Accéder au contenu principal
Dans les allées du Space 2021

Retour au bras de fer annuel sur le prix des produits alimentaires


AFP le 16/09/2021 à 09:13
fiches_Supermarche

Les négociations annuelles entre les supermarchés et leurs fournisseurs ne sont pas lancées qu'agriculteurs et industriels ouvrent déjà les hostilités. Ils demandent tous que le prix de l'alimentation augmente afin d'absorber l'inflation qu'ils subissent eux-mêmes, notamment pour nourrir les animaux.

Avec la crise sanitaire, « on entend que les jouets vont augmenter, qu’on ne ne trouve plus d’étagères chez Ikea… Est-ce que les gens hurlent ? Non ! » s’agace la présidente du syndicat agricole majoritaire FNSEA Christiane Lambert. Alors l’inflation de l’alimentation ne doit pas « du tout » être un « totem », un tabou au nom de la défense du pouvoir d’achat des Français, a-t-elle affirmé à l’AFP mercredi dans les allées du salon international de l’élevage de Rennes (Space).

En cette rentrée, agriculteurs et industriels font une nouvelle fois front commun pour pousser les enseignes à payer plus cher les aliments qu’elles mettront en rayon en 2022. Dans leur botte, la spectaculaire augmentation du coût de la nourriture des animaux d’élevage dans un contexte de flambée des matières premières, des emballages et de l’énergie.

L’agenda politique est aussi porteur : le Sénat entame mercredi l’examen d’une proposition de loi de la majorité, qui vise à « protéger la rémunération des agriculteurs ». Adopté à l’unanimité par les députés en juin, le texte porté par le député Grégory Besson-Moreau (LREM) entend limiter les marges de manœuvre des industriels à l’égard des agriculteurs et des distributeurs vis-à-vis des industriel et ce, trois ans après le vote de la loi Alimentation ou « Egalim », qui n’a pas tenu ses promesses.

« Dans le mur »

« On change de braquet, on ne peut pas compter sur des engagements la main sur le cœur » de la part des industriels et distributeurs, a déclaré le ministre de l’agriculture Julien Denormandie à des éleveurs bovins, mardi lors de sa visite au Space. Grand rendez-vous de la filière agroalimentaire, les négociations commerciales déterminent les prix des produits des marques « nationales » (Danone, Fleury Michon, Lactel…). Elles débutent généralement début octobre pour s’achever au 1 er mars, dernier délai.

Le système incite au poker menteur : les industriels, anticipant des demandes de remises fortes des distributeurs, ont tendance à gonfler le prix annoncé, tandis que les distributeurs, soupçonnant leurs interlocuteurs d’exagérer les coûts, font tout pour baisser l’addition. D’autant plus qu’ils se battent pour attirer les clients dans leurs rayons avec les prix les plus bas du marché.

Ce « jeu de dupes entraîne toute la filière agroalimentaire dans le mur », selon le ministre de l’agriculture.

Pour appuyer leurs demandes de hausse de tarifs, chaque filière chiffre les surcoûts subis. Selon le syndicat des fabricants d’aliments pour l’élevage Snia, le panier moyen des matières premières destinées à l’alimentation des porcs, ruminants et volailles a augmenté de plus de 30 % en un an. Résultat, produire un canard à foie gras coûte autour 21 euros en 2021, contre 18,50 euros l’an dernier, illustre le président de l’interprofession Cifog, Eric Dumas.

Du côté des industriels, les coopératives laitières espèrent obtenir auprès des distributeurs des augmentations entre 5 et 7 %, selon le président de leur association, Damien Lacombe, aussi président de Sodiaal (marques Candia et Entremont). « On n’y arrivera pas s’il n’y a pas un minimum d’inflation sur les prix agricoles », a déclaré M. Lacombe au ministre, mardi.

En France, « on ne doit pas être dans un déni de la réalité » en refusant toute inflation dans les supermarchés, a aussi mis en avant mercredi Jean-Philippe André, le nouveau président de l’Ania, principale organisation d’industriels, lors d’une conférence de presse.

La semaine dernière, le syndicat Fnaf-CGT, qui défend les salariés de l’agroalimentaire, dénonçait un « racket institutionnalisé » des industriels. Au nom des distributeurs, Jacques Creyssel (FCD) estime qu’« il faut que des accords raisonnables soient trouvés pour que les grands industriels, qui pour la plupart sont bien sortis de la crise, prennent leur part et que tout le monde pense aux Français et à leurs difficultés ».