Accéder au contenu principal
Biodiversité

Blocage des 27 sur un texte-clé du Pacte vert de l’UE


AFP le 26/03/2024 à 21:35

Les Vingt-Sept ne peuvent pas à ce stade entériner une législation imposant la restauration des écosystèmes abîmés faute de majorité suffisante, selon la présidence belge du Conseil de l'UE, qui mise cependant toujours sur un feu vert d'ici fin juin.

Après avoir profondément divisé les eurodéputés l’an dernier, l’impact en milieu rural de la législation « restauration de la nature », texte-clé du « Pacte vert » européen, reste un sujet explosif sur fond de colère agricole et à quelques mois des élections européennes de juin.

Des inquiétudes balayées mardi par le ministre allemand de l’agriculture, Cem Özdemir : pour lui, ce texte défendu par Berlin, qui vise à enrayer le déclin de la biodiversité, est « un bon compromis qui tient compte de manière appropriée des intérêts de l’agriculture ».

Après d’âpres pourparlers, les négociateurs du Parlement et des États membres s’étaient déjà entendus mi-novembre sur une version édulcorée de la législation, un accord entériné tel quel fin février par les eurodéputés en séance plénière.

Le texte impose d’instaurer d’ici à 2030 des mesures de rétablissement des écosystèmes sur 20 % des terres et des espaces marins à l’échelle de l’UE, et de restaurer au moins 30 % des habitats (zones humides, forêts, rivières, prairies sous-marines, etc.) en mauvais état.

Il faut désormais l’ultime feu vert formel des Vingt-Sept pour l’entrée en vigueur. Or, faute de majorité requise, le sujet a été retiré tardivement d’une réunion lundi des ambassadeurs des États membres, censés l’entériner.

Pas de majorité qualifiée

En cas de vote, selon des sources diplomatiques, trois États (Suède, Pays-Bas, Italie) voteraient contre, et cinq (Belgique, Autriche, Pologne, Finlande, Hongrie) s’abstiendraient: assez pour ne pas atteindre la majorité qualifiée (15 pays représentant 65 % de la population de l’UE).

Après le vote positif du Parlement, « nous aurions dû valider l’adoption (du texte) sans discussion, c’est la procédure habituelle, mais malheureusement nous avons dû faire le constat que c’était impossible », a déploré lundi le ministre bruxellois de l’Environnement Alain Maron, dont le pays occupe la présidence tournante du Conseil de l’UE.

« Ce n’est pas la fin du processus, la présidence (belge) travaillera dans les prochaines semaines en concertation (avec les États) (…) Notre objectif reste de faire aboutir ce dossier sous cette présidence » d’ici fin juin, a-t-il martelé, à l’issue d’une réunion des ministres de l’environnement.

La Belgique, dans son rôle de présidente du Conseil de l’UE, n’exclut pas de décrocher un accord lors d’une réunion ministérielle mi-juin, après les élections.

Abstentions

Plusieurs États réfractaires ont justifié leurs réticences : l’Autriche et la Belgique sont contraintes de s’abstenir en raison de divisions au sein de leur État fédéral, la Hongrie assure vouloir privilégier l’échelon national pour de telles réglementations, et l’Italie dit refuser « de nouvelles charges pour le secteur agricole », tandis que la Finlande entend préserver sa puissante sylviculture.

De son côté, le commissaire européen à l’environnement, Virginijus Sinkevicius, a exprimé « son profond regret » : « L’impasse où l’on se trouve génère de sérieuses préoccupations quant à la cohérence et à la stabilité du processus décisionnel au sein de l’UE (…) et met en péril notre réputation internationale », a-t-il prévenu.

« Sans une loi de « restauration de la nature », il nous manquerait un outil crucial pour atteindre nos objectifs climatiques (…) Malheureusement, nous sommes dans une situation où nous risquons d’aller les mains vides à la COP16 Biodiversité » en Colombie cette année, a-t-il déploré devant la presse.

Les Vingt-Sept ont par ailleurs approuvé mardi une révision de la politique agricole commune (Pac) détricotant ses contraintes environnementales, une réponse aux revendications du monde agricole, au grand dam des ONG écologistes.