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Intrusions dans les élevages

Des députés veulent agir pour soutenir les agriculteurs


TNC le 14/11/2019 à 15:22
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À l’initiative des députés Marc Le Fur et Didier Le Gac, un colloque interrogeant la place de l’animal dans la société a réuni des parlementaires de différents partis politiques, le 13 novembre, autour de constats partagés : face à la forte médiatisation des associations antispécistes, qui contribue au dénigrement de la profession agricole dans un contexte déjà difficile pour l’agriculture, il est urgent de mettre en place des mesures pour enrayer la montée en puissance des actes malveillants perpétrés envers les agriculteurs.

Les actes de malveillance sur les exploitations agricoles ont augmenté de façon exponentielle ces deux dernières années, alors que les éleveurs ne cessent d’améliorer leurs pratiques en matière de bien-être animal. Devant ce constat, deux députés, Marc Le Fur (LR, Côtes d’Armor) et Didier Le Gac (LREM, Finistère) ont organisé le 13 novembre un colloque transpartisan sur les relations entre l’Homme et les animaux dans la société actuelle.

Si les éleveurs ont conscience des attentes sociétales et travaillent à la montée en gamme, sans que le consommateur ne finance réellement les progrès effectués, les attentes des associations antispécistes, à l’origine des attaques d’élevage, restent en revanche mal connues. Pour les militants de ces associations, « les animaux sont les nouveaux prolétaires du capitalisme productiviste », explique le philosophe Francis Wolff.

Car si elles sont parfois confondues, dans l’opinion, avec les associations welfaristes (qui ont pour objectif d’améliorer les conditions de vie des animaux d’élevage), les associations antispécistes prônent un militantisme radical « qui fait l’amalgame entre la gestion des animaux domestiques et sauvages, et la maltraitance animale », souligne Bernard Vallat, président de la Fédération des industriels et charcutiers traiteurs, ancien directeur de l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE). « À terme, les citoyens seront aussi remis en cause dans la relation qu’ils entretiennent avec leurs animaux de compagnie », ajoute-t-il.

Gagner la bataille de l’opinion

Face à l’augmentation du nombre d’attaques d’élevages, le ministre de l’intérieur a installé, début octobre, la cellule Déméter dédiée spécifiquement à cette question. Le ministre de l’agriculture a mis en place dans son département un observatoire de l’agribashing, initiative reprise dans les Côtes d’Armor et prochainement dans le Finistère.

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Cependant, s’il y a quelques années, le comportement des activistes de L214 a été sanctionné par la loi, aujourd’hui, « la loi n’a pas changé mais les esprits ont évolué, on semble avoir un courant jurisprudentiel plus défavorable », souligne maître Jean-Pierre Depasse, avocat au barreau de Rennes. « Il semble bien que la notion de liberté d’expression pourrait venir supplanter les notions traditionnelles de notre droit : droit de propriété, respect de la vie privée, respect de réglementations sanitaires… », poursuit-il.

« On ne gagne pas une bataille politique si on a perdu la bataille intellectuelle, dans l’opinion », rappelle de son côté Marc Le Fur. Or les activistes anti-élevage sont de très bons stratèges en matière de lobbying. « Chez L214, les salariés sont essentiellement des communicants », souligne Hervé Le Prince, du collectif Les Z’Homnivores, collectif d’acteurs issus de l’agroalimentaire. Il indique par ailleurs que dans les associations welfaristes, la plupart des salariés sont des vétérinaires. Cette stratégie d’influence se développe vers plusieurs cibles : les écoles, les politiques (avec un fichage des élus en fonction de leurs actions contre ou pour les animaux) … L’une des principales difficultés, au-delà de la loi, est donc de contrebalancer le message de ces associations qui jouent sur le registre de la sensibilité, sensibilité exacerbée, à l’égard des animaux, par la perte des liens avec le milieu rural pour la majorité de la population.

De gauche à droite : Marc Le Fur, Frédéric Descrozaille, Francis Wolff et Didier Le Gac. (©TNC)

Des mesures à prendre rapidement

Pour les nombreux éleveurs présents au colloque, il est nécessaire d’agir rapidement. « Ce qu’on attend, c’est d’être défendus face aux groupes de pression qui remettent totalement en cause notre métier. Des hommes politiques prennent la parole, mais ça ne suffit plus car ça ne s’arrête pas ! On a besoin d’actes », témoigne un éleveur de porcs du Finistère.

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« Nous constatons une évolution exponentielle des appels de la cellule Agri’Ecoute, abonde Pascal Cormery, président de la MSA et lui aussi éleveur. On se sent fustigés, on devient parano, on met des caméras, les agriculteurs sont dans un mal être permanent ».

« Les gens vont se faire justice, il y a urgence ! », insiste un autre éleveur à l’endroit des députés.

Pour Marc Le Fur et Didier Le Gac, en accord avec ces constats, trois mesures peuvent être mises en œuvre. Tout d’abord, la mise en place d’une Commission d’enquête parlementaire pour mieux connaître les associations anti-élevage, leurs objectifs, leur financement (sachant par exemple que les entreprises de viande cellulaire américaines financent de façon importante ces mouvements). Marc Le Fur souhaite par ailleurs mettre fin au privilège fiscal pour les personnes qui donnent à ces associations, puisque leurs militants agissent en contravention avec la loi à travers les intrusions et attaques d’élevage. Enfin, les deux députés veulent des sanctions renforcées. La question de la biosécurité et du contrôle sanitaire devra par ailleurs être mise en avant, estime Didier Le Gac, qui incite les députés et responsables présents à poursuivre les débats.