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Fourrage

L’ensilage de maïs a-t-il encore sa place dans l’auge en 2024 ?


TNC le 26/04/2024 à 11:46
EnsilagedemaIsmain

Souvent décrié pour sa consommation en eau, l'ensilage de maïs reste un fourrage sécurisant pour nombre d'éleveurs. (© TNC)

À l’occasion des Unitechdays, François d’Hubert de la chambre d’agriculture de Seine-Maritime, Jean-Luc Verdu, conseiller pour Avenir conseil élevage, Amédée Perrein, fondateur de Silphie France, et Olivier Polleux, responsable de l’approvisionnement aliment chez Agora ont tenté de répondre à cette épineuse question. Et pour les techniciens, la réponse tend vers le oui !

À l’occasion des Unitechdays 2024, les étudiants d’Unilasalle (école d’ingénieurs en agriculture dans l’Oise) ont interpellé un florilège d’experts sur la question du maïs fourrage : la culture a-t-elle encore sa place en 2024 sur fond de changement climatique ? Pour les experts, la réponse est oui. Mais rien n’empêche de diversifier ses apports en fourrage pour se préparer au changement climatique.

Pour François d’Hubert, conseiller fourrage à la chambre d’agriculture de Normandie, les chiffres parlent d’eux-mêmes. « Avec 230 000 ha implantés en maïs fourrage en Normandie sur la campagne précédente, difficile de le dire passé de mode ». La culture n’est pas dépourvue d’attraits. « La sécheresse de 2022 a plutôt conforté les agriculteurs vers le maïs. Les baisses de rendements ont été beaucoup moins fortes en maïs qu’en herbe ».

Le sorgho n’a pas enchanté les éleveurs normands

D’autant que les expérimentations sur le sorgho en Normandie ont laissé les éleveurs sur leur faim. « Il est apprécié des corbeaux, a besoin d’un sol bien réchauffé, et demande aussi de l’eau au démarrage », résume François d’Hubert.

Au-delà du rendement, la fourragère présente un avantage économique indéniable pour Jean-Luc Verdu, conseiller chez Avenir conseil élevage. « Un maïs en silo revient à 101 €/t MS. On a peu de fourrages capables de le concurrencer sur cet aspect. Compte 109 € pour un sorgho monocoupe par exemple ».

Dans la moitié Nord-Ouest de la France, la concurrence entre les cultures de ventes et cultures fourragères pousse à privilégier le maïs. « Les éleveurs recherchent du rendement et de la fiabilité pour minimiser les surfaces dédiées à l’élevage », ajoute François d’Hubert.

D’autant que le printemps pluvieux de 2024 plaide en sa faveur. « Fin mars, il aurait fallu faucher les ray-grass, mais il pleuvait. La valeur alimentaire se détériore vite. A contrario, un maïs à 34 % de MS peut se récolter sous 15 jours sans que sa valeur ait changé du tout au tout », ajoute le conseiller en élevage.

Ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier

Amédée Perrein tempère : « le Nord-Ouest de la France a l’avantage d’être plutôt arrosé, mais il y a d’autres zones en France où l’on y arrive plus à cause du changement climatique ». Pour le fondateur de Silphie France, la clé réside dans la diversification des cultures fourragères. « Les campagnes se succèdent, et il n’y a pas une année sans aléa climatique. Il y a toujours trop, ou pas assez d’eau à un moment ». Fort de ce constat, il recommande aux éleveurs de ne pas mettre tous leurs œufs dans le même panier. « Il faut avoir des fourragères adaptées à sa région, et surtout, essayer de diversifier pour se constituer un peu d’avance de fourrage. Une sorte de réserve stratégique ».

Récolter ses fourragères au maximum de leur potentiel

Pour Olivier Polleux, responsable de l’approvisionnement aliment chez Agora, « il n’y a pas de mauvais fourrage, le tout, c’est de le récolter au bon moment pour l’utiliser au maximum de son potentiel ». Et ce n’est pas toujours le cas, même pour le maïs. « Le maïs ensilage a besoin d’un peu de temps en silo pour être bien digestible, alors on est parfois coincé par les stocks. On voit assez fréquemment des fourrages qui ne sont pas utilisés à plein potentiel ».

Et si la fourragère reste une valeur sûre pour nombre d’éleveurs, le changement climatique doit tout de même interpeller sur ses pratiques. « Dans certaines zones, on peut se demander s’il est vraiment rentable de continuer à faire un couvert avant un maïs », poursuit Olivier Polleux. « Si le couvert est récolté début avril, ça passe. Mais si l’on se retrouve à semer son maïs début juin dans le sec, il faut se poser des questions. Un maïs semé en début de saison, qui aura le temps de bien développer son tissu racinaire avant la sécheresse aura peut-être plus d’intérêt ».