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Dossier : Réforme de la PAC

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Reportage

A Rennes, une réouverture de marché aux airs de poisson d'avril


AFP le 01/04/2020 à 18:Apr
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Pour la députée européenne Irène Tolleret, qui siège à la "Comagri", la réforme de la Pac sera pas applicable avant 2023 (©Pixabay)

« Il ne faut pas arrêter les marchés ! Je n'achète mes produits frais qu'au marché », assure Marie-Angèle, 70 ans. Mercredi matin, son marché en plein air a rouvert à Rennes, mais elle a dû patienter 40 minutes avant de faire ses courses pour cause de contingentement des clients.

« J’habite en immeuble, je n’ai pas de jardin ni de congélateur, et je fais mes courses deux fois par semaine sur les marchés », explique cette habitante du quartier Sainte-Thérèse, gel hydroalcoolique en poche, qui se dit ravie de retrouver son marché, fermé le 25 mars pour freiner la contagion au covid-19.

En temps normal, le marché Sainte-Thérèse accueille plus de 200 commerçants chaque mercredi matin. Épidémie oblige, il a rouvert avec moins de quinze étals, principalement des légumes et du pain, mais aussi un volailler et un fromager. Sur le boulevard, une queue de clients, à distance les uns des autres, s’étend sur plus d’une centaine de mètres.

À l’entrée, une large banderole, « Merci de bien vouloir respecter une distance de 1 mètre entre chaque personne », a été installée. L’accès est contrôlé par deux agents municipaux masqués, qui filtrent les arrivants par groupes de 10, entre des barrières de sécurité qui quadrillent le périmètre. Quant à la sortie, elle se fait « à l’autre bout de la rue ». Au sol, des traits de peinture verte matérialisent la distance de sécurité. Mais une cinquantaine de mètres plus loin, les différentes queues se mélangent et les distances ne sont plus réglementaires.

Raymond, 69 ans, fonce, panier à la main, sur l’étal de Stéphane, son maraîcher. « Je suis venu pour lui, mais les gens sont déçus parce qu’il n’y a pas de boucher, pas de poissonnier, et pas de galette au pays de la galette ! », regrette ce professeur d’anglais à la retraite.

Nathalie ne vend son pain que sur les marchés. « Tous les marchés où je travaille ont été fermés, sauf deux. Les commerçants sont tirés au sort et doivent tourner. On croise les doigts pour que ça s’arrange au plus vite », témoigne la patronne de « La Chouquetterie ».

« Clients stressés »

Pour éviter la contamination, la boulangère a emballé tous ses pains. « On prend du gel après avoir rendu la monnaie. J’ai un masque, j’ai regardé les collègues, mais je n’ai pas osé le mettre », souffle-t-elle.

Régis, qui vend des fraises de Plougastel (Finistère), dit avoir appris « la veille » qu’il était sélectionné pour le marché. « On est le seul fruit sur le marché, les fraises ça donne un peu de sourire à la maison quand on est toute la journée chez soi. Les clients sont reconnaissants d’avoir fait des kilomètres pour vendre à leur porte », assure-t-il.

Malgré le plein soleil, l’ambiance est pourtant loin d’être détendue. Venu d’un immeuble qui donne sur la rue, un homme tente de franchir la barrière lui barrant l’accès au marché. Il est aussitôt repris par un agent municipal. Un autre réussit, sans être vu, à accéder à son commerçant favori.

« Les clients sont un peu froids et stressés par l’argent liquide et les distances de sécurité, même s’il y a sans doute moins de risque qu’en grande surface », témoigne Florence Leroy maraîchère près de Saint-Malo. « L’ambiance n’est pas très agréable, les commerçants ne se parlent pas, et d’habitude, les gens sont plus ouverts, il y a des musiciens », ajoute-t-elle.

Vers 11H20, la police arrive avec un haut-parleur pour annoncer la fermeture à 12 h de l’entrée du marché, à la stupéfaction des dizaines de personnes qui font la queue. « Ce n’est pas la peine d’ouvrir le marché si c’est pour le fermer. On va rester chez soi à manger des conserves, c’est beaucoup mieux », tempête une dame.

Côté producteurs, même déception. « C’est irrespectueux pour les gens qui ont fait une demi-heure de queue », regrette Florence Leroy. « On nous a dit de venir à 6 h, on a embauché des vendeurs pour accélérer le rythme, mais là, je suis loin d’avoir écoulé ma production. On comprend qu’ils ne fassent rentrer les gens qu’au compte-gouttes mais ils n’ont qu’à fermer à 14 h. Si c’est comme ça, je ne reviendrai pas dans 15 jours », prévient-elle.

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