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Conjoncture céréalière

Coup de mou pour le blé dur


TNC le 04/01/2019 à 10:02
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Selon les données de Franceagrimer, la production française 2018 de blé dur a baissé de 17 % par rapport à 2017 à cause de conditions climatiques défavorables tant au rendement qu'à la qualité. Et l’écart de prix très resserré entre le blé dur et le blé tendre pourrait en partie expliquer le recul des surfaces attendues pour la prochaine campagne.

Selon les dernières prévisions du Conseil international des céréales, la production mondiale de blé dur 2018/19 s’élève à 38 Mt, en hausse par rapport à 2017/18. Elle progresse notamment dans certains pays exportateurs comme le Canada et les États-Unis mais aussi chez les pays importateurs du Maghreb, notamment en Algérie. La production turque, en légère baisse en 2018/19, se maintient toutefois à un niveau élevé (3,6 Mt).

En Europe, la production s’est également infléchie de 6 % à moins de 8 Mt, notamment en Italie, principal pays producteur européen mais aussi en France. La récolte française est estimée à 1,76 Mt contre 2,12 Mt en 2017. Une forte baisse due à des rendements plus faibles – à peine 50 q/ha en moyenne en 2018, contre 57,3 q/ha en 2017 – et des surfaces moindres : 353 000 ha en 2018 contre 370 000 ha l’année précédente.

« Les bassins Sud-Ouest et Sud-Est ont en effet pâti de conditions climatiques défavorables engendrant mauvais rendements et qualité parfois insuffisante pour des utilisations en semoulerie destinée à l’alimentation humaine », explique Franceagrimer.

Moins de 15 €/t d’écart entre blé dur et blé tendre

Par ailleurs, les cours du blé dur ne vont pas inciter les producteurs à s’engager davantage dans cette production. Depuis fin septembre 2018, l’écart de prix entre le blé dur et le blé tendre, rendu La Pallice, est égal ou inférieur à 15 €/t. Ces trois dernières années, et jusqu’à cet automne, cet écart était d’au moins 50 €/t, et pouvait atteindre 100 €/t.

« L’écart de prix s’est très nettement resserré entre blé tendre et blé dur, ce qui pourrait en partie expliquer un recul des surfaces pour la campagne à venir », constate Franceagrimer. « Les surfaces sont désormais confirmées en net repli par rapport à l’an dernier », confirme Offre et demande agricole.

Un plan de relance qui apparaît inatteignable

Avec ce coup de mou de la production, la filière française de blé dur s’éloigne grandement des objectifs qu’elle s’est fixés en 2015 dans le cadre de son « plan de relance ». La filière envisageait de « doubler la production d’ici 2025 », pour passer de 2 Mt en moyenne quinquennale à 3,5 Mt annuels de manière stable, indépendamment de la volatilité des prix constatée sur le marché.

Pour y parvenir, il s’agissait de développer les surfaces « dans toutes les zones possibles de production » – et non seulement dans la zone dite traditionnelle de production (régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Occitanie auxquelles sont ajoutées l’Ardèche et la Drôme) – pour « atteindre 600 000 ha contre 287 000 ha en 2014 ». Il s’agissait ainsi d’approcher les niveaux d’emblavements de 2010 (500 000 ha).

Trois ans après la validation de ce plan de relance, une « étude sur les motivations des producteurs à produire du blé dur dans la zone traditionnelle » met en exergue les multiples raisons des producteurs à diminuer voire abandonner la culture.

Sur 83 producteurs interrogés au cours de cette étude menée au premier semestre 2018, 31 ont indiqué avoir diminué ou carrément arrêté la production. Certains ont capitulé suite à plusieurs années avec de trop faibles rendements, d’autres ont remplacé la culture par une une autre peu exigeante en intrants et en travaux culturaux. La plupart de ces agriculteurs ont allongé la rotation de leurs cultures, faisant revenir le blé dur moins souvent, l’objectif étant de diminuer les intrants et les travaux culturaux pour « améliorer la rentabilité du blé dur sans altérer le rendement ».

Pour les producteurs ayant réduit ou arrêté la production de blé dur, comme pour les autres, la rentabilité de la culture reste un facteur évidemment déterminant. Or, « l’écart entre le coût de production du blé dur et du blé tendre est en moyenne de 13 %, avec des 5 % à 20 %. » Un trop faible écart de prix de vente entre les deux cultures ne peut pas inciter économiquement les producteurs à renforcer leur production de blé dur.