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Aire paillée

Le miscanthus en litière : plus économe que la paille


TNC le 13/02/2023 à 05:02

Le miscanthus serait deux fois plus absorbant que la paille, à condition de l'ensiler bien éclaté car c'est le cœur spongieux des tiges qui détient ce pouvoir absorbant. (©TNC)

Avec un pouvoir absorbant deux fois plus important que la paille, le miscanthus séduit les éleveurs en manque de paille. D’ailleurs, les chiffres de la chambre d’agriculture de Normandie sont clairs : même achetée, la litière de miscanthus reste plus avantageuse que la paille.

Le miscanthus est une graminée très intéressante pour les éleveurs en stabulation libre qui ne sont pas autonomes en paille. En litière malaxée, ce matériau assure un bon confort de couchage et ses utilisateurs affirment même avoir moins de problèmes sanitaires qu’en aire paillée classique.

C’est quoi la litière malaxée ? Le principe est d’étaler la matière (miscanthus, copeaux, plaquettes de bois…) sur une couche de 25 à 30 cm puis de la brasser 1 à 2 fois par jour avec un outil à dent. De cette façon, pas de paillage quotidien ni de curage régulier : on vide le tout entre 3 et 8 mois selon les systèmes et la période d’utilisation (rappel : le curage doit être fait lorsque la litière atteint les 37°C).

Compter 7 ha de miscanthus pour 150 VL en litière malaxée.

Litière miscanthus ou paille : combien ça coûte ?

Implanter du miscanthus coûte cher, mais une fois en place, il est là pour longtemps (jusqu’à 20-25 ans, avec des rendements moyens de 11 t MS/ha dès la cinquième année). « Pour 150 vaches laitières en litière malaxée, il faut compter environ 7 ha de miscanthus, explique Camille Lecuyer, conseillère à la chambre d’agriculture de Normandie. En dédiant une partie de la surface au miscanthus, la marge par hectare diminuera certes un peu, mais par rapport à un achat de paille, c’est économiquement plus intéressant. » Suivant un réseau d’exploitations productrices de miscanthus, elle a pu établir un comparatif :

 Paille achetéeMiscanthus achetéMiscanthus produit sur 7 ha
Besoin litière par an
pour aire paillée de 1200 m2 – 150 VL – pâturage 150 j
255 t89 t
Prix de la litière (€/t brute livrée)85 €/t160 €/t56 €/t
Coût annuel d’achat de la litière21 700 €/an14 200 €/an5 000 €/an
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En litière malaxée de miscanthus, il faut prévoir un espace de stockage assez conséquent. (©TNC)

Par rapport à la paille, la litière miscanthus représente aussi un sacré gain de temps et de manutention (ensilage, stockage, brassage quotidien VS pressage, ramassage, stockage, paillage quotidien, curage hebdomadaire…), ce qui veut dire aussi moins de fioul dépensé. Mais contrairement à la paille qui peut être stockée en meule couverte dehors, le miscanthus devra être entreposé à l’intérieur et c’est un produit volumineux (1 t = 8 m3).

Acheter ou produire du miscanthus

Sur une ferme d’élevage, il n’y a pas beaucoup d’avantages à produire son propre miscanthus plutôt que de l’acheter. « En le produisant, il devient rentable au bout de 7 à 9 ans seulement si la surface implantée substitue de la surface fourragère », détaille la conseillère. « En grandes cultures, la rentabilité est estimée à 5 voire 7 ans. »

L’experte a détaillé le coût de production annuel pour 20 ans d’implantation (système sans chimie, rendement estimé à 11 t MS/ha et récolte à 85 % MS) :

Préparation du sol
(3x déchaumeur + labour + 2x herse rotative)
12,5 €/an
Implantation
(rhizomes + location planteuse + acheminement rhizomes + tracteur)
160 €/an
Désherbage mécanique8,5 €/an
Récolte ensileuse300 €/an
2 tracteurs benne à 50 €/h100 €/an
Stockage150 €/an
TOTAL

731 €/ha/an

= 66 €/t MS

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Les tiges de miscanthus peuvent atteindre jusqu’à 4 mètres de haut. (©TNC)

Un brassage quotidien

Camille Lecuyer accompagne les éleveurs normands qui se lancent. Elle témoigne : « C’est une litière souple et sèche, mais il faut que le bâtiment soit bien aéré pour favoriser le séchage, et qu’il soit mécanisable pour pouvoir y passer quotidiennement avec un outil. Dans un troupeau laitier, l’éleveur passe en général pendant la traite quand toutes les vaches ont quitté l’aire de couchage. En allaitant ou pour des génisses et taries, on peut coincer les animaux aux cornadis. »

« Le miscanthus peut être récolté dès sa deuxième année d’implantation. Il doit être coupé court (brins de 2 à 3 cm de long) en laissant l’éclateur pour atteindre le cœur spongieux des tiges car c’est là que se trouve le pouvoir absorbant de la plante. » Et très important : « il doit être ensilé bien mûr, à 80-85 % MS, sinon il chauffe. En général, les agriculteurs le récoltent en avril ou mai lorsque la tige se casse bien au pied et qu’on ne voit plus de vert sur la tige. »

Des valeurs fertilisantes peu connues pour l’instant

« Peu d’éleveurs analysent leurs effluents, déplore Camille Lecuyer. On manque de données précises sur les valeurs d’un fumier de miscanthus, mais on sait qu’il est à peu près semblable au fumier pailleux en P et K mais supérieur sur l’azote. » Heureusement car le volume du fumier est considérablement réduit (on a 1 m 3 de litière malaxée pour 8 m 3 de litière paillée).
« Le rapport C/N est supérieur donc c’est un fumier qui mettra plus de temps à se dégrader. » Difficile donc d’imaginer l’incorporer en méthanisation, le pouvoir méthanogène sera forcément moins important qu’un fumier d’aire paillée classique.