Accéder au contenu principal
Environnement

L’élevage laitier, acteur de la biodiversité


TNC le 09/04/2024 à 15:28
Serotine-480x270-1

chauve-souris Serotine (© © TNC)

La biodiversité est étroitement liée en élevage laitier. L’Idele en a fait la démonstration au cours de la conférence Grand angle lait, qui s’est déroulée à Paris le 4 avril dernier.

On a tout dit sur l’impact écologique de l’élevage laitier. Le méthane entérique, les émissions de CO2, l’ammoniac, les effluents d’élevage… On a tout dit et nombreux sont les travaux de recherche, ainsi que les aménagements réglementaires, qui s’en préoccupent, pour diminuer les émissions jusqu’à un niveau acceptable. On l’a tellement dit qu’on oublie que l’élevage laitier est aussi un acteur de la biodiversité. Ce rôle a été rappelé par Noémie Bataille, Stéphanie Minery et Cécile Laithier, ingénieures à l’Idele, lors du Grand Angle lait qui s’est déroulé à Paris le 4 avril dernier.

La biodiversité ordinaire, favorisée par l’élevage

On sait que c’est dans un paysage varié qu’il y a le plus de biodiversité ordinaire. Forêts, prairies, haies… Les différentes composantes du paysage assurent les fonctions nécessaires à la vie de la faune : reproduction, alimentation, hibernation, alimentation… « Les infrastructures agroécologiques sont les principales composantes du patron paysager. Elles sont des espaces de refuge et de propagation pour les espèces », explique Noémie Bataille.

A titre d’exemple, sur les 26 espèces de chauve-souris présentes en France, 17 étaient présentes sur des fermes laitières ayant fait l’objet d’un diagnostic Biotex ces dernières années. Les prairies pâturées et les haies sont en effet une manne d’insectes dont elles se nourrissent.

Sur les 26 espèces de chauve-souris présentes en France, 17 étaient présentes sur des fermes laitières ayant fait l’objet d’un diagnostic Biotex ces dernières années. (© Maison de la chauve-souris, Kernasleden (Morbihan))

En outre, les endroits où la biodiversité est au maximum sont les écotones, c’est-à-dire les zones de transition entre les différents milieux ; la lisière d’une forêt, par exemple. En gardant les milieux ouverts, l’élevage crée un grand nombre d’écotones.

Des échanges réciproques

Concrètement, des enquêtes conduites par l’Idele ont montré qu’il y avait un échange de services entre l’élevage et son environnement immédiat. « Pendant que l’exploitation entretient un paysage favorisant la biodiversité, elle bénéficie des services rendus par cette dernière : pollinisation des plantes cultivées, prédation des ravageurs, fertilité et stabilisation du sol, diversité des ressources fourragères », souligne Noémie Bataille. Il est donc souhaitable pour tout le monde de conserver les arbres, les fossés, les cours d’eau, les haies, etc.

Caroline Petitjean, enseignante-chercheuse à l’université de Rouen, a par ailleurs montré que l’élevage avait un impact positif sur la biodiversité des sols. Non seulement les prairies sont les milieux les plus riches en vers de terre (avant même les forêts) mais la densité de vers de terre peut être 20 fois plus élevée sur une prairie que dans un sol labouré et nu en hiver : une à deux tonnes par hectare pour l’une, contre 100 kg par hectare pour l’autre. L’activité microbienne est aussi plus soutenue dans les prairies.

Biodiversité dans le lait : les microbes utiles

Autre lieu de biodiversité : le lait. Les laits crus contiennent une grande diversité de microorganismes : bactéries, levures, moisissures, virus… Certains sont pathogènes (listeria, salmonelles, Escherichia coli…). D’autres – butyriques, coliformes – sont préjudiciables à la transformation. Mais la plus grande partie, les bactéries lactiques, sont utiles pour la transformation du lait et l’affinage. Elles contribuent à la qualité organoleptique des fromages et exercent un effet barrière contre les microorganismes pathogènes. Elles sont aussi bonnes pour la santé parce qu’elles ont un effet positif sur le microbiote intestinal.

L’Idele a recensées 1 230 espèces bactériennes dans le lait. Leur présence dépend de l’espèce de ruminant (vache, chèvre ou brebis), des techniques d’élevage et du territoire. C’est un des facteurs qui contribuent à la diversité des fromages, notamment ceux qui sont sous AOP.

Des races diversifiées, adaptées à leur territoire

Dernier volet de la diversité en lien avec l’élevage laitier : celui des races bovines. En France, 18 races spécialisées ou mixtes participent à la filière laitière, dont 13 en sélection. Cinq autres font l’objet d’un programme de conservation.

Pour préserver cette diversité, les observatoires Varume réalisent non seulement des recensements mais aussi des analyses de la variété génétique. A l’échelle de la race, des programmes d’optimisation des accouplements et des indicateurs individuels de parenté permettent de conserver une diversité génétique. Des logiciels d’accouplement utilisés en élevage participent aussi à ce travail. « Le maintien de la diversité génétique garantit le champ des possibles pour l’élevage de demain », conclut Cécile Laithier.