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[Carte interactive] Transmission

La France peut-elle s’inspirer de ce qu’il se fait ailleurs en Europe ?


TNC le 30/01/2019 à 06:27
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En Europe, la cession des fermes s'effectue principalement à titre gracieux et dans le cadre familial. (©Creativa Images, Fotolia)

Les chiffres parlent d'eux-mêmes : entre 2005 et 2013, le nombre de chefs d'exploitations d'élevage de moins de 35 ans a diminué de 35 % en moyenne sur plusieurs pays européens quand celui des plus de 65 ans a augmenté de 14 %. Ainsi, le renouvellement des générations d'agriculteurs n'est pas un enjeu qu'en France. Que font nos voisins pour favoriser la transmission des fermes et l'installation des jeunes ? Y a-t-il des dispositifs intéressants transposables en France ? Pour le savoir, l'Institut de l'élevage idele a réalisé des enquêtes en Allemagne, Royaume-Uni, Irlande, Finlande, Pays-Bas, Danemark, Belgique et Espagne.

Le renouvellement des générations d’agriculteurs, donc la transmission des fermes, est une problématique commune en Europe, notamment en productions animales. En 2013 en effet, sur neuf pays (France, Allemagne, Royaume-Uni, Irlande, Finlande, Pays-Bas, Danemark, Belgique et Espagne), 70 000 élevages environ avaient un chef d’exploitation de moins de 35 ans, contre 130 000 huit ans auparavant, soit une baisse de 35 %.

Et dans près de 200 000 structures, l’âge de celui-ci dépassait 65 ans, contre 170 000 en 2005, d’où une hausse de 14 % (source des chiffres : dossiers de l’économie de l’élevage de l’Institut de l’élevage idele d’après Eurostat ; ils prennent en compte tous les ateliers de plus de 10 ha de SAU). Ainsi, le vieillissement des chefs d’exploitation n’est pas propre à notre pays, de même que la diminution du nombre d’installations et de fermes en général. Un phénomène qui semble difficile à freiner autant chez nous que chez nos voisins européens.

En France depuis 2016 cependant, le nombre d’installations aidées augmente : Installations aidées − La hausse se poursuit

Partout, l’accès au foncier est un obstacle

Les autres pays européens tentent-ils, comme la France, d’inverser la tendance ? Face à ces constats identiques, proposent-ils les mêmes solutions ? À travers un travail d’enquête, l’Institut de l’élevage a voulu connaître les différents dispositifs d’accompagnement de l’installation et de la transmission mis en place ailleurs en Europe. S’ils paraissent plutôt divers, trois éléments se retrouvent dans la majorité des pays. Partout, l’accès au foncier est un obstacle. Particulièrement en Irlande où il est détenu en majorité par les cédants et aux Pays-Bas où le prix des terres est exorbitant en raison de la superficie réduite du pays et de la pression urbaine. Deuxièmement, la cession des fermes s’effectue principalement à titre gracieux et dans le cadre familial, même si cela n’est plus forcément adapté au contexte actuel (augmentation de la valeur de reprise des exploitations, manque d’emplois dans les secteurs non agricoles, attente plus longue pour que le jeune puisse s’installer, etc.).

D’ailleurs, presque aucune mesure n’existe pour faciliter la transmission à un tiers et ce système s’avère même parfois « désavantageux fiscalement », insiste l’organisme. De plus, certains agriculteurs n’y semblent pas favorables car ils redoutent « une distorsion de concurrence sur le marché foncier ». Pourtant chez nos voisins aussi, les jeunes non issus du monde agricole sont de plus en plus nombreux dans les écoles d’agriculture. Ajoutons que dans le schéma familial, l’équité entre héritiers n’est pas toujours respectée et ces derniers ne reçoivent qu’une modique indemnité. La volonté est vraiment de garder l’exploitation dans la famille, pour éviter en particulier de morceler les terres, et rompre cette tradition est encore plus difficile que pour les agriculteurs français.

Ce sont surtout les cédants qui sont accompagnés

En Irlande, dans le nord de l’Allemagne et le centre-est des Pays-Bas par exemple, où les règles successorales sont plutôt bénéfiques aux repreneurs, la ferme est souvent donnée à un seul enfant, celui le plus désireux de reprendre, le mieux formé et qui a le plus de compétences agricoles. Dans le nord de la Hollande, le successeur ne rachète qu’une petite partie du capital. Autre constante chez nos voisins européens : ce sont surtout les cédants qui sont accompagnés, sans doute parce qu’ils sont confrontés à une « insécurité financière » bien plus importante qu’en France, où celle-ci pèse davantage sur les repreneurs. Notre pays fait ainsi figure de « pionnier » en matière de politique à l’installation.

Retrouvez sur cette carte interactive plusieurs initiatives pour favoriser la transmission des fermes en Allemagne, Espagne, Finlande, Irlande et Pays-bas :

Carte interactive

Parallèlement à ces actions, dont certaines pourraient peut-être être déclinées dans notre pays même si ce n’est pas à l’identique, nos voisins européens cherchent à améliorer l’attractivité du métier d’agriculteur et des territoires ruraux. Le « manque de rentabilité et de vivabilité des projets » sont en effet « des freins majeurs », explique l’Idele. « Le niveau de revenu très bas et les conditions de travail (astreinte, pénibilité, peu de temps libre et de congés…), des éleveurs notamment, en décalage croissant avec ce que connaissent les salariés d’autres secteurs professionnels, attirent peu de jeunes. »

Certes « les États-membres durement touchés par la crise économique de 2007 » ont vu le nombre d’exploitations bovines repartir un peu à la hausse. Mais l’institut craint qu’il s’agisse d’un « retour à l’agriculture par défaut ». Toutefois, pour pouvoir transmettre les fermes plus facilement, en particulier celles d’élevage, un travail doit être mené partout en Europe pour que les jeunes puissent accéder au foncier, que les cédants anticipent davantage la cession de leurs structures et pour ouvrir plus largement les portes de celles-ci aux personnes extérieures au milieu agricole.

Retrouvez les articles sur le foncier, publiés en novembre sur Agri Mutuel :