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Pac et Green Deal

L’eurodéputé B. Biteau veut aller plus loin dans la réduction des pesticides


TNC le 29/06/2020 à 16:38
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Pour le député européen Benoît Biteau (EELV), les objectifs de la stratégie "Farm to Fork" sont insuffisants pour protéger la biodiversité. (©TNC)

Dans le cadre du Green Deal, la Commission européenne a dévoilé mi-mai ses stratégies Biodiversité et de la Ferme à l’assiette, deux stratégies dont les ambitions respectives ne semblent pas compatibles, estime le député européen Benoît Biteau (EELV), qui défend une suppression totale des pesticides et des engrais de synthèse et milite pour une Pac qui accompagne davantage les transitions.

« Les ambitions portées par les stratégies Farm to fork (de la fourche à la fourchette) et Biodiversité ne sont pas toujours en conformité », a expliqué le député européen Benoît Biteau (EELV), lors d’une visioconférence avec les journalistes de l’Afja, le 26 juin. « La réduction de 50 % des pesticides et des engrais de synthèse sont des objectifs parfaitement atteignables sans impacter la productivité agricole, mais qui ne suffisent pas à enrayer la disparition des oiseaux et insectes », estime l’élu, agriculteur en Charente-Maritime depuis 14 ans. Ils ne permettent pas non plus de réaliser les objectifs de la stratégie Biodiversité, pourtant proposée par la même Commission européenne.

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Pour Benoît Biteau, réduire la dose ne résout pas les problèmes en matière de biodiversité. « C’est très réducteur de cantonner la problématique des pesticides à un problème de santé publique, il faut que l’on convoque une approche globale », incluant les effets sur le climat et sur l’environnement, ajoute-t-il. « On ne doit pas continuer sur des voies qui menacent les générations futures, et c’est d’autant plus vrai que l’on a des études qui montrent que c’est possible », insiste l’agriculteur.

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L’agro-écologie, un élément de compétitivité

Producteur en agro-écologie, l’homme est « favorable à une suppression totale » des pesticides, s’appuyant sur sa propre expérience ainsi que sur les études « qui montrent que quand on retient des solutions agro-écologiques, on peut s’affranchir des phytos et des engrais de synthèse ». « Je n’ai même pas le Certiphyto, car je n’utilise aucun produit même bio », ajoute-t-il.

Pour lui, le débat sur la productivité est un faux débat. « La raison pour laquelle on continue de dire que les productions en agriculture biologique sont moins productives, c’est parce qu’on veut entrer au chausse-pied les pratiques de l’agriculture conventionnelle dans l’agriculture biologique », souligne-t-il, fustigeant « la comparaison technique, qui consiste à vouloir comparer comment se comporte, avec l’agriculture biologique, un blé issu du catalogue officiel et conçu pour être utilisé avec des pesticides et des engrais : évidemment, en bio, il va faire 50 % de sa productivité ». Avec l’agro-écologie, « on n’est plus sur des logiques où l’on se contente de supprimer les engrais et les pesticides pour avoir les certifications sans rien changer d’autre par ailleurs », c’est tout un système de production à mettre en place, témoigne-t-il, fort de son expérience. Il y a 14 ans, Benoît Biteau a repris l’exploitation familiale, en monoculture de maïs, pour y développer des pratiques agro-écologiques, et y cultive désormais 17 à 18 espèces de grandes cultures destinées à l’alimentation humaine, en intégrant dans son système l’agroforesterie et l’élevage.

Mobiliser davantage la Pac pour cette transition

Pour financer la transition agricole, Benoît Biteau milite pour une rémunération des services environnementaux rendus par les agriculteurs. « Les produits de l’agriculture conventionnelle, que l’on dit pas chers, sont en fait très chers quand on y adosse les coûts externalisés et les solutions curatives engagées avec de l’argent public (ndlr : coûts entraînés par exemple pour protection de l’eau ou de l’air). Il faut mettre sur la table tout l’argent public dont on dispose pour accompagner la transition de l’agriculture, et avec des solutions comme ça, on vient au secours de ces agriculteurs qui n’ont que 350 euros par mois pour vivre », développe-t-il, en s’opposant aux affirmations de la présidente de la FNSEA : « c’est justement quand on est dans le rouge qu’il faut aller dans le vert, pour sortir définitivement du rouge, contrairement à ce que dit Mme Lambert ! »

Si les Ecoschemes avaient pour principe initial de contribuer davantage au verdissement de l’agriculture, pour l’eurodéputé, il ne s’agit que « de la validation des pratiques déjà en place, c’est un habillage qui va servir la communication et non pas les agriculteurs ».

Enfin, si l’augmentation du budget Pac récemment proposée va dans le bon sens, il faut selon lui « changer le cœur du réacteur », à savoir passer d’un principe de distribution des aides à l’hectare à un principe d’aides à l’actif, notamment pour favoriser les installations.

Retrouvez nos articles suite aux rencontres précédentes organisées par l’Afja avec des députés européens spécialistes des problématiques agricoles :
– Irène Tolleret (LReM) : le Covid, un crash test pour l’agriculture européenne ?
– Anne Sander (LR) : Covid-19 et agriculture – « Il faut un grand plan de financement pour 2021 »