Accéder au contenu principal
Colloque « Objectif cultures propres »

Désherbage des céréales : un défi de plus en plus compliqué à gérer


TNC le 24/05/2023 à 05:03
fiches_Vulpin_403

Face aux adventices, il convient de combiner les leviers agronomiques car pris isolément, ils ne sont pas non plus 100 % efficaces. (©TNC)

Dans un contexte de restriction du recours aux produits phytos, la gestion des adventices est un défi de plus en plus difficile à gérer pour les agriculteurs. Les leviers agronomiques ont, bien sûr, leur rôle à jouer, mais il convient de les combiner pour montrer leur efficacité.

« Pour les exploitants agricoles, la gestion des adventices est le problème n°1, estime Diane Chavassieux, ingénieure régionale Bourgogne Franche-Comté chez Arvalis. « Nous l’avons constaté, ces dernières années, avec des parcelles de plus en plus sales même chez les agriculteurs très pointus techniquement. On ne peut pas encore parler d’impasse, mais le désherbage devient clairement plus compliqué à gérer, notamment quand cela s’inscrit dans un contexte de restriction du recours aux produits phytos ».

Une nuisibilité moyenne de 26 q/ha 

D’après les 63 essais en blé tendre de l’institut, l’experte fait état « d’une nuisibilité moyenne de 26 q/ha des adventices, principalement des graminées : ray-grass et vulpins. Cela reste variable, bien sûr, selon le degré de salissement de départ des parcelles. Mais il est à noter que 26 vulpins et/ou 25 ray-grass au m² peuvent suffire pour faire baisser le rendement de 5 % en céréales à paille ».

Attention, ces valeurs restent à considérer avec prudence. D’autres facteurs que la densité sont déterminants pour expliquer une plus ou moins grande nuisibilité des adventices (période de concurrence, répartition des plantes dans la parcelle, potentiel de la parcelle, climat de l’année…). 

C’est face à ces constats qu’a germé l’idée du colloque « Objectif cultures propres (OCP) »*, organisé par Arvalis Bourgogne Franche-Comté et la chambre d’agriculture de Côte-d’Or, et qui s’est déroulé le 11 mai dernier à Corcelles-lès-Cîteaux (Côte-d’Or). L’idée : « rassembler expertises et innovation pour une bonne gestion des adventices, au service des agriculteurs ».

Combiner les leviers

Sur le plan du désherbage chimique, « les stratégies d’automne deviennent la norme en céréales à paille depuis quelques années pour essayer de lever au plus tôt la nuisibilité des adventices et aussi, parce qu’il existe de moins de moins de familles de produits efficaces au printemps… », indique Diane Chavassieux. Néanmoins, « ces solutions d’automne n’obtiennent dans les meilleurs des cas que 80 à 90 % d’efficacité. Il est donc important de partir avec des parcelles les plus propres possibles au départ ». 

Et pour cela, les leviers agronomiques ont leur rôle à jouer. Il convient de « les combiner car pris isolément, ils ne sont pas non plus 100 % efficaces », précise également Jérôme Fabre, directeur régional Grand Est chez Arvalis. Parmi les leviers mis en avant lors du colloque, des classiques comme le travail du sol ou le décalage de la date de semis pour les parcelles les plus sales. « Un essai dans une parcelle de blé tendre en Bourgogne Franche-Comté compte, par exemple, 125 vulpins/m² pour un semis au 10 octobre et plutôt 30 vulpins/m² pour un semis 15 jours plus tard. Avec des automnes doux et un changement climatique plus prégnant, l’impact sur le rendement du décalage de la date de semis devient négligeable », ajoute Diane Chavassieux. 

Autre fondement de la lutte contre les mauvaises herbes à long terme : la rotation. « La diversité culturale permet, en effet, d’alterner les périodes et le type du travail du sol, les dates de semis, ainsi que les périodes d’application des herbicides et les familles employées.

Arvalis met, notamment, en avant une expérimentation longue durée réalisée sur la plateforme Artemis Fromenteau : « on constate une vraie amélioration de la densité de vulpins moyenne annuelle dans le cas de rotations plus diversifiées. C’est la rotation avec 2 cultures de printemps qui est la plus intéressante. La rotation de 4 ans avec une culture de printemps permet de diviser la pression par 3 par rapport à une rotation colza/blé ».

Retrouvez les résultats obtenus entre 2015 et 2020 ci-dessous : 

 (©Arvalis)

Désherbage mécanique et couverts à adapter

« Le désherbage mécanique se révèle également être un levier intéressant, mais qui reste très technique. Le nombre de jours disponibles est parfois réduit à l’automne, il y a toutefois la possibilité d’intervenir aussi en sortie d’hiver en complément des solutions chimiques. » À voir quel outil est le plus adapté en fonction des cultures et du contexte ? 

Outils recommandés en fonction des cultures pour un désherbage mécanique en ligne. (©Arvalis)

Aussi, les couverts d’interculture peuvent avoir un effet de compétition vis-à-vis des adventices à condition qu’ils s’installent rapidement et que leur biomasse soit suffisamment importante. D’autres facteurs vont également entrer en jeu pour la réussite de ce levier. 

L’institut technique nous rappelle les facteurs qui conditionnent le choix des espèces de couverts : 

(©Arvalis)

En parlant de couverts, Arvalis est également engagé dans le projet Casdar Graal, qui étudie la gestion d’un couvert permanent de légumineuse (luzerne) par fauchage en inter-rang d’une culture principale (blé). « Dans ce système testé en agriculture bio, la luzerne permet de couvrir le sol et d’apporter la nutrition azotée. La plante de service est conservée tant que les avantages attendus sont supérieurs aux inconvénients. » « Ce système est en cours de test, les résultats sont à suivre dans les années à venir, indique Diane Chavassieux. Quelques soucis de mise en pratique sont encore présents avec l’utilisation du GPS RTK. »

D’autres solutions ont été évoquées lors du colloque : le désherbage ciblé, l’écimage des adventices, ou encore le broyage des menues pailles…  En tout cas, quel que soit le levier envisagé dans la gestion des adventices, chacun dispose d’avantages et d’inconvénients. Les combiner permet d’optimiser leur efficience. 

* Les partenaires du colloque « Objectif cultures propres » : Terres Inovia Nord & Est, l’Alliance BFC (union des coopératives Dijon Céréales, Bourgogne du Sud et Terre Comtoise) et la chambre régionale d’Agriculture de Bourgogne Franche-Comté. La région Bourgogne Franche-Comté et l’Agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse ont apporté leur soutien financier à l’organisation.