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Filière

Orges brassicoles : révision à la hausse des surfaces et reprise de la demande


TNC le 24/04/2024 à 09:13
Orges

Granit Négoce dresse une prévision plus optimiste des surfaces d'orges de printemps 2024 qu'Agreste, avec 670 000 ha (contre 496 000 ha). (© TNC)

Le 18 avril dernier, le colloque des orges brassicoles a réuni l’ensemble des acteurs de la filière, de l’épi au demi. L’occasion notamment de faire un point sur l’état actuel des parcelles en France, les surfaces 2024 et les perspectives de marché.

Pour le moment, « les orges d’hiver (OH) sont globalement en forme. Certaines régions historiques de production ont pu semer avant les pluies, mais la zone Ouest notamment a été particulièrement impactée par une baisse des surfaces », remarque Diane Chavassieux, ingénieure régionale Arvalis pour la région Bourgogne-Franche-Comté.

Avec une estimation à 1,28 Mha d’OH (fourragère et brassicole) au 1er avril, Agreste faisait état la semaine dernière d’une baisse des surfaces de 6,1 % sur un an, mais d’une certaine stabilité sur la moyenne 2019-2023 (+ 1 %). Christophe Alindré de la coopérative Vivescia rappelle toutefois le biais de cette évaluation : « les orges de printemps semées à l’automne (OPSA) sont comptabilisées en tant qu’orges d’hiver par le ministère de l’agriculture, car implantées avant le 1er février ». Habituellement vers les 150 000 ha, la sole d’OPSA tournerait plutôt autour de 75 000 ha cette année, compte-tenu des forts cumuls de pluies automnaux.

Quid du retour du froid ?

Pour les cultures en place, « on note une précocité record dans plusieurs régions avec la douceur des températures », reprend Diane Chavassieux. Et l’actuel retour du froid qui arrive au moment de la méiose inquiète quant aux possibles répercussions sur la fertilité des épis. « Le seuil de risque est placé à 4°C, mais ce n’est pas le seul facteur à prendre en compte. Le rayonnement entre également en jeu. Il est toutefois trop tôt pour établir un diagnostic, le verdict se fera à la floraison ! »

« Avec les pluies, les apports d’azote ont été relativement bien valorisés, on note cependant un risque de verse élevé avec l’élongation des tiges. Concernant ces dernières, leur nombre est plutôt faible, mais celles présentes sont bien développées. Le potentiel du nombre d’épis/m² reste donc bon dans l’ensemble. »

L’ingénieure Arvalis soulève aussi des inquiétudes « concernant les structures de sols et l’enracinement des cultures : quelles seraient les conséquences si le climat vire au chaud et au sec ? » Sur le sujet des bioagresseurs, « on observe une remontée de la JNO et de la maladie des pieds chétifs. On a vu aussi de la mosaïque en sortie d’hiver, les symptômes se sont toutefois effacés assez vite. La rouille naine et la rynchosporiose sont les deux maladies foliaires signalées. On signale aussi des symptômes d’hypersensibilité qui ont peu d’impact sur le rendement ».

« La gestion des adventices reste le problème majoritaire, notamment les graminées. Avec l’automne pluvieux, difficile de trouver un créneau pour intervenir et si cela a été fait, quelques soucis de phytotoxicité ont été repérés… ».

Des prévisions plus optimistes qu’Agreste pour les surfaces d’orges de printemps

Du côté des orges de printemps (OP), « on constate de belles levées même si très peu de semis ont été réalisés en conditions idéales. La plupart se sont déroulés après la mi-mars voire en avril », comme en témoigne Benoît Piètrement, vice-président de l’AGPB et agriculteur dans la Marne, qui a implanté ses OP le 13 avril dernier. Selon Diane Chavassieux, « ces conditions réduisent de 20 % la probabilité d’atteindre le rendement optimal. On estime que 120 mm sont nécessaires entre le semis et l’épiaison pour permettre au plus grand nombre de tiges de monter à épis. D’après les essais Arvalis, on a 5 à 6 chances sur 10 d’obtenir ce cumul pour des semis après le 20 mars dans les régions historiques de production ».

Sur la question des surfaces d’orge de printemps, « on ne croit pas aux derniers chiffres d’Agreste (496 000 ha) », annonce Alexandre Jonet de Granit Négoce, dressant une prévision plus optimiste avec 670 000 ha pour cette récolte 2024.

« De bonnes perspectives à moyen/long terme »

Dans ses perspectives de marché, Granit Négoce table alors sur « un important surplus de production française exportable vers les pays tiers, par rapport à la campagne dernière : 441 000 t en OH et 398 000 ha en OP (contre respectivement 80 000 t et – 45 000 t lors de la récolte 2023), grâce à une hausse des surfaces et un meilleur taux de sélection. Pour les rendements, on a pris la moyenne olympique en orge d’hiver et 95 % de la moyenne en orge de printemps », précise Alexandre Jonet.

Après une baisse lors de la campagne 2023 (- 10 % VS récolte 2022) due en grande partie à l’inflation, « la demande en orge brassicole repart à la hausse en Europe ». Granit Négoce envisage, pour la récolte 2024, « une augmentation de 5 % sur un an et un retour à la normale d’ici le 1er semestre 2025 ».

« Les orges de brasserie françaises doivent gagner en compétitivité afin d’approvisionner le marché mondial. La Chine, premier marché mondial en ventes de bière, représente notamment un important débouché pour l’Hexagone, mais on observe une très forte variabilité selon les années, avec d’autres acteurs qui commencent à prendre de la place. Suite à la suppression des surtaxes chinoises au 1er semestre 2023, l’Australie est également revenue dans la course », note Alexandre Jonet. « Les orges d’hiver brassicoles françaises sont exportées sur trois continents : l’Asie, l’Amérique Centrale et l’Afrique. Elles sont rentrées par le prix, on espère maintenant que ce flux peut devenir structurel, au Mexique notamment. »

Même si « tout reste encore à faire », Granit Négoce livre une analyse globalement confiante sur la filière orges brassicoles : « Les perspectives à moyen/long terme sont bonnes, avec notamment des primes brassicoles confortables pour les agriculteurs français et européens pour les récoltes 2022, 2023 et 2024 ».