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Exportations de céréales

Vers un record absolu d’exports de blé français vers les pays tiers


TNC le 16/04/2020 à 06:02
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Au 12 avril, la France a déjà expédié 9,1 Mt vers les pays tiers, d'après les chiffres de la Commission européenne. (©Pixabay)

Les exportations de blé tendre français devraient atteindre le niveau record de 13,2 Mt, d'après FranceAgriMer. Mais si les exports progressent vers les pays tiers, la demande du nord de l'Europe s'affiche en repli, tout comme les utilisations intérieures. Quant à la logistique, elle s'est montrée réactive et adaptable, mais le surcoût sur le transport par camion pose problème.

Une fois de plus, FranceAgriMer a revu à la hausse ses perspectives d’exports du blé français vers les pays tiers. Mais cette fois, l’augmentation est particulièrement importante : + 500 000 t d’un mois sur l’autre. Ce qui porte le total à 13,2 Mt, contre 12,7 Mt estimées le mois dernier. Un record historique !

Derrière cette forte hausse, se cache d’une part « une position très conservatrice de FranceAgriMer sur les exports pays tiers le mois dernier. Je sais que je vous le répète tous les mois depuis le début de la campagne », s’est amusée Marion Duval, adjointe au chef de l’unité grains et sucre de FranceAgriMer. Par ailleurs, cette révision prend également en compte « le flux assez extraordinaire de blé tendre français vers la Chine durant la campagne actuelle, avec près de 314 000 t expédiées au mois de mars ».  Depuis le début de la campagne, ce sont pas moins de 697 226 t de blé français qui ont été envoyées vers l’empire du Milieu, contre 130 563 t l’an dernier, à date. Ajouté à cela les chargements jusqu’au 10 avril, et le flux monte à 1,14 Mt.

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La demande est également forte du côté du Maroc. Le pays n’ayant « pas eu les pluies nécessaires pour restaurer tout le potentiel de ses cultures, est fortement aux achats en ce moment et vient s’approvisionner en grande partie en France », explique Marion Duval.

Alors que les exportations françaises de blé étaient les plus fortes en mars et avril au cours de la campagne précédente, elles seront bien plus faibles cette année. (©FranceAgriMer)

Mais si les exports vers pays tiers augmentent nettement, ceux vers l’Union européenne sont en recul, conséquence d’une baisse de la demande en provenance du nord de l’Europe. « Les difficultés qui sont rencontrées dans nos éthanoleries sont également rencontrées chez nos voisins européens, d’où une moindre demande sur du blé tendre destiné à ce débouché. » Mais la demande des fabricants d’aliments du bétail (Fab) diminue également, « du fait de la moindre compétitivité du blé tendre face au maïs ». 

Par ailleurs, les opérateurs redoutent un possible retour des basses eaux sur le Rhin, compte tenu des conditions climatiques actuelles, ce qui pourrait poser problème à la circulation des péniches et impacter les flux. « Cette baisse de 335 000 t sur les exports UE prend donc en compte tous ces éléments. »

Une demande nord communautaire en repli

Du côté de la demande, FranceAgriMer a également procédé à quelques ajustements. En ce qui concerne les Fab, « il n’y aura pas de mise en œuvre additionnelle liée à l’épidémie de Covid-19, malgré un ralentissement des abattages et des animaux qui restent plus longtemps en place dans les élevages », indique Marion Duval. « C’est essentiellement dû au fait qu’il y ait une mise à l’herbe en ce moment », réduisant mécaniquement la demande en alimentation animale. « Il y a un espacement des mises en place notamment des poussins dans les élevages de volailles, et également des mesures pour des AOP et des AOC de demandes de limitation de la production ce qui a aussi réduit la demande en aliments. »

Quant à la meunerie, elle a été fortement challengée sur la première semaine de confinement, mais aussi au cours de la deuxième, dans une plus faible mesure. La demande a été très forte, tout comme l’activité des moulins, avant de diminuer au cours des semaines suivantes, du fait d’une « crise du débouché ». La boulangerie artisanale est celle qui est le plus touché, estime Marion Duval, mais également la boulangerie industrielle. « On a moins de vente en boulangerie, on a une consommation notamment de sandwich qui s’effondre, donc un secteur de la meunerie qui est fortement impacté sur ces segments de consommation. » Ce qui a conduit FranceAgriMer à diminuer de 200 000 t les mises en œuvre en meuneries, qui se répartissent à 150 000 t sur la panification et 50 000 t sur la biscuiterie et pâtisserie industrielle.

Pour l’amidonnerie, Marion Duval explique ne pas avoir eu d’alerte particulière de la filière, d’où un maintien du volume d’un mois sur l’autre.

Concernant le débouché alcool, la crise du débouché des biocarburants, du fait d’une moindre consommation suite au confinement, a conduit à des changements. Si l’alcool est utilisé en France, « chez nos voisins européens, on exporte aussi sous plusieurs formes de l’alcool. » Le poste a ainsi été estimé en diminution de 150 000 t.

Finalement, la baisse de la consommation intérieure française et européenne, couplée à une hausse des exportations en valeur absolue (somme pays tiers et UE), donne un stock de fin de campagne qui est estimé en progression de 164 000 t, c’est-à-dire à 2,61 Mt.

La logistique sous contrôle

Depuis le début du confinement, des craintes sont apparues au sujet de la capacité de la logistique à faire face à la crise. D’après Marion Duval, « il y a eu une forte mobilisation de l’interprofession pour anticiper les difficultés et agir là où les choses pouvaient être faites pour fluidifier des flux ». Du côté du transport fluvial, le volume horaire réduit des écluses, n’aurait eu qu’un « impact très marginal sur les flux de grains ». Sur le fret ferroviaire, aujourd’hui la situation est sous contrôle, pour l’essentiel. « On note quand même des opérateurs qui remontent des difficultés sur l’approvisionnement des portes de la façade atlantique et également des difficultés d’approvisionnement sur les Fab, notamment bretons, pour du maïs qui est disponible dans la vallée du Rhône ».

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Quant au fret camion, il doit faire face à une demande plus forte, avec « un report vers le camion là où les segments logistiques habituels sont impactés », le tout avec un nombre réduit de chauffeurs disponibles. Mais « la grosse problématique, c’est le retour à vide des camions qui engendre un renchérissement du coût du fret ». Ce sont les opérateurs de la filière qui prennent à leur charge ce surcoût pour honorer les contrats déjà signés. Toutefois, une future reprise des chantiers BTP et des carrières pourrait apporter une solution à ce problème, bien que cela ne soit pas encore d’actualité. Ce retour à vide « reste donc actuellement un souci de la filière ».

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