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Filière semences

Après une année compliquée, Semae se mobilise pour maintenir la production


TNC le 13/12/2022 à 18:00
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La production de maïs semences a atteint, en 2022, à peine 70 % de l'objectif prévu. (©Adobe Stock)

Tensions géopolitiques, aléas climatiques, hausse des coûts de production... : Semae dresse le bilan d'une année compliquée. Dans ce contexte, l'interprofession des semences et plants se mobilise pour maintenir ses capacités de production et garantir la souveraineté alimentaire, tout en s'adaptant aux enjeux sociétaux.

« L’année 2022 a été compliquée pour la filière semencière », souligne François Desprez, président de Semae, lors de la conférence nationale annuelle de l’interprofession. « Les tensions géopolitiques, avec la guerre entre l’Ukraine et la Russie, ainsi que l’instabilité climatique ont notamment perturbé la filière », précise Pierre Pagès, vice-président de l’interprofession.

Entre la hausse des coûts de production (énergie, intrants…) et un été particulièrement sec et chaud, les résultats techniques ne sont pas au rendez-vous. L’exemple le plus flagrant concerne « la production de maïs semences qui atteint à peine 70 % de l’objectif prévu. Et ce n’est pas la seule filière touchée : – 17 % de production en betteraves, – 13 % pour le tournesol, – 10 % pour les fourragères, – 8 % pour les protéagineux… Seuls le lin et le soja ont vu leur production augmenter de façon significative en 2022 ». 

Assurer une relation de confiance entre agriculteurs multiplicateurs et établissements semenciers

Si le secteur demeure fort sur les exportations – rappelons que la France est le premier pays producteur européen et le premier exportateur de semences grandes cultures, avec un excédent commercial de 1,109 milliards d’euros – Pierre Pagès souligne « l’importance de soutenir la filière dans ce contexte perturbé, et qui pourrait subir encore une baisse de production. Tout commence par les semences, nous avons une position centrale, a-t-il assuré. Les semences doivent continuer d’assurer leur rôle pour la souveraineté alimentaire ». En 2022, Semae compte 17 300 agriculteurs multiplicateurs contre 19 500 en 2018, soit une diminution de 10 % en 5 ans. 

Pierre Pagès (à gauche) et François Desprez (à droite), respectivement vice-président et président de Semae. (©TNC)

François Desprez a alors rappelé, lors de la conférence, la mobilisation de l’interprofession tout au long de l’année pour soutenir les agriculteurs multiplicateurs et renforcer la cohésion au sein de la filière. Parmi les axes de travail, « l’appel pour une juste rémunération des agriculteurs multiplicateurs qui intègre les augmentations des coûts de production. La convention type et les annexes spécifiques ont aussi été revues en 2022 pour faciliter les relations dans une filière contractualisée. Soumise au vote des administrateurs, cette convention devra ensuite passer devant les pouvoirs publics, afin de donner un cadre contractuel pour la période 2023-2028 ». Le président de Semae a également annoncé « la mise en place d’un observatoire des prix. Objectif : avoir un indicateur par espèce ou famille d’espèces sur les prix payés par les établissements semenciers à leurs agriculteurs multiplicateurs. Ces indicateurs seront partagés par toutes les filières et permettront d’objectiver les discussions ». 

Autre action de l’interprofession : la création d’un cadre réglementaire pour la mise en place d’organisations de producteurs (OP) dans tout le secteur semences. Une réponse à la demande notamment des producteurs de maïs semences. Ce cadre devrait être validé par les pouvoirs publics au printemps prochain selon Pierre Pagès. « Nous avons un exemple de la réussite de ces OP dans le domaine des semences et plants, avec la filière plants de pommes de terre », précise François Desprez, qui vise à « conforter le réseau d’agriculteurs multiplicateurs de l’Hexagone dans un contexte de fort renouvellement générationnel. Restera alors aux producteurs de se saisir de cet outil dans les différentes filières ». 

Au-delà de la rémunération, « l’interprofession se mobilise également pour garantir la disponibilité des outils et moyens de production aux agriculteurs. Notamment en ce qui concerne les solutions de protection des cultures : Semae soutient un recours possible aux produits phytos en l’absence d’alternative, tout en restant force de proposition pour réduire leur usage. En lien avec la Fnams 1 et l’UFS 2, l’interprofession a tenu à sensibiliser le ministère de l’agriculture quant à la fragilité de certaines productions semencières dans des zones Natura 2000 par exemple, et aux besoins de solutions techniques ». La gestion de l’eau est également un point crucial. 

Maintenir la capacité de la création variétale

 En 2022, Semae a animé la concertation interprofessionnelle qui a abouti à la signature d’accord pour « le financement de la recherche par les plants de ferme de pommes de terre et par les semences de ferme de céréales. Un financement dont les obtenteurs concernés ne pourraient pas se passer », précise François Desprez.

L’interprofession soutient aussi « le renforcement des moyens de la recherche publique et privée dédiés à l’amélioration des plantes (Plan d’investissement avenir 4 et autres dispositifs…) ». 

« On est également très vigilants concernant le crédit d’impôt recherche (25 à 30 % du budget recherche des entreprises, dont les modalités sont rediscutées chaque année, ajoute François Desprez. On déplore, dans la nouvelle version, la suppression du doublement de l’assiette pour les travaux confiés à des instituts de recherche publics. On milite pour son retour afin d’encourager les partenariats publics/privés. Ils ont prouvé, par le passé, qu’ils étaient les plus fructueux », souligne le président de l’interprofession. 

Pour relever les défis du changement climatique et des transitions agroécologiques, Semae maintient son engagement en faveur de l’accès aux innovations : génétique, agronomique, robotique, numérique… « Les premiers mois de 2023 devraient notamment cristalliser le débat concernant les NGT (nouvelles techniques génomiques), indique François Desprez. […] On espère enfin avoir un cadre réglementaire pour avancer. Il faut toutefois veiller à ne pas exagérer les promesses de ces nouvelles variétés. Cela ne va pas créer une révolution variétale du jour au lendemain », estime le président de Semae.

L’interprofession poursuit aussi sa mobilisation sur la révision des directives de commercialisation des semences dans l’Union européenne. « Semae est un lieu de concertation au sein de la filière pour définir une position collective que nous allons porter auprès des pouvoirs publics. Notre position est extrêmement claire : nous restons attachés aux deux piliers de la réglementation semences : l’inscription au catalogue officiel des espèces et variétés, ainsi que le contrôle officiel et la certification de la qualité des semences. Cela fait consensus au sein de l’organisation professionnelle ». Semae précise aussi l’ouverture des marchés à la diversité avec des règles adaptées. 

1. Fnams : Fédération nationale des agriculteurs multiplicateurs de semences. 

2. UFS : Union française des semenciers.