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Réglementation européenne

Phytos : des fabricants n’ont pas transmis à l’UE des études sur leur toxicité


AFP le 01/06/2023 à 18:29

Plusieurs grands fabricants de pesticides, dont Bayer et Syngenta, n'ont pas remis aux autorités sanitaires européennes des études sur la toxicité de leurs produits pour le cerveau, ont rapporté jeudi des chercheurs, les entreprises concernées assurant avoir respecté leurs obligations réglementaires.

Cette attitude semble être un « phénomène récurrent » et remet en cause le sérieux de l’évaluation par l’Union européenne (UE) des risques sanitaires associés aux pesticides, selon une étude publiée dans la revue Environmental Health.

Les auteurs, les chercheurs suédois Axel Mie et Christina Ruden, se sont penchés sur les études menées par les fabricants de produits phytosanitaires pour évaluer leurs risques en matière de développement du cerveau. Ces tests, réalisés en exposant des souris enceintes puis en étudiant leurs petits, font partie des données remises aux autorités sanitaires pour qu’elles décident de les approuver ou non.

« Nous avons regardé si les études remises à l’agence américaine de protection de l’environnement (EPA) ont aussi été communiquées aux autorités de l’Union européenne (UE) », explique l’étude. Or, sur 35 études réalisées de 1993 à 2015, neuf ont été remises aux États-Unis mais pas dans l’UE. Chacune concernait un pesticide différent et certaines ont mis en avant des problèmes de développement chez les animaux testés, comme une puberté tardive.

Interrogés par l’AFP, Bayer et Syngenta n’ont pas démenti que certaines études n’avaient pas été remises à l’UE, mais ont assuré que ce choix n’enfreignait pas leurs obligations en matière d’informations à donner aux autorités. Bayer, notamment, a justifié son choix par des différences de réglementations entre les États-Unis et l’UE, assurant que les études en question « n’auraient pas changé l’évaluation » des autorités européennes.

Pour autant, à l’heure actuelle, sur les neuf pesticides évoqués par l’étude, la plupart ont soit été finalement retirés du marché par les autorités sanitaires de l’UE, soit sont à nouveau examinés par celles-ci. L’une d’elles, l’Efsa, a notamment souligné auprès de l’AFP que ses règles s’étaient durcies en 2021 et exigeaient désormais des entreprises de communiquer « toutes les études » en matière de risques sanitaires.

Mais ce cadre réglementaire reste insuffisant pour Axel Mie et Christina Ruden, selon lesquels ce sont les autorités sanitaires qui devraient être chargées de mener ces études et non les entreprises. Sans même aller jusque-là, il serait « à portée de main » pour les autorités européennes de demander à partager les données de leurs homologues américaines ou d’autres pays, estime auprès de l’AFP Christina Ruden.