Accéder au contenu principal
Semaine cruciale pour le Brexit

Quel que soit le scénario, les agriculteurs français y perdront


TNC le 15/01/2019 à 18:10
fiches_Brexit

Ce mardi 15 janvier 2019, les députés britanniques doivent approuver, ou non, l’accord négocié par Theresa May à Bruxelles en vue du Brexit toujours prévu le 29 mars prochain. Quoi qu’il en soit, le Brexit aura des conséquences négatives sur l’agriculture européenne et française. Outre la baisse des aides Pac, y compris pour les producteurs français, il rendra les échanges commerciaux entre l’UE et le Royaume-Uni plus contraignants.

Le 29 mars prochain, le Royaume-Uni est censé quitter l’Union européenne, près de trois ans après le référendum donnant la faveur au Brexit. À moins que ce Brexit tant redouté par la plupart des acteurs économiques ne soit reporté de trois mois. C’est en effet l’un des quatre scénarios qui pourrait se confirmer à l’issue du vote, ce mardi 15 janvier 2019 dans la soirée, des députés britanniques pour approuver, ou non, l’accord négocié par Theresa May et Michel Barnier à Bruxelles. Ceci dit, il devra être effectif le 30 juin au plus tard, date à laquelle le nouveau Parlement européen sera constitué.

Qu’il soit reporté d’un trimestre ou non, et qu’il se fasse dans le cadre d’un accord négocié ou d’un « no deal », la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne ne sera pas sans conséquences pour l’agriculture européenne et française.

Des aides Pac en forte baisse

Pour les agriculteurs britanniques mais aussi français, le Brexit, avec ou sans accord, aura des conséquences sur le niveau des aides de la Pac. Selon le think tank Farm Europe, le Brexit engendrera une baisse des aides Pac pour les agriculteurs français entre 2,4 % et 9,1 % en fonction de la teneur de l’accord ou de son absence. Et en fonction de l’affectation de la baisse des aides sur l’un ou l’autre des piliers de la Pac, le revenu des agriculteurs français sera impacté négativement de 1,4 à  5,1 %.

Selon le think tank, le coût réel net du départ britannique de l’UE s’établirait à 2,7 Mds€ par an en euros constants, soit 5 % du budget de la Pac. Mais ce coût pourrait grimper à 6,5 % du budget européen consacré à l’agriculture si l’intégralité de cette baisse était affectée au 1er pilier (aides directes).

Un « no deal » synonyme de baisse des échanges entre la France et le Royaume-Uni

Parmi les hypothèses actuellement sur la table à moins de trois mois de l’échéance, le « no deal » n’est toujours pas exclu. Et ce scénario serait le pire pour les échanges entre la France et le Royaume-Uni. Ces échanges seraient régis par les tarifs douaniers de l’Organisation mondiale du commerce. Selon une étude du Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII), les barrières tarifaires et non tarifaires sur le montant des produits agricoles échangés pourraient ainsi s’élever à 64 %, au lieu de 26 % en moyenne actuellement.

Indéniablement, ces nouvelles barrières douanières engendreraient une baisse importante des échanges entre les deux pays. Dans les secteurs des produits laitiers, de la viande rouge, de la viande blanche ou encore du sucre, certains économistes évoquent une réduction des exports mutuels de plus de 90 %.

Selon le Copa-Cogeca, « la sortie du Royaume-Uni de l’UE sans un accord entraînera inévitablement des perturbations et des pertes pour l’ensemble de la chaîne agroalimentaire. Procédures fastidieuses, contrôles officiels renforcés des marchandises, mesures sanitaires et phytosanitaires alourdies, inspections, certificats vétérinaires et tarifs d’importation entraîneront des retards accrus pour les contrôles aux frontières et augmenteront les coûts pour les deux côtés. »

Vers des marchés agricoles déséquilibrés

Sur le marché de la viande bovine, ce n’est pas tant une baisse des exportations françaises vers les assiettes anglaises qui est à craindre, mais le déséquilibre qu’engendrerait une baisse des exportations irlandaises vers leurs voisins anglais. La France n’a exporté que 8,6 M€ de viande bovine outre-Manche en 2017, et l’Irlande une valeur de 784 M€.

En considérant que l’Irlande soit contrainte de trouver de nouveaux débouchés pour près de la moitié des environ 180 000 t que le pays expédie chaque année vers le Royaume-uni, ce volume serait supérieur au contingent d’importation européen négocié avec le Canada dans le cadre du Ceta, accord vivement contesté par les producteurs de viande bovine. Autrement dit, le Brexit constituerait une menace plus importante que le Ceta.

Un Brexit sans accord pourrait aussi déséquilibrer le marché des produits laitiers. En 2017, la France a fourni le Royaume-Uni en produits laitiers pour une valeur de 678,4 M€, contre 173 M€ dans le sens inverse.

L’impact sur le marché des céréales serait moindre, même si le Royaume-Uni constitue le sixième débouché européen pour les céréales françaises. « Le Royaume-Uni importe principalement du maïs et s’approvisionne surtout en France », rappelait Franceagrimer. La principale menace du Brexit serait que des grains en provenance des pays tiers puissent entrer plus facilement en Europe via notre voisin d’outre-Manche.