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Témoignages

L’agroforesterie, une agriculture écologique et créatrice d’emplois


AFP le 28/07/2021 à 09:50

« La meilleure école d'agroforesterie, c'est l'Afrique », Fabien Balaguer le directeur de l'Association française d'agroforesterie (Afa) accompagne les agriculteurs vers cette pratique qui met l'arbre au centre des cultures et incite à recréer des emplois sur les exploitations.

« Dans les années 60, on a construit une agriculture standardisée autours de monocultures », dit le jeune ingénieur agronome. Il explique que ce modèle a alors « rendu service » mais au prix fort, appauvrissant les sols et rendant les agriculteurs toujours plus dépendants des engrais chimiques et des produits phytosanitaires. Les arbres ont été éliminés, les terres remembrées et les sols laissés à nu après les moissons.

« Après la seconde guerre mondiale on avait 3 % de matière organique dans les sols, aujourd’hui l’on est à 1, 4%, on a perdu la moitié de stock, c’est-à-dire une grande partie de la fertilité. L’idée de l’agroforesterie c’est d’inverser cette tendance. » Fabien Balaguer explique qu’en réintégrant « l’arbre dans le système agricole on produit de la biodiversité » et ainsi on « reconstitue les sols ».

À contre-courant

La vingtaine d’agronomes et de techniciens de l’Association française d’agroforesterie, une structure basée au cœur du Gers à Auch, accompagne les projets partout en France. « À la Ferme en coton, sur quarante hectares il y a sept emplois », détaille Fabien Balaguer sur le chemin de cette ferme pilote. « Jusqu’à il y a peu, on considérait que le progrès c’était l’inverse (de la création d’emplois) », ajoute-t-il.

Nicolas Petit, lunette ronde, bermuda, casquette army et chaussure de marche, et son épouse Anne-Marie ont repris cette exploitation au début des années 2000, « pour créer un élevage de volailles »… mais pas que. Cet ancien directeur adjoint du magasin Printemps, à Poitiers, suit une formation agricole et le couple investit ses économies dans une ferme au bord de la faillite.

« Les arbres ont été plantés avant tout pour protéger les animaux du soleil, de la pluie et des rapaces », affirme le paysan. Les bienfaits de l’agroforesterie, les Petit les ont découverts « sur le tas » : « On est parti de la feuille blanche, il n’y avait plus d’arbre et dans les champs, la terre était ravinée à chaque pluie ».

Vingt ans plus tard, le néorural est fier du paysage qu’il a créé en plantant 10 000 arbres, « érables, frênes, néfliers, aubépines ». Un écosystème biologique, où les animaux et les plantes « coopèrent » qui est également « un écosystème économique ».

Recréer des écosystèmes

« On a mis 50 000 euros pour refaire notre fournil qui est exploité par Clément. C’est un paysan-boulanger, qui produit ses céréales, fabrique sa farine et confectionne des pains qu’il commercialise sur place avec l’aide de Kaena », détaille Nicolas Petit.

Outre ces deux emplois, il y a « Pauline et Victor qui font du maraîchage » à la ferme, et assistent Nicolas Petit pour certaines tâches. Enfin, une cinquième personne l’aide « pour les travaux mécaniques avec le vieux tracteur ». Quand à Anne-Marie Petit, elle fait « de la médiation animale » avec les poules, les cochons ou l’âne auprès « d’enfants ou d’adultes handicapés ».

Autre exemple, à une trentaine de kilomètres de là, sur moins de 5 hectares, Grégoire et Guillaume, deux jeunes maraîchers, ont réussi à tirer deux revenus de leur micro exploitation.

Il y a quatre ans, Grégoire termine sa formation d’ingénieur agronome par un stage à l’Afa après deux années de terrain au Brésil. Après cet expérience, il fait une rencontre déterminante : Guillaume, un jardinier, fils d’un agriculteur du village, avec qui il décide de s’associer pour faire « du maraîchage en plein champ ». « Le but c’était de recréer des écosystème champêtres », dit Grégoire au milieu des trames d’arbres qui organisent les rangs de légumineuses.

Eux aussi commercialisent directement leurs productions dans un espace de vente qu’ils ont créé. Ils y proposent aussi bières, miels, huiles, tisanes, plants et sont en train de développer une gamme de produits de « gemmothérapie », des huiles essentielles à bases de bourgeons. Les deux jeunes gens s’amusent du regard des anciens qui a radicalement changé en trois ans. « Au début, ils nous appelaient les « mawagits », les maladroits en patois local, maintenant ils nous achètent nos légumes… on a gardé ce nom pour notre exploitation. »