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Culture fourragère

Le sursemis pour rajeunir sa prairie


TNC le 20/10/2021 à 06:04
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Ne pas hesiter a faire de la place et choisir des especes agressives pour le sursemis de prairie. (©TNC)

Avec les sécheresses de ces dernières années, certaines prairies affichent une perte de productivité et un vieillissement. Patrice Pierre, du service fourrages à l’Institut de l’élevage, en explique l’origine et donne quelques clés pour y remédier.

C’est bien le terme de « gériatrie » qu’utilise Patrice Pierre, responsable de projet du service fourrages à l’Idele, pour évoquer ces prairies devenues peu productives. « Les prairies deviennent moins denses, le couvert se dégrade sur le plan floristique, la productivité baisse », décrit-t-il.

Dans les faits, « la végétation est en perpétuelle évolution » selon lui. Aussi, « les pratiques de fauche et de pâturage vont avoir un impact sur la reproduction des espèces prairiales, tout comme les pratiques de fertilisation. Plus le sol est riche, plus les espèces agressives seront sélectionnées. La destruction ou l’apport d’espèces par une sur-utilisation ou une sous-exploitation vont aussi avoir un impact sur l’état de la prairie », continue-t-il.

En conditions météorologiques encourageant la pousse de l’herbe, comme cette année, la sur-exploitation d’une prairie a peu d’impact. À l’inverse, des conditions météorologiques beaucoup plus sèches provoquent un effet de surpâturage particulièrement délétère sur la prairie. « Cela va faire mourir un certain nombre d’espèces, rappelle-t-il, tout comme une mise à l’herbe trop tôt au printemps ». Le risque est surtout de perdre les légumineuses.

Une compétition permanente entre plantes

À ces pratiques s’ajoute le milieu dans lequel se trouve la prairie, comprenant les conditions d’acidité, d’humidité ou de fertilité. Cela va avoir un impact sur le développement de certaines espèces, tout comme sur le stock de graines dans le sol ou la présence d’une végétation en mosaïque (apport de graines, zones de terre nue, etc.). Lorsque la prairie présente des zones de sols nus importantes, deux voies sont possibles : davantage de dégradations, ou une amélioration des qualités de la prairie.

Parmi ces pratiques, le sursemis permet d’éviter une rénovation complète de la parcelle. « Le sursemis est une technique exigeante dans sa mise en œuvre, et aléatoire. Il faut que la prairie soit suffisamment ouverte. Je prends souvent comme exemple des zones de sol nu de la taille d’une assiette à dessert », explique Patrice Pierre. Ensuite, une course de vitesse va se lancer entre les espèces semées et celles déjà en place (compétition pour la lumière). « Il ne faut pas hésiter à faire sur-pâturer la parcelle avant le sursemis pour obtenir une végétation très rase. Dans le choix des espèces, là encore, il s’agit de choisir des espèces agressives comme le ray-gras anglais ou italien, le trèfle violet, quitte à agrandir mécaniquement les espaces de sols nus. Semer dense et faire piétiner les animaux ou passer un rouleau juste après est aussi très utile », continue-t-il.

Ne pas hésiter à faire de la place

Près de 80 % des graines ne lèveront pas. Au travers de plusieurs essais de semis direct de méteil fourrager et d’espèces prairiales dans les prairies vivantes, Vincent Vigier, conseiller en agriculture bio à la chambre d’agriculture du Cantal, confirme les propos de Patrice Pierre : « Il ne faut pas avoir peur de faire de la place pour les espèces semées. Les espèces déjà présentes sont bien implantées dans leur milieu. Elles sont plus fortes que celles semées. Dans ce sens, nous avons utilisé des outils de semis direct, dont une herse-semoir réglée peu profond. Le sur-semis a été effectué à l’automne en lien avec un taux d’azote plus faible. »

Il prône la vesce, « star de tout ce que nous avons semé » entre seigle forestier, pois fourrager, triticale, avoine, ray-gras, etc, tout en alertant sur des cas de toxicité de cette plante pour les animaux. « En période sèche et froide, mieux vaut l’éviter », souligne-t-il.