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Dossier : Maladie hémorragique épizootique (MHE)

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La MHE bouscule le marché du broutard et pèse sur les prix


TNC le 26/10/2023 à 05:Oct
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(©Getty Images)

La détection de cas de MHE dans le Sud-ouest a entraîné la fermeture du marché algérien aux importations de broutards français, tandis que les envois ont repris vers l’Espagne et l’Italie, sous conditions. La demande reste présente, l’offre réduite, et la pression de la MHE sur les prix varie selon les bassins de race.

La maladie hémorragique épizootique (MHE) met les cours du broutard sous pression, mais le marché est demandeur, indique l’Idele dans ses Tendances du 24 octobre.

Rappelons que la maladie a fait son apparition fin septembre dans des élevages bovins du sud-ouest de l’Hexagone, autour desquels une zone réglementée a été mise en place à 150 km à la ronde. Zone où les mouvements d’animaux sont interdits sauf en cas de dérogation, et qui ne cesse de s’élargir au fil des nouveaux cas.

Au 20 octobre, le ministère de l’agriculture recensait 1 194 foyers de MHE dans huit départements, et vingt-deux départements étaient concernés par la zone-tampon, entièrement ou en partie. (© Ministère de l’Agriculture)

Une situation « très inquiétante au niveau sanitaire et psychologique pour les éleveurs touchés avec des situations extrêmement compliquées, quand les élevages sont bloqués et les animaux malades », rappelle Laurent Chupin, spécialiste des marchés de la viande bovine, sur Web-agri.

Une situation difficile surtout sur le plan économique : les élevages situés dans la zone réglementée se sont dans un premier temps vus interdits d’exporter des bovins vifs vers le reste de l’Union européenne, et donc contraints de garder les bêtes sur les fermes.

Cela, sachant que « le broutard d’export est la première production de bovin viande du Sud-ouest », comme le soulignait il y a peu Thierry Deltor, conseiller bovin viande à la chambre d’agriculture des Pyrénées-Atlantiques. Sachant aussi que les deux premiers débouchés des broutards français sont européens : la France en a exporté un peu plus d’un million en tout en 2022, dont 858 000 vers l’Italie et 86 000 vers l’Espagne.

Des accords avec les autorités espagnoles et italiennes

Les restrictions à l’export vers ces deux pays se sont néanmoins vite assouplies : après négociations, l’Espagne puis l’Italie ont rouvert, sur la deuxième quinzaine d’octobre, leur marché aux broutards issus de la zone tampon, après désinsectisation et test PCR négatif avant expédition.

Des contraintes qui pèsent sur les élevages concernés. Les « surcoûts engendrés par le maintien des animaux sur la période et par les frais sanitaires doivent faire l’objet d’une prise en charge par l’État pour ne pas ajouter aux difficultés financières d’un secteur déjà marqué par de bas revenus et de lourdes charges de production », demandait d’ailleurs la FNB dans un communiqué daté du 12 octobre.

Les accords avec les autorités espagnoles et italiennes devraient « permettre de fluidifier les marchés et les échanges dans les semaines qui viennent », note Maximin Bonnet, agro-économiste à l’Idele. « Les discussions en cours avec les autres pays de destination des bovins français […] doivent se concrétiser dans les meilleurs délais pour restaurer complètement la situation », ajoute la FNB.

La fédération fait notamment allusion à l’Algérie, qui a importé entre 41 000 et 69 000 broutards français entre 2019 et 2022 et qui leur a complètement refermé son marché le 23 septembre, par mesure de précaution. Au Sommet de l’élevage, le ministre Marc Fesneau laissait entendre que les négociations avec ce pays prendraient un certain temps.

Offre affaiblie par la forte baisse des naissances, marché demandeur

Du côté des disponibilités, Maximin Bonnet souligne la forte baisse des naissances de veaux de mères allaitantes cette année en France : un recul de 155 000 têtes sur les huit premiers mois de 2023 par rapport à 2022, soit -7 %. En cause : « la décapitalisation allaitante (- 2,6 % /2022 au 1er septembre, — 5,5 % /2021) et le report des naissances vers l’automne ».

L’offre est réduite, et en parallèle la demande était ferme ces dernières semaines, tant pour l’export que pour l’engraissement en France. Si bien que les marchés français et italien ont pu « accepter les 20 000 broutards environ qui étaient prêts à partir pour l’Algérie, sans avoir de gros impact sur les prix », poursuit l’expert.

Alors qu’elles avaient baissé en août, les exportations tous bovins confondus vers l’Italie ont grimpé de 15 % du 25 septembre au 15 octobre par rapport à la même période en 2022.

Ces derniers jours, la demande italienne est plus mesurée, note Laurent Chupin, ces gros volumes ayant « contribué à charger les ateliers » ; « les expéditions vers l’Espagne sont en repli » et « la demande intérieure reste soutenue ».

L’évolution des prix varie selon les zones MHE

« La pression sur les cours dépend de la situation sanitaire dans chaque bassin de race », précise l’Idele : les prix fléchissent pour les bassins proches de foyers ou dans les zones réglementées et restent fermes dans les zones indemnes.

Si les prix des broutards charolais s’étaient « bien tenus jusque fin septembre », ils ont « reflué début octobre suite à la découverte de cas de MHE en Suisse alémanique », menant à la mise en place d’une seconde zone réglementée dans l’est de la France, qui touche la Saône-et-Loire, explique Maximin Bonnet.

Sur la semaine allant du 9 au 15 octobre, le Charolais U de 350 kg était ainsi en repli de 9 centimes sur quatre semaines, à 3,49 €/kg (+1 % /2022, +30 % /2021), idem pour le Charolais U de 450 kg, à 3,38 €/kg (+1 % /2022, +33 % /2021).

Le 15 octobre, le Charolais U de 350 kg avait perdu 9 centimes sur quatre semaines, cotant à 3,49 €/kg (© Idele)

Les deux foyers suisses de MHE ont toutefois été infirmés le 24 octobre, permettant de lever les mesures instaurées en France. Voilà qui pourrait changer la donne pour les prix du broutard charolais dans les jours qui viennent.

Le bassin historique de la race limousine étant plus éloigné des zones réglementées, « les prix des broutards limousins se sont mieux tenus ces dernières semaines, à l’instar du Limousin E de 350 kg vif qui restait stable sur la semaine du 9 octobre, à 3,85 €/kg (+ 5 % /2022).

Le broutard croisé R de 300 kg était de son côté en hausse de 4 cts sur quatre semaines, à 3,19 €/kg (+ 3 %/2022), les femelles limousines E de 270 kg restaient stables, à 3,30 €/kg, au même niveau qu’en 2022. Et la cotation des Charolaises U de 270 kg augmentait de 6 cts, à 3,36 €/kg vif (+ 2 %/2022).

La MHE se transmet par la piqûre d’insectes culicoïdes (des petits moucherons) uniquement, comme pour la FCO, et les symptômes sont proches : hyperthermie, larmoiement, œdèmes au niveau de la bouche et des naseaux. Le taux de mortalité est de 1 % et le taux de morbidité de 10 %. Aucun vaccin n’est disponible et seule la désinsectisation des bovins permet à ce jour de prévenir la maladie.

Détectée pour la première fois en 1955 aux États-Unis, où elle touche notamment les cerfs de Virginie, la MHE est aussi présente en Australie, en Asie et en Afrique. Elle est arrivée en 2022 sur le sol européen, « probablement à la suite d’une dissémination de moucherons par le vent depuis la Tunisie » selon le ministère de l’Agriculture, d’abord en Italie puis en Espagne.

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