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De l’orge de brasserie à la bière

Dans un « marché en plein renouveau », la France tient son rang d’excellence


TNC le 19/02/2019 à 06:00

Le marché mondial de la bière connait une transformation sans précédent : les bières dites « de spécialités » se multiplient et viennent compléter une offre jusqu’alors très standardisée. Pas de quoi bouleverser fondamentalement le marché de l’orge brassicole, mais cette évolution oblige la France, leader dans cette filière, à innover et investir.

Le marché de la bière, boisson alcoolisée la plus consommée dans le monde, a connu une transformation sans précédent ces dernières années. Non pas que la consommation globale de « demis » a explosé en même temps que l’explosion démographique en Asie – le marché est au contraire relativement stable –, mais l’essor des microbrasseries proposant de nouvelles recettes avec de nouveaux processus, vient bouleverser une offre très standardisée.

L’édition 2019 du Demeter, ouvrage d’analyses prospectives présenté par le club du même nom mi-février, dresse un panorama complet de ce marché oh combien stratégique. « L’essor des microbrasseries a été initié aux États-Unis », expliquent Céline Ansart-Le Run, Jacqueline Lariven et Olivia Ruch(1), les trois auteurs de l’étude. « En 2017, les 6 372 craft brewers actives représentaient 12,7 % du marché américain en volume et 23,4 % en valeur. » En Europe, le boom des microbrasseries a été tel que la part de marché de ces unités artisanales et indépendantes représente 3 % en volume.

En France, le nombre de brasseries est passé de 246 en 2006 à 1 150 en 2017. « La moitié des brasseries en France n’existaient pas il y a cinq ans. » Et « ces 1 150 unités produisent 1,2 million d’hectolitres, soit 5,5 % de la production. » La croissance de ce volume présage, selon les auteurs, une progression d’environ 5 à 10 % par ans sur les cinq prochaines années.

Face à cette transformation de l’aval de la filière, la filière brassicole française doit également s’adapter. La France doit préserver sa place de leader : avec 3 Mt de grains produits, dont les trois-quarts sont exportés, la France est le 2e exportateur mondial d’orge brassicole. « La malterie française est représentée par 15 unités de production sur le territoire français, regroupées en cinq groupes dont quatre font partie des cinq premiers mondiaux », selon Franceagrimer et Malteurs de France. « Elle réalise un chiffre d’affaires de plus de 550 M€. En 2017/2018, en France, 1,7 Mt d’orges de brasserie ont été transformées en 1,4 Mt de malt. 80 % de cette production est aussi destinée à l’export. « 20 % des bières brassées dans le monde le sont à partir d’orge ou de malt français », résument les auteurs de l’étude Demeter.

La plus grande malterie du monde est française

Dans cet échiquier en mouvement, l’enjeu pour la France est double : d’une part il s’agit de maintenir sa place de leader sur ce marché. Les leaders français de la malterie investissent ainsi beaucoup pour développer leurs volumes de production. Malteurop, filiale du groupe Vivescia, a ainsi doublé la capacité de sa malterie australienne à l’automne 2018. L’usine peut désormais produire 200 000 t de malt – contre 80 000 t auparavant – dont 95 % est destiné à l’export vers les pays d’Asie du Sud-Est.

Cinquième malteur mondial, via sa filiale BoortMalt, Axéréal a, pour sa part, investi 35 M€ pour agrandir sa malterie située sur le port d’Anvers, en Belgique. La capacité de la malterie, dotée en septembre dernier d’une quatrième tour de maltage, a été portée à 470 000 tonnes par an. Ce qui en fait la plus grande malterie du monde.

Il s’agit aussi d’améliorer la qualité et de diversifier l’offre pour s’adapter à un marché porté par l’innovation. L’Institut du végétal, Malteurs de France et Brasseurs de France ont lancé l’an passé un comité de R&D « pour définir des axes de recherches en termes de production d’orge de brasserie ». L’objectif est de « mieux coordonner les programmes de recherche pour améliorer plus rapidement la compétitivité et la durabilité de la filière, mais aussi la qualité des grains » dans un marché toujours plus exigeant. Vous reprendrez bien une petite mousse ?