

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Quoi qu’il en soit, le courtier rappelle que « nous sommes au tout début du confinement ». La situation est inédite et il apparaît assez compliqué d’avoir une vision à plus long terme. « Aujourd’hui, on essaie de mettre en place des mesures pour pallier les potentiels problèmes qu’on peut avoir sur la logistique. La situation n’est pas alarmiste pour le moment, mais elle pourrait évoluer ».

Assurer le recrutement des saisonniers pour les moissons via WhatsApp

Les organismes de stockage font régulièrement appel à des saisonniers pour les moissons. « De façon globale, le recrutement est actuellement plus compliqué, des forums régionaux annulés et des interventions dans les écoles impossibles », explique Axéréal. Malgré cela, « nos équipes restent mobilisées et s’adaptent. Sur 650 postes de saisonniers ouverts, 180 restent à pourvoir à ce jour. Les entretiens peuvent se réaliser via WhatsApp avec les candidats ».

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