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Dégâts de sangliers aux récoltes

Les chasseurs doivent continuer d’indemniser les agriculteurs


AFP le 20/01/2022 à 18:35
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La population de sangliers est en forte augmentation ces dernières années. (©Pixabay)

Les chasseurs devront continuer à indemniser les agriculteurs pour les dégâts aux récoltes causés par le gibier, a tranché jeudi le Conseil Constitutionnel, une disposition qui était contestée par la Fédération nationale des chasseurs (FNC). [Article mis à jour le 21/01/2022 à 10h31]

La FNC avait saisi le Conseil d’État pour contester le système d’indemnisation des dégâts de grand gibier (sanglier, cerf et chevreuil). Le Conseil d’État avait renvoyé la question devant le Conseil constitutionnel pour voir si les dispositions législatives contestées étaient contraires ou non aux droits et libertés garantis par la Constitution.

Actuellement, ces dégâts sont payés aux agriculteurs par les fédérations départementales de chasse, à partir d’un certain seuil et suivant un barème.

La FNC reproche « à ces dispositions de méconnaître le principe d’égalité devant les charges publiques, au motif qu’elles font peser sur les seules fédérations départementales des chasseurs la charge de l’indemnisation des dégâts de grand gibier, alors que son montant a augmenté en raison de la prolifération de certaines espèces », rappelle le Conseil Constitutionnel dans sa décision. « Pour les mêmes motifs, il en résulterait également une méconnaissance du droit de propriété », précise-t-il.

Les fédérations départementales des chasseurs sont chargées d’élaborer les plans de chasse et de gestion d’espèces d’animaux sauvages, rappelle le Conseil Constitutionnel. « Ainsi, la prise en charge par ces fédérations de l’indemnisation des dégâts causés par le grand gibier est directement liée aux missions de service public qui leurs sont confiées », fait-il valoir.

De plus, cette indemnisation n’intervient qu’à partir d’un seuil minimal et peut être réduite dans certains cas, indique le Conseil Constitutionnel.

Il en résulte que « compte tenu de la charge financière que représente en l’état l’indemnisation des dégâts causés par le grand gibier, les dispositions contestées n’entraînent pas de rupture caractérisée de l’égalité devant les charges publiques » et qu’elles « doivent être déclarées conformes à la Constitution », conclut le Conseil.

La FNC « prend acte » de cette décision, a indiqué à l’AFP son président Willy Schraen, tout en relevant qu’une « porte est ouverte » par le Conseil Constitutionnel si le montant des indemnisations devait encore augmenter.

Une multiplication des populations de sangliers

Pour 2019, l’indemnisation de ces dégâts « a représenté un budget de 77,3 millions d’euros » dont 46 millions pour l’indemnisation directe des agriculteurs, 25,3 millions pour instruire les dossiers et 6 millions pour des actions de prévention, indiquait avant la décision à l’AFP Nicolas Rivet, directeur général de la FNC. « Les chasseurs ne sont plus en état d’indemniser seuls », selon lui. « Nous ne sommes pas loin d’une banqueroute généralisée », a avertit Willy Schraen, qui va « continuer à discuter avec l’État et les partenaires agricoles d’une réécriture de la loi ».

« Les agriculteurs doivent être indemnisés à 100 % », disait pour sa part Florent Leprêtre, en charge de cette question à la FNSEA.

La population de sangliers s’est multipliée en France au cours des dernières décennies, aidée par des hivers plus doux, l’absence de prédateurs naturels et une chasse qui s’est faite pendant longtemps « de façon à (…) assurer la préservation voire le développement » des animaux, selon un rapport parlementaire paru en 2019.

S’en est suivie une augmentation des dégâts agricoles, en particulier sur le maïs, le blé tendre et les prairies, au point que Christiane Lambert, présidente du premier syndicat agricole, la FNSEA, avait reproché publiquement en 2018 aux chasseurs de ne pas en faire assez.

« Les chasseurs se comportent en pompiers pyromanes », a critiqué pour sa part Allain Bougrain Dubourg, président de la Ligue de protection des oiseaux (LPO), faisant valoir que les chasseurs ont longtemps pratiqué « des lâchers d’animaux d’élevage » et du « nourrissage tout au long de l’année dans certaines régions » des sangliers.