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Gel

L’une des pires catastrophes depuis des décennies pour l’agriculture française


AFP le 09/04/2021 à 11:56

« Catastrophique », « dramatique » : le gel qui a couvert une large partie de la France cette semaine s'annonce comme l'un des pires depuis des décennies, de nombreuses cultures dont des vignes, des arbres fruitiers ou encore des céréales ayant été frappées, du nord au sud du pays.

Les professionnels du vin sont particulièrement catastrophés. Dans le Bordelais, Dominique Guignard écrase des feuilles gelées de vigne dans ses mains. « Ca casse comme du verre parce qu’il n’y a plus d’eau, ça s’est desséché complétement, il n’y a plus de vie », explique le président du syndicat viticole des Graves. Cet épisode est « l’un des plus sérieux des dernières décennies » et cela va amputer la production de l’année, a estimé le CNIV (Comité National des Interprofessions des Vins à appellation d’origine et à indication géographique). « On sait déjà qu’on va avoir une très faible récolte en 2021 », a déclaré à l’AFP son président Jean-Marie Barillère.

« Il y a énormément de détresse, énormément d’émotion », a déclaré le ministre de l’agriculture Julien Denormandie vendredi matin sur BFMTV, quelques heures avant de se rendre en Indre-et-Loire, pour apporter son soutien à la filière viticole, puis d’aller samedi chez des arboriculteurs de la Vallée du Rhône. « On est en train de faire toutes les évaluations. (…) Ce que l’on sait de manière certaine, c’est que l’épisode a été dramatique. La situation est inédite, exceptionnelle, elle concerne à la fois la viticulture, à la fois l’arboriculture, à la fois les grandes cultures », a-t-il ajouté.

« C’est un phénomène national. On peut essayer de remonter dans l’histoire, il y a eu des épisodes en 1991, 1997, 2003 mais là, d’après moi, on dépasse tous les indicateurs qui laissent entendre que c’est beaucoup plus sérieux que les gels antérieurs », relève Jérôme Despey secrétaire général de la FNSEA et lui-même viticulteur dans l’Hérault. Les pertes ne sont pas encore chiffrées – les professionnels s’accordent à dire qu’il faudra attendre plusieurs jours – mais les premières constatations dessinent un phénomène d’ampleur.

Le gel a frappé des cultures – vignes et arbres fruitiers – dont la floraison était bien entamée, à la faveur des températures douces qui avaient précédé. Julien Denormandie a annoncé qu’il allait « lancer la mise en œuvre » du régime des calamités agricoles, notamment abondé par l’Etat, pour venir en aide à l’arboriculture. Il a par ailleurs rappelé que ce dispositif n’était pas appelé à intervenir dans les cas où une assurance peut être souscrite, comme pour les grandes cultures ou les vignobles. « Malheureusement trop peu d’hectares de vignes sont protégés. Sur 800 000 hectares en France seuls 200 000 sont assurés », dit à l’AFP Jérôme Despey, de la FNSEA.

Les céréales aussi

Dans ses vergers, Daniel Betton, arboriculteur dans la Drôme, inspecte ses abricotiers. « Tout les fruits ils ne paraissent pas, mais dès qu’on les ouvre, on voit que c’est nécrosé, les cellules ont éclaté, le fruit ne va pas grossir il va tomber », décrit-il à l’AFP, en prédisant que « la récolte est perdue pour cette année complètement ».

Dans les plaines, « on est très, très inquiet de l’impact du gel sur les céréales, sans pouvoir en tirer un bilan très fiable à l’heure qu’il est », a déclaré à l’AFP Eric Thirouin, président du syndicat des producteurs de blé AGPB. « On va être obligé d’attendre quelques jours pour voir si on a des cultures qui sont passées au travers et d’autres pas du tout, puisqu’on est à des stades assez différenciés d’une parcelle à l’autre », a-t-il poursuivi, résumant l’état d’esprit : « On est tendu et angoissé, on va attendre une huitaine de jours, peut-être un peu plus, pour en savoir plus. »

Pour Jérôme Despey, il est urgent que des mesures de prise en charge des cotisations sociales soient mises en œuvre par la Mutualité sociale agricole et que « nous puissions bénéficier de l’exonération de la taxe sur le foncier non bâti ».

« Il faut aussi que l’État s’engage à une réflexion sur le régime des calamités agricoles et de la gestion des risques et notamment de l’assurance pour permettre de mieux affronter ces risques, qui sont de plus en plus violents suite au changement climatique », a-t-il dit.