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Pac 2023

Tout ce qu’il faut savoir sur la conditionnalité des aides


TNC le 23/03/2023 à 05:05

Faisons le point sur la conditionnalité des aides Pac 2023. (©Carlo Walti/Pixabay)

Le ministère de l'agriculture a publié le 21 mars 2023 au Journal officiel l'arrêté qui détaille les critères de conditionnalité des aides Pac pour l'année 2023. Retrouvez un condensé des infos.

« Principe introduit par la réforme de la Pac de 2003, la conditionnalité des aides se voit renforcée pour la programmation 2023-2027, rappelle le ministère de l’agriculture. Deux types d’exigences sont contrôlés au titre de la conditionnalité :

– Les exigences réglementaires en matière de gestion (ERMG) : changement climatique, eau, sol, biodiversité, paysage, sécurité des denrées alimentaires, bonne utilisation des produits phytopharmaceutiques et bien-être animal.

À noter : les exigences en matière d’identification animale ne sont plus vérifiées au titre de la conditionnalité. Toutefois, des contrôles seront toujours effectués au titre de l’éligibilité aux aides animales.

– Les bonnes conditions agricoles et environnementales (BCAE), que l’agriculteur doit respecter sur les surfaces, les animaux et les éléments dont il a le contrôle. 

Une conditionnalité renforcée

Parmi les BCAE, deux concernent les prairies : 

BCAE 1 : Maintien des prairies permanentes

À partir de 2023, le maintien des surfaces déclarées en prairies permanentes est introduit dans la conditionnalité des aides. Et les surfaces conduites en agriculture biologique sont également concernées. 

« Le ratio annuel de la surface de prairies permanente déclarées dans les dossiers Pac pour une région donnée sur la surface admissible totale déclarée de cette région (PP/SAU) est calculé chaque année en fin de campagne et comparé à un ratio de référence défini dans chaque région administrative (correspond à la situation de 2018). » 

Si la dégradation du ratio annuel par rapport au ratio de référence est supérieur à 5 %, « la conversion des prairies permanentes est interdite. Et une réimplantation de prairies permanentes, prairies dites de compensation, est nécessaire pour les exploitants qui ont retourné des prairies au cours de la campagne précédente, selon des modalités à préciser dans la réglementation nationale » ;

Si la dégradation est inférieure à 5 % mais supérieure à 2 %, « cela implique la mise en place d’un système d’autorisation préalable à la conversion des prairies permanentes, avec dans un certain nombre de cas la nécessité de mettre en place des prairies de compensation à maintenir au moins 5 ans en herbe ». 

« L’absence de réimplantation ou l’absence de demande d’autorisation impliqueront des réfactions au titre de la conditionnalité. »

BCAE 9 : Prairies permanentes sensibles Natura 2000

« À l’instar du ratio des prairies permanentes, la protection des prairies dites sensibles est intégrée à la conditionnalité. Ces surfaces doivent être maintenues : leur labour et/ou leur conversion vers une autre catégorie de surface ou en une surface non agricole ne sont pas autorisés sous peine d’une réfaction au titre des aides de la Pac et d’une obligation de réimplantation (prairies dites de compensation). Seul un travail du sol dans le but de restaurer le couvert de la prairie sensible peut être réalisé. »

Retrouvez les détails des autres BCAE : 

BCAE 2 : Protection des zones humides et des tourbières

Elle sera mise en œuvre au 1er janvier 2024. « Des travaux sont actuellement menés pour définir le zonage qui sera porté à connaissance des agriculteurs au second semestre 2023. »

BCAE 3 : Interdiction du brûlage du chaume, sauf pour des raisons phytosanitaires

Les modalités restent celles de la BCAE équivalente de la programmation précédente : « le brûlage du chaume est interdit sauf dérogation individuelle pour des raisons phytosanitaires ».

