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Dossier : Réforme de la PAC

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Relocalisation, investissement, emploi

L’ « engagement collectif » des chambres d’agriculture pour l’après-crise


TNC le 07/05/2020 à 17:May
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Pour la députée européenne Irène Tolleret, qui siège à la "Comagri", la réforme de la Pac sera pas applicable avant 2023 (©Pixabay)

Si la crise actuelle a remis l’agriculture et l’alimentation au cœur des préoccupations des Français, les chambres d’agriculture veulent s’appuyer sur cette prise de conscience pour retrouver les conditions d’une souveraineté alimentaire, et préparer la sortie de crise sur le plan économique, pour les secteurs agricoles les plus touchés.

« La crise du Covid va générer derrière une crise économique. Pour y répondre, le secteur agricole est un secteur sur lequel s’appuyer », estime Sébastien Windsor, président de l’APCA. Alors que le concept de souveraineté alimentaire est aujourd’hui largement défendu, les chambres d’agriculture ont proposé au ministre de l’agriculture un certain nombre de mesures pour « retrouver une souveraineté perdue au fil des ans ».

Lire aussi : Sept organisations agricoles appellent à «rebâtir une souveraineté alimentaire»

Relocalisation de la production

Si la crise a au moins eu un mérite, c’est d’avoir rappelé aux consommateurs que la production et l’approvisionnement alimentaire étaient des enjeux de premier plan. Pour capitaliser sur cette prise de conscience, l’APCA souhaite, dans la continuité de ce qu’elle propose depuis plusieurs années, favoriser l’origine française et locale d’un maximum de produits.

À ce niveau, « nous avons besoin d’éléments de politique publique », explique ainsi Sébastien Windsor, qui souhaite un étiquetage systématique de l’origine sur les produits transformés, et dans la restauration hors domicile. « On peut demander à nos concitoyens tous les efforts pour acheter français, s’il n’y a pas ce travail autour de l’étiquetage, on ne leur donne pas les clés du choix », souligne le président de l’APCA. Il faudrait aussi, ajoute-t-il, que les collectivités publiques puissent, dans les appels d’offres, mettre un critère de proximité, ce qui est aujourd’hui interdit.

« On a eu quelques belles expériences pendant cette crise, avec certaines enseignes de la grande distribution », salue également le président de l’APCA. Certains distributeurs ont donné les contacts de leurs directeurs de magasin pour permettre aux producteurs de prendre directement contact avec eux en vue de référencer leurs produits. « Ça amène les magasins à jouer une carte territoriale et cela renforce l’inclusion des supermarchés dans les territoires, avec une offre française et une offre très locale qui trouve aussi son marché », salue Sébastien Windsor. « C’est aussi dans leur intérêt, en affichant cet argument du local, ils mettent en avant un autre élément de différenciation que la simple référence de prix entre eux », ajoute-t-il. La démarche nécessite cependant quelques  adaptations pour faciliter le référencement. La crise actuelle a pu servir de déclencheur, il faut désormais que la grande distribution « rentre dans ce travail d’appropriation de son territoire et définisse des règles différentes », explique le président de l’APCA.  

Parallèlement, les chambres travaillent aussi à rapprocher les agriculteurs des collectivités territoriales. La crise a renforcé la demande pour les projets alimentaires territoriaux dans un certain nombre des territoires. « Il est important que les collectivités s’engagent pour développer ces projets alimentaires pour recréer le lien à l’alimentation, et qu’ils ne perçoivent pas uniquement les agriculteurs comme des pollueurs ou des gens qui occupent leur territoire, mais comme des producteurs d’alimentation, qui font vivre l’économie locale », insiste Sébastien Windsor. « Tout en circuit court n’est pas souhaitable », précise-t-il par ailleurs : certaines familles n’ont pas le pouvoir d’achat, toutes les productions ne sont pas possibles en France, il s’agit surtout de renforcer « une démarche d’appropriation », sur toutes les gammes de produits de grande consommation.

Cette relocalisation ne pourra se passer d’investissements, notamment dans les filières qui ont perdu des parts de marché ces dernières années, comme les fruits et légumes, estime l’APCA, pour qui le volet agricole d’un plan d’investissement pour la reprise économique pourrait servir deux objectifs : la relocalisation de la production, et les défis du changement climatique et des aléas climatiques.

Relance économique et promotion de l’emploi

D’autre part, si l’agriculture n’est pas le secteur le plus impacté par les conséquences économiques du Covid-19, certaines filières ont été particulièrement touchées (horticulture, viticulture, pommes de terre, lin…) et auront besoin d’aides spécifiques, rappelle l’APCA. Parallèlement, « on a besoin de faire la promotion des métiers agricoles pour éviter de faire venir de la main d’œuvre étrangère », estime Sébastien Windsor. « Les métiers agricoles ne sont pas forcément plus durs que d’autres métiers, on peut prendre l’exemple des saisonniers dans l’hôtellerie… On a des choses à offrir mais il faut travailler l’image de nos métiers », poursuit-il. Au-delà de l’image, la législation du travail est aussi à travailler pour l’adapter aux spécificités des métiers de l’agriculture, qui doivent pouvoir adapter leurs horaires en fonction de la météo.

Cette communication sur les métiers devrait d’ailleurs commencer dès le primaire, pour Sébastien Windsor : on aurait une demi-journée dédiée à une visite d’exploitation, sur un cursus de six ans de primaire, cela viendrait réduire la fracture entre monde urbain et monde rural ». « C’est une mesure de sensibilisation et d’éducation qui me tient à cœur ». 

L’ensemble des propositions des chambres d’agriculture ont été remises au ministre le 6 mai. « Il y un certain nombre de sujets sur lesquels on sera acteur : c’est un engagement collectif, pas seulement une demande auprès des pouvoirs publics », assure le président de l’APCA.

Lire aussi : Les propositions de la FNSEA pour davantage de souveraineté alimentaire

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