Accéder au contenu principal
Alimentation animale

Géopolitique et craintes macroéconomiques chahutent les marchés des tourteaux


TNC le 28/03/2023 à 15:40

Les prix des tourteaux étaient en chute la semaine dernière, entraînés à la baisse par la menace d’une crise financière mondiale. Le mouvement inverse semble s'enclencher ces jours-ci pour les tourteaux de soja et de colza, après que la Russie a laissé entendre qu’elle allait restreindre ses exportations.

Le marché des tourteaux est particulièrement agité depuis le début de la semaine dernière, marquée par une baisse brutale des prix. À 584 €/t le 20 mars, le tourteau de soja en pellets à 48 % de protéines et de matières grasses (Montoir départ, échéance mai-juillet) avait ainsi chuté à 519 €/t le 27 mars.

Le tourteau de colza rendu Rouen, échéance mai-juillet, est passé de 396 €/t le 22 mars à 366 €/t le 27 mars. En parallèle, le tourteau de tournesol Saint-Nazaire rendu, échéance mi-juillet, perdait 13 €/t en deux jours pour atteindre 306 €/t le 24 mars

Pourquoi ce retournement baissier, observé aussi bien en France qu’en Europe et à l’international ? D’abord en raison d’un contexte de demande intérieure limitée et d’offre abondante, explique notre expert Marius Garrigue.

Fediol, l’association européenne de l’industrie des huiles végétales et des farines protéiques, évoquait notamment une trituration de colza toujours dynamique dans l’UE au mois de février, avec 1,58 Mt de graines traitées (+ 82 kt par rapport à février 2022). L’activité retombait en revanche pour le soja (- 51 kt sur un mois et – 76 kt sur un an) et le tournesol (- 43 kt sur un mois et – 29 kt sur un an).

L’autre raison majeure de la chute des prix des tourteaux, c’est la menace d’une crise financière mondiale qui a emporté à la baisse les cours du pétrole, et dans leur sillage ceux du complexe oléagineux (graines, huiles, tourteaux).

La faillite de la banque californienne SVB, le 10 mars, a de fait provoqué un vent de panique sur les marchés financiers, amplifié quelques jours plus tard par les difficultés du Crédit suisse. Ce dernier a été racheté en urgence par son rival UBS, le 19 mars, pour calmer les inquiétudes et limiter les risques de contagion à d’autres institutions bancaires.

Les prix des graines oléagineuses ont alors complètement décroché en moins d’un mois : à Chicago, la fève de soja à livraison mai a perdu l’équivalent de 42,3 €/t entre le 6 et le 23 mars, plombée aussi par la concurrence des origines brésiliennes sur la scène internationale.

En Europe et en France, le décrochage a été vertigineux pour le tournesol : déjà sous le coup d’une baisse continue depuis novembre, le prix du rendu Saint-Nazaire a perdu 170 €/t entre le 27 février et le 24 mars. Le colza rendu Rouen chutait de son côté de 135 €/t sur le marché physique entre le 20 février et le 23 mars. Le renforcement de la parité eurodollar et des importations européennes très élevées pour les deux graines ont aussi pesé sur la tendance.

Mais le vent a tourné ce week-end. Alors que les risques de production en Argentine et les mouvements sociaux en France apportaient déjà des facteurs de tension aux cours, c’est la géopolitique qui a vivement relancé à la hausse les oléagineux à l’international : depuis vendredi, des rumeurs persistantes évoquent une suspension des exportations russes de blé et d’huile de tournesol.

Boostés aussi par la reprise des cours du pétrole, le retour de la demande et l’apaisement des craintes concernant une potentielle crise financière mondiale, les prix des graines oléagineuses ont flambé à nouveau : d’environ 8 €/t depuis jeudi pour le soja à terme mai 2023 à Chicago, de 35 €/t pour le tournesol rendu Saint-Nazaire. Le colza Euronext à terme 2023 de son côté pris plus de 30 €/t en deux séances, mais se stabilisait ce midi.

Dès lors, difficile de connaître l’ampleur et la durée de ce mouvement de reprise. Ce qui est sûr, c’est que ce mardi, les cours des tourteaux de colza et de soja étaient pour la plupart stables, voire en hausse, voire en forte hausse. Le tourteau de colza départ Ottmarsheim reprenait par exemple 13 €/t en une journée sur les échéances mai-juillet et août-octobre.

Le tourteau de tournesol (rendu Saint-Nazaire) est en revanche toujours orienté à la baisse, perdant à nouveau 4 €/t après une journée de stagnation et atteignant aujourd’hui 302 €/t, son niveau de fin décembre.