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Cultures de diversification

Un développement modeste des protéines végétales lié aux faibles débouchés


TNC le 26/03/2024 à 16:43
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Des freins techniques, logistiques et économiques limitent le développement des cultures de diversification riches en protéines en France. (© Adobe Stock)

Soutenues par les aides publiques, les cultures de diversification, riches en protéines ou présentant un fort intérêt agro-environnemental, ne connaissent pas l’essor espéré. Elles souffrent en effet d’un déficit de compétitivité, et de débouchés peu rémunérateurs, souligne une étude commandée par le ministère de l’agriculture.

Pour accélérer la transition agroécologique, le ministère de l’agriculture souhaite pousser le développement des cultures de diversification, mais des freins demeurent dans la valorisation de ces produits et de leur co-produits.

Manque de compétitivité malgré un contexte porteur

La demande est pourtant présente, entre l’attrait croissant des produits riches en protéines végétales dans l’alimentation humaine et animale, le développement de filières « origine France », « garanties sans OGM » avec une empreinte environnementale réduite, ou encore le verdissement progressif des aides de la Pac qui incite les agriculteurs à varier leurs rotations. Cependant, le déficit de compétitivité de ces cultures constitue une difficulté importante, identifiée par le Ceresco dans le cadre d’une étude diligentée par le ministre de l’agriculture.

En dehors du colza et du tournesol, les cultures riches en protéines ne représentent que 6 % de la surface agricole utile, confrontées à des freins techniques, économiques et logistiques : « difficulté à produire du soja sans irrigation, manque de diversité génétique en lentilles et pois chiches, difficile gestion des ravageurs en l’absence de produits phytosanitaires suffisamment efficaces, etc. Ces freins sont renforcés par le réchauffement climatique, qui accentue les stress hydriques et thermiques, tout en créant des conditions plus favorables aux ravageurs », liste une note du centre d’étude et de prospective (CEP) du ministère de l’agriculture, faisant suite à l’étude.

En parallèle, les prix de vente ne compensent pas les rendements plus faibles, et les infrastructures spécifiques pour la transformation de ces produits manquent dans de nombreuses zones du territoire. « Ces productions sont donc souvent prises dans un cercle vicieux dont elles peinent à sortir : les quantités disponibles sont insuffisantes pour atteindre les volumes critiques aux différentes échelles (locale, régionale, nationale), qui permettraient de rentabiliser les activités de chacun des maillons de la chaîne de valeur. De ce fait, les infrastructures et la recherche amont et aval ne se développent pas », explique le CEP.

Des marchés peu rémunérateurs

Les débouchés créateurs de valeur, comme l’alimentation humaine, sont aujourd’hui peu développés pour ces cultures de diversification qui ne trouvent pas, dans les débouchés traditionnels de l’alimentation animale ou de l’exportation sous forme brute, une rémunération suffisante.

Sans compter que si l’augmentation des surfaces suit la trajectoire souhaitée par le ministère de l’agriculture, les experts interrogés dans le cadre de l’étude estiment que l’offre sera plus importante que la demande sur les marchés les plus rémunérateurs. « Par conséquent, en 2035, les volumes et la part de produits bruts orientés vers la nutrition animale augmenteraient fortement et représenteraient plus de 80 % des surfaces de cultures de diversification », indique le CEP. Dans ces conditions, on peut prédire que les objectifs d’augmentation des surfaces cultivées ne seront pas remplis…

Cinq défis pour une meilleure valorisation

L’étude a cependant identifié cinq pistes de travail pour favoriser une meilleure rémunération des protéines végétales et de leurs coproduits. Il s’agit :

– D’élever la concentration en protéines des produits issus de légumineuses ;

– Mieux valoriser l’huile de soja, compte tenu de la forte croissance des volumes à venir (développer le raffinage, l’incorporer dans l’industrie, production de vitamine E…)

– Progresser sur la conservation et la logistique des protéines fourragères (solutions de séchage, optimisation de la mise en marché…) car la filière déshydratation ne pourra pas absorber l’afflux de légumineuses fourragères à venir d’ici 2035

– Mieux valoriser les coproduits des plantes à fibres (lin et chanvre)

– Améliorer l’extraction des métabolites secondaires, molécules synthétisées par les organismes végétaux et utilisées dans l’industrie. Aujourd’hui, les coûts d’extraction sont élevés, la mise en marché est complexe et des volumes minimums sont nécessaires.

Ainsi, malgré la volonté du gouvernement de développer les surfaces de protéines végétales, « la création de valeur, à tous les maillons de ces filières, sera une condition indispensable de leur développement futur », tout comme l’existence de débouchés porteurs. Les auteurs de la note du CEP soulignent cependant que le lancement du plan protéines en 2022 a permis de faire progresser la structuration des filières, pour un meilleur positionnement vers des marchés plus porteurs