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Crise du bio

L’État débloque une « enveloppe de crise » de 60 millions d’euros


AFP le 17/05/2023 à 15:07
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3 380 sorties du bio ont été dénombrées, contre 2 510 en 2021. (©S. Leitenberger)

Une consommation en déclin, des agriculteurs qui jettent l'éponge, d'autres découragés de se lancer : pour aider les producteurs bio à surmonter les difficultés, le ministre de l'agriculture a annoncé mercredi une « enveloppe de crise » de 60 millions d'euros, accompagnée de mesures pour stimuler la demande.

Depuis une ferme de l’Oise, Marc Fesneau a annoncé une « enveloppe de crise » de 60 millions d’euros pour répondre à la crise de laproduction biologique.

Une première « aide d’urgence » aux agriculteurs bio, de 10 M€, avait été actée au Salon de l’agriculture, fin février. La somme, présentée par la Première ministre Elisabeth Borne aux professionnels agricoles lors d’une session à huis clos, avait été jugée « anecdotique » voire « méprisante » par des organisations. À peine élu président du syndicat agricole majoritaire FNSEA, Arnaud Rousseau a réclamé mi-avril un « plan massif », de « 50 à 100 millions d’euros », pour les producteurs bio qui « traversent une crise sans précédent ».

« Les besoins sont évalués à 151 millions d’euros pour 2022, avec un risque d’aggravation en 2023 », indiquait lundi dans un communiqué la Fédération nationale d’agriculture biologique (Fnab). L’organisation plaide aussi pour un soutien pérenne et demande de rehausser les aides attribuées aux producteurs bio via la politique agricole commune (Pac).

La Cour des comptes avait estimé en juin 2022 que « la politique de soutien à l’agriculture biologique menée par le ministère de l’agriculture port(ait) des objectifs ambitieux, sans allocation de moyens suffisants ».

« Redonner de l’espoir aux agriculteurs »

Le ministre de l’agriculture s’est aussi engagé à ce que les cantines de l’Etat (ministères, prisons ou armées) se mettent en conformité avec l’ objectif de 20 % de produits bio à leur menu d’ici la fin de l’année. « On va commencer par donner l’exemple nous-mêmes », a-t-il déclaré à la presse.

« Ce serait notre échec collectif si on perdait des producteurs » bio, a souligné M. Fesneau, estimant que ce plan était « de nature à redonner de l’espoir aux agriculteurs » qui s’engagent dans ce mode de production.

Le ministère de l’qgriculture a estimé mercredi que la commande publique pour les cantines de l’Etat représenterait un soutien supplémentaire « d’environ 120 millions d’euros ».

Afin de garantir un débouché régulier aux aliments bio, la loi Alimentation (ou Egalim, 2018) avait fixé pour 2022 cet objectif minimum de 20 % de bio dans la restauration collective (cantines scolaires ou hôpitaux). Mais « on n’a pas mis les moyens » financiers pour le faire, a reconnu une source au ministère de l’agriculture. La part du bio plafonne ainsi autour de 6 %.

« On est encore loin des 20 % mais certains exemples comme la ville de Bègles (70 % de bio), 44 000 habitants, ou d’Epinal (68 % de bio), 33 000 habitants, démontrent qu’il est possible d’atteindre l’objectif et de le dépasser très largement », avait expliqué mardi à l’AFP Laure Verdeau, directrice de l’Agence bio, chargée de développer et promouvoir l’agriculture biologique française.

En 2022, 3 380 agriculteurs ont quitté la filière bio

Outre les 20 % de bio dans les cantines, la France n’a pas non plus atteint son objectif de 15 % de surfaces agricoles utiles (SAU) en bio en 2022 (10 % actuellement). Le nouvel objectif officiel (18 % des surfaces en bio en 2027), semble déjà compromis : la croissance du nombre de nouveaux producteurs bio a ralenti.

En 2022, 5 245 nouveaux producteurs bio ont été recensés, contre 7 706 en 2021, selon l’Agence bio. En parallèle, 3 380 sorties du bio ont été dénombrées, contre 2 510 en 2021. Le solde entre les entrants et les sortants « reste encore positif mais traduit un réel coup de frein dans la dynamique des conversions », relevait l’agence en avril.

Elle regrettait que « bien trop souvent les producteurs voulant passer à l’agriculture biologique en 2022 se sont retrouvés freinés par les acteurs du marché arguant que le marché n’était plus là pour les accueillir, faute de demande des consommateurs ».

3 M€ pour faire la promo du bio

Par ailleurs, un nouveau plan de communication « massif » sur la consommation des produits biologiques sera lancé, financé par trois millions d’euros du vaste programme d’investissement France 2030 annoncé en octobre 2021 par Emmanuel Macron.

Le marché du bio a commencé à se retourner en 2021 après des années de croissance à deux chiffres, qui avaient dopé les conversions vers cette agriculture sans pesticides ni engrais issus de la chimie de synthèse. Mais les consommateurs, essorés par l’inflation (+ 15 % sur un an en avril pour l’alimentation), s’en détournent au profit d’alternatives moins chères.

L’an dernier, les ventes de produits bio ont reculé de plus de 7 % dans les supermarchés, selon le panéliste NielsenIQ, et l’offre dépasse désormais la demande.