BCAE 4  : Établissement de bandes tampons le long des cours d’eau

« Cette condition est élargie aux canaux et fossés. Comme les années précédentes, les cours d’eau doivent être bordés d’une bande enherbée d’une largeur minimale de 5 mètres (ou de 10 mètres lorsque la réglementation en vigueur en application de la directive nitrates le prévoit) sans apport de fertilisants ni de produits phytosanitaires. La carte numérique des cours d’eau concernés sera disponible sur le géoportail et Télépac.»

« Une nouveauté est introduite pour les fossés d’irrigation et les canaux cartographiés comme écoulements permanents, dont la protection par des bandes tampons est requise. Les fossés et canaux visés par cette disposition ainsi que la largeur des bandes tampons sont définis par la réglementation relative aux Zones non traitées (arrêté du 4 mai 2017). Sur ces bandes tampons, l’enherbement n’est pas obligatoire mais aucun fertilisant, ni produit phytosanitaire ne peut être épandu. »

BCAE 5 :  Gestion du travail du sol en vue de réduire le risque de dégradation et d’érosion des sols

Le labour reste interdit sur les parcelles situées sur une pente de plus de 10 % entre le 1er décembre et le 15 février, sauf s’il est effectué perpendiculairement à la pente et s’il existe une bande végétalisée pérenne d’au moins 5 m de large en bas de la parcelle déclarée. Le travail des sols inondés ou gorgés d’eau est également interdit

BCAE 6 : Couverture minimale des sols

L’obligation de couverture des sols déjà contrôlée dans les zones vulnérables est élargie à toutes les parcelles en terres arables situées hors zone vulnérable. La couverture à mettre en place diffère toutefois selon la nature de la parcelle et sa localisation  : 

– Si la parcelle est localisée en zone vulnérable : « toutes les dispositions des arrêtés préfectoraux pris au titre de la Directive Nitrates concernant la couverture des sols pendant les périodes sensibles s’appliquent » ;

– Si la parcelle est située en dehors des zones vulnérables :

  • « Pour toute parcelle déclarée en terre arable, pour les intercultures longues, une couverture végétale doit désormais être mise en place après la récolte pendant une période de six semaines au choix de l’exploitant entre le 1er septembre et le 30 novembre. Les couverts suivants sont autorisés : couverts semés, repousses, mulch, cannes ou chaumes du précédent cultural. »
  • « Pour les terres en jachère : existence d’un semis ou d’un couvert spontané au 31 mai. Ces jachères ne peuvent être détruites avant le 31 août et doivent par ailleurs rester en place pendant au moins 6 mois. »
  • « Entre les phases d’arrachage et de réimplantation des cultures fruitières, viticoles ou de houblon, une couverture végétale implantée ou spontanée doit être en place au 31 mai. »

Zoom sur les BCAE 7 et 8 

Comme le précisait Pascale Nempont de la Chambre d’agriculture du Nord-Pas-de-Calais lors d’une intervention chez le Groupe Carré, les principaux changements concernent surtout les BCAE 7 et 8.

BCAE 7 :  Rotation des cultures

L’obligation de rotation des cultures sur les terres arables (hors cultures pluriannuelles, prairies temporaires y compris destinées à la production de semences, terres mises en jachère et cultures sous eau) se décline sous deux critères :

– Critère annuel à l’échelle de l’exploitation : chaque année sur au moins 35 % des terres arables cultivées de l’exploitation, la culture principale doit être différente de la culture principale précédente, ou doit être suivie d’une culture secondaire (présente a minima entre le 15 novembre et le 15 février) ;

– Critère pluriannuel, au niveau de chacune des parcelles : soit par l’implantation de deux cultures principales sur une période de 4 années, soit par l’implantation de cultures secondaires tous les ans sur cette période de 4 ans.

