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Reportage Gaec du Bas pays (44)

Des couverts pour se passer de glyphosate


TNC le 15/10/2021 à 18:02
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Le résultat obtenu avec le déchaumeur à disques est très intéressant et permet le semis. Peu de différence est observée avec ou sans rouleau écraseur ; un rouleau hacheur aurait eu davantage d'effet en raison du développement du couvert. (©Nathalie Tiers)

La recette ne fonctionne pas à chaque fois, mais au Gaec du Bas pays, membre du groupe Dephy du bocage nantais, on s’efforce le plus souvent possible de ne pas employer de glyphosate. Les agriculteurs maîtrisent le salissement des parcelles grâce aux couverts végétaux, aux cultures dérobées, et au travail du sol, si possible superficiel.

Le couvert implanté il y a deux mois et demi sur cette parcelle du Gaec du Bas pays à Carquefou est une réussite. « Suite au blé, j’avais d’abord prévu d’appliquer du glyphosate en raison du liseron, mais de la pluie a été annoncée et j’ai donc saisi l’opportunité d’implanter un couvert le 2 août, explique Baptiste Hellec, l’un des trois associés. Je voulais un développement rapide. Au semis, j’ai mélangé 2 kg de moutarde blanche, 500 g de moutarde brune, 1,4 kg de phacélie, 1,4 kg de radis chinois et 800 g de cameline pour un coût de 20 €/ha. » Sous le couvert, le sol est plutôt propre. L’agriculteur prévoit une destruction au cover-crop puis un labour avant le semis de l’orge. Ce 11 octobre toutefois, d’autres outils sont en démonstration pour la journée technique « alternatives au glyphosate » organisée par la chambre d’agriculture des Pays de la Loire et le Civam 44.

D’une part, un rouleau écraseur Sky est associé à un déchaumeur à disques indépendants Kuhn. « Il y a peu de différence dans les passages avec ou sans rouleau, observe Baptiste. Étant donné le développement du couvert, un rouleau hacheur aurait eu davantage d’effet. En revanche, le résultat obtenu avec le déchaumeur à disques est très intéressant et permet le semis. Nous réfléchissons avec la Cuma à l’achat de cet outil permettant un travail plus superficiel que le cover-crop. »

D’autre part, une charrue déchaumeuse Bugnot a été testée, mais en raison du volume de végétation et son aspect filandreux, elle n’était pas dans les meilleures dispositions. « C’est un outil intermédiaire pour travailler entre 10 et 20 cm de profondeur, déclare le représentant du constructeur. Elle permet d’économiser du carburant. Dans le cas présent, il aurait fallu broyer avant pour éviter le bourrage. »

Un couvert après une récolte précoce de maïs

Dans une autre situation en 2020, un couvert avait également permis au Gaec du Bas pays de bien gérer l’interculture. Un mélange de moutarde, phacélie et radis chinois a été implanté après la récolte précoce de maïs ensilage fin août 2020. Début novembre, le blé a été semé dedans, en combinant un cultivateur à l’avant du tracteur. « La levée était réussie, le blé était propre, témoigne Baptiste Hellec. J’ai appliqué un désherbant au stade trois feuilles qui a empêché la reprise du radis, et j’ai fait une très bonne récolte à 85 q/ha. » Cet automne hélas, après une récolte tardive de maïs ensilage laissant trop peu de temps à l’installation d’un couvert, une parcelle sale a été traitée au glyphosate début octobre avant l’implantation du blé. Pas si évident donc d’abandonner définitivement cet herbicide.

Le volume de végétation et son aspect filandreux ont généré du bourrage avec la charrue déchaumeuse. Un broyage préalable aurait été utile. (©Nathalie Tiers)

« Au sein du groupe Dephy du bocage nantais, comme dans la plupart des groupes Dephy, nous observons une baisse de l’IFT moyen tous traitements confondus, indique Lucile Lefèvre, animatrice à la chambre d’agriculture des Pays de la Loire. Toutefois, la difficulté reste la diminution de l’IFT herbicides. Notre groupe compte à la fois des utilisateurs et des non-utilisateurs de glyphosate, ces derniers ayant souvent recours au labour. »

De trois à six cultures dans la rotation

L’hiver dernier, le groupe a réalisé un atelier chez l’un des membres, céréalier sur 140 ha et éleveur de volailles, dans l’objectif de reconcevoir collectivement son système de culture. Il n’a pas utilisé de glyphosate depuis trois ans et espère réduire son IFT moyen, actuellement de 2,7 (soit 20 % en dessous de la référence régionale pour les exploitations de grandes cultures sans prairie). « Mon objectif est de passer d’une rotation colza – blé – orge à une rotation de six cultures dont deux de printemps : tournesol et sorgho grain, annonce Jérémy Chesneau. J’ai également introduit la féverole, une tête de rotation intéressante restituant de l’azote. J’ajoute un couvert de moutarde pure entre blé et orge, et un couvert de phacélie, vesce et trèfle d’Alexandrie entre orge et tournesol. Je continue à labourer et j’utilise beaucoup le déchaumage. Ce système est encore trop récent pour voir les effets sur le salissement. » Le jeune homme a par ailleurs testé le désherbage mécanique sur blé dans l’objectif de réduire les herbicides, mais ce ne fût pas concluant.

Au Gaec du Bas pays, produisant entre autres 900 000 litres de lait sur 170 ha, la réflexion sur l’usage des couverts vise quand c’est possible à réduire à la fois le salissement et le labour. « Entre blé et maïs, nous avons remplacé les cultures dérobées de ray-grass italien pour l’ensilage par des méteils fourragers composés de seigle, vesce et trèfle, détaille Baptiste Hellec. Le méteil étouffe bien les adventices et ne génère pas de repousse. Sa destruction est plus facile et l’implantation du maïs à la suite peut se faire sans labour. De plus, les rendements et les valeurs alimentaires sont bons. »

Détruire les prairies en saison sèche

L’intérêt des couverts végétaux en interculture est aujourd’hui largement reconnu pour de multiples fonctions : piège à nitrates, protection contre l’érosion, préservation de la structure et de la vie du sol, soutien aux pollinisateurs et auxiliaires, et bien sûr, contrôle des adventices par concurrence et étouffement. Restitués au sol, ils sont aussi source de matière organique et d’azote en particulier.

Ils peuvent convenir aux intercultures longues avant une culture de printemps, mais aussi aux intercultures courtes avant une culture d’hiver comme montré dans la parcelle de démonstration de Carquefou. La composition d’un couvert doit être choisie en fonction ; elle doit aussi prendre en compte les cultures présentes dans la rotation, et le mode de destruction, dans l’idéal mécanique pour les stratégies sans glyphosate (roulage, déchaumage, broyage, gel, labour). Ainsi, le Gaec du Bas pays cultivant des légumes pour d’aucy sur des terres irrigables, a l’interdiction d’utiliser sur ces parcelles des couverts à base de crucifères en raison du risque maladies. De son côté, Jérémy Chesneau qui a introduit la féverole dans sa rotation, a banni l’espèce de ses couverts.

« L’usage du glyphosate concerne majoritairement la gestion des adventices en interculture, souligne Lucile Lefèvre. Mais il est aussi employé pour la destruction des prairies. Cette opération peut être réalisée mécaniquement, de préférence l’été pour favoriser le dessèchement et implanter à la suite un couvert de colza ou un méteil fourrager, qui seront détruits mécaniquement au printemps suivant au cover-crop ou au chisel. »