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Livraisons de sorbitol

Plainte au parquet antiterroriste contre le sucrier français Tereos


AFP le 20/03/2019 à 11:04

Plusieurs partenaires du leader français du sucre Tereos ont déposé plainte mardi, accusant le groupe d'avoir maintenu des livraisons en Syrie de sorbitol, un ingrédient utilisé dans la fabrication d'armes et retrouvé dans des caves du groupe État islamique, a appris l'AFP auprès de son avocate.

Cette plainte contre X a été déposée pour « actes de terrorisme et de complicité d’actes de terrorisme » auprès du parquet antiterroriste du tribunal de grande instance de Paris. Dans ce document consulté par l’AFP, les plaignants rappellent que fin 2016, après la libération de Mossoul en Irak, l’ONG Conflict Armament Research (CAR), mandatée par l’Union Européenne, inspecte « un entrepôt de l’État islamique » et y découvre « des dizaines de sacs de sorbitol estampillés Tereos ». Or, ce dérivé du sucre est utilisé comme propulseur d’engins explosifs lorsqu’il est mélangé à du nitrate de potassium. Alerté par l’ONG, le groupe admet, au terme de vérifications, que ce produit provient bien de ses usines picardes : en mai 2015, une cargaison de 45 tonnes de sorbitol avait été livrée en Turquie avant de disparaître et d’être retrouvée un an plus tard en Syrie, « dans les caves de Daesh » (nom arabe du groupe EI). En décembre 2017, l’information ayant été rendue publique, le leader du sucre a assuré « avoir suspendu ses livraisons de sorbitol dans les zones dites à risques » après l’alerte effectuée par CAR en novembre 2016.

Toutefois, selon les plaignants, qui se basent sur une enquête interne de l’entreprise, deux autres livraisons à destination de la Syrie ont été réalisées en février et juillet 2017. « Dans ce contexte, et en dépit de la connaissance par l’entreprise Tereos de l’utilisation du sorbitol comme arme de guerre, la société a sciemment continué de fournir cette matière première à un groupe terroriste », affirment les plaignants. « Mes clients ont été abasourdis par ces révélations. C’est un choc et une trahison alors que Tereos est un fleuron de notre économie agricole », a réagi Me Jade Dousselin dans un communiqué, appelant à faire la « lumière sur ces exactions qui sont l’œuvre des dirigeants de la société et qui viennent salir l’image de marque » de l’agriculture française. « Nos ventes en Syrie étaient légales (…) Nous y avons mis un terme, lorsque nous avons découvert que le produit était détourné », a réagi mardi la direction du groupe auprès de l’AFP, dénonçant une « tentative de déstabilisation ». Les plaignants et la direction du groupe s’opposent depuis fin 2016 dans une crise interne au conseil de surveillance de Tereos, sur fond d’effondrement des cours mondiaux.