(©Ministère de l’agriculture)

Qui est concerné ? Tous les agriculteurs métropolitains (Hexagone et Corse) bénéficiaires des aides soumises à la conditionnalité, sauf les exploitants dont :

  • « La totalité de la production sur les terres arables est certifiée (ou en cours) en agriculture biologique » ;
  • « La surface de terres arables est inférieure ou égale à 10 hectares » ;
  • « Plus de 75 % de la surface en terres arables est consacrée à la production d’herbe ou d’autres plantes fourragères herbacées, à la culture de légumineuses ou mise en jachère ou dédiée à une combinaison de ces utilisations » ;
  • « Plus de 75 % de la surface agricole admissible est consacrée à des prairies permanentes, utilisée pour la production d’herbe ou d’autres plantes fourragères herbacées, ou pour des cultures sous eau pendant une grande partie de l’année ou pendant une grande partie du cycle de culture ou sont dédiés à une combinaison de ces utilisations ».

À noter : « les parcelles implantées en maïs semence sont exemptées du critère pluriannuel. De plus, en cas de succession de maïs sur les 4 années, il n’est pas nécessaire d’implanter une culture secondaire les années où le maïs est un maïs semence ».

Une dérogation aussi pour les exploitations situées dans la zone de la plaine du Rhin : « compte tenu des conditions agro-pédoclimatiques, l’exigence au titre de la BCAE 7 consiste en un respect au niveau de l’exploitation de 3 points sur la diversification des cultures (système de points identiques à celui de l’écorégime, plus d’infos plus bas dans l’article) ». 

BCAE 8 : Maintien des éléments du paysage

Cela comprend trois spécificités : 

– La période d’interdiction des tailles des arbres et des haies est désormais allongée, elle s’étale pendant la période de nidification et de reproduction des oiseaux, c’est-à-dire du 16 mars au 15 août.

– Le maintien des éléments topographiques. Les mares et les bosquets de moins de 50 ares ainsi que les haies de moins de 10 m de large, dont l’agriculteur a la responsabilité, doivent être maintenues, afin de préserver la biodiversité. La coupe à blanc des haies et les bosquets en dehors de la période du 16 mars au 15 août est autorisée ainsi que l’exploitation du bois et le recépage. Les coupes à blanc sont toutefois strictement encadrées par la réglementation et une repousse végétative doit être présente l’année suivante.

– Le respect d’une part minimale des terres arables consacrée aux éléments favorables à la biodiversité. Deux options sont possibles :

– Option 1 : les surfaces d’intérêt écologique (SIE) non productives, comprenant les infrastructures agroécologiques (IAE) et les terres en jachère, représentent au moins 4 % des terres arables.

– Option 2 : il faut respecter un taux minimal de 7 % des terres arables dédiées aux IAE et terres en jachère, à des cultures dérobées et/ou des cultures fixatrices d’azote sur lesquelles aucun produit phytosanitaire n’est utilisé. Dans ce cas, il reste pour autant nécessaire de respecter un taux de 3 % de terres arables dédiées aux SIE non productives.

Précision : douze types d’éléments favorables à la biodiversité peuvent être mobilisés pour respecter le taux attendu au titre des IAE et terres en jachères.

Retrouvez les coefficients correspondants pour la conversion en surface :

(©Ministère de l’agriculture)

Qui est concerné ? « Tous les agriculteurs sont soumis au maintien des particularités topographiques et à l’interdiction de coupe des arbres et des haies pendant la période de nidification. Le respect de la part minimale d’éléments favorables à la biodiversité ne s’applique pas aux exploitations présentant au moins une des caractéristiques suivantes » :

  • « La surface en terres arables de l’exploitation est inférieure à 10 ha » ;
  • « La surface en prairies temporaires et/ou en jachère et/ou en légumineuses représente plus de 75 % des terres arables de l’exploitation » ; 
  • « La surface en herbe (prairies permanentes et/ou temporaires) et/ou en riz représente plus de 75 % de la surface agricole utile de l’exploitation ».

À noter la dérogation 2023 pour les BCAE 7 et 8, proposée par la Commission à titre exceptionnel :
S’agissant de la BCAE 7, la dérogation consiste à exonérer l’exploitant du critère annuel à l’échelle de l’exploitation en 2023. En revanche, s’agissant du critère pluriannuel sur 4 ans, les pratiques de l’année 2023 compteront pour le respect du critère qui sera vérifié à partir de 2025.
En ce qui concerne la BCAE 8, la fauche, le pâturage ainsi que la mise en culture* des jachères seront autorisés pour la campagne 2023 (*sauf cultures de maïs, soja et taillis à courte rotation). Attention, la parcelle cultivée, déclarée comme jachère, ne sera pas comptée en jachère pour le barème à points de l’écorégime, mais comme la culture en place.

Nouvelle conditionnalité sociale

À partir de 2023, et pour la première fois dans le cadre de la Pac, le non-respect des règles minimales établies dans l’Union en matière de conditions de travail, de sécurité et de santé des travailleurs et d’utilisation d’équipements de travail est également pris en compte au titre de la conditionnalité des aides.

« Conformément au règlement européen, ce pendant social de la conditionnalité s’appuie sur le système de contrôle et de sanction existant au titre du droit du travail et plus particulièrement sur les suites données aux contrôles effectués par les inspecteurs du travail. […] Les manquements aux dispositions du droit de travail conduisant à des sanctions administratives ou pénales entraîneront une réfaction du montant des paiements soumis à la conditionnalité en fonction de la gravité, de l’étendue et de la persistance de la non-conformité »

Les voies d’accès à l’écorégime

Autre nouveauté de la Pac 2023-2027 : l’écorégime, qui vient remplacer le paiement vert dans l’architecture du premier pilier. Cependant, les exigences liées ne disparaissent pas : elles ont été transférées dans la nouvelle conditionnalité (BCAE). 

« Un exploitant disposant de droits à paiement de base (DPB) peut demander à bénéficier de l’écorégime, en engageant toutes les surfaces admissibles déclarées de son exploitation dans l’une des trois voies d’accès possibles, non cumulables entre elles. Il existe également un complément avec le « bonus haies ». Voici un résumé avec le tableau ci-dessous, et les montants indicatifs pour chaque niveau visé  : 

 

(©Ministère de l’agriculture)

Voie des pratiques agricoles

Quelques précisions : « l’écorégime est accordé à tout agriculteur actif pratiquant une diversification des cultures sur ses terres arables, le non-labour d’au moins 80 % de ses prairies permanentes ainsi qu’une couverture d’au moins 75 % des inter-rangs de ses surfaces en cultures permanentes. Si l’une des catégories de culture (terres arables, prairies permanentes, cultures permanentes) représente moins de 5 % de la surface admissible de l’exploitation, l’agriculteur est exempté de l’application des exigences prévues pour cette catégorie ».

La Chambre d’agriculture des Hauts-de-France a résumé le barème pour les surfaces en terres arables dans le tableau ci-dessous : 

(©Chambre d’agriculture des Hauts-de-France)

À noter : « pour cette voie d’accès à l’écorégime, certaines cultures permanentes sont assimilées à des terres arables comme le houblon, le miscanthus ou les plantes à parfum par exemple ».

Voie de la certification environnementale

Autre option : « l’écorégime est accordé à tout agriculteur actif engageant l’ensemble de son exploitation à titre individuel dans un des trois types de certification suivants, le cahier des charges de l’agriculture biologique (AB), la certification haute valeur environnementale rénovée (HVE rénovée) ou une certification environnementale privée dite de niveau 2+ (CE2+) répondant a minima aux critères définis dans le plan stratégique national ». 

Voie des éléments favorables à la biodiversité

Enfin, « l’écorégime peut également être accordé à tout agriculteur actif justifiant sur son exploitation d’au moins 7 % d’infrastructures agroécologiques ou de terres en jachères sur sa surface agricole utile (SAU) ».

Bonus « haies »

« Un bonus « haies » d’un montant de l’ordre de 7 €/ha est, par ailleurs, accordé à tout bénéficiaire de l’écorégime par la voie des pratiques ou par la voie de la certification environnementale détenant des haies certifiées ou labélisées comme gérées durablement sur au moins 6 % de ses terres arables et de sa SAU ».

Les aides couplées végétales

Retrouvez également le détail des aides couplées végétales :