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Modèles agricoles

«Agriculture régénératrice, tout le monde en parle, mais comment on y arrive ? »


TNC le 24/02/2023 à 18:35
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Le terme "agriculture régénératrice" souligne « la régénération de la biosphère » permise par les pratiques mises en place. (©Alain Van de Kerckhove)

Telle était la thématique d'un Sima Tech animé par Pierre Compère, directeur du développement des entreprises, du pôle de compétitivité Agri Sud-Ouest Innovation. L'occasion d'échanger sur le terme « agriculture régénératrice » et les moyens d'y arriver.

Agriculture régénératrice, agriculture de conservation des sols, agriculture du vivant, agro-écologie… derrière tous ces termes, se cachent « les mêmes principes fondamentaux : la couverture permanente des sols, la réduction voire l’arrêt du travail du sol et l’allongement des rotations. On peut donner différents noms… La vraie question, c’est qu’un sol fonctionne de la même manière depuis mille ans et il fonctionnera toujours de la même manière dans mille ans », observe Sébastien Roumegous, président fondateur de Biosphères

« Entre 5 et 7 ans de transition »

Importé des pays anglo-saxons et utilisé par des grands groupes agroalimentaires comme Danone, « le terme « agriculture régénératrice » est intéressant car il souligne la régénération de la biosphère. Avec les pratiques qui y sont associées, on ne préserve pas la biodiversité en réalité, on fait en sorte de ne pas casser les cycles qui lui permettent de se régénérer ». « L’agriculture régénératrice permet la restauration de biens communs, elle a des effets sur le sol, ainsi que la biodiversité, le cycle de l’eau, et. », précise également Michel Duru, directeur de recherches à l’Inrae. 

« Une bonne santé biologique des sols est nécessaire si on veut réduire le travail du sol dans un système. Il y a aussi un ensemble de connaissances et de compétences à mettre en œuvre pour aller dans cette transition. Or cela peut être très compliqué parfois de passer du statut d’expert à apprenant, de réformer ses façons de faire… ajoute Sébastien Roumegous. L’agriculture conventionnelle est un modèle productif et efficace : à l’après-guerre, il a fallu fournir de l’alimentation et on a réussi ce défi de façon extraordinaire. Aujourd’hui, on doit toujours fournir de l’alimentation, tout en ne dégradant pas l’environnement, voire en le régénérant. On doit donc travailler différemment car d’autres règles du jeu entrent en compte. »

L’expert estime que « la phase d’apprentissage dure environ 2-3 ans et ensuite, il y a une phase de consolidation des acquis (avec acquisition du matériel, etc.). En tout, on peut compter entre 5 et 7 ans de transition ».

Besoin d’indicateurs et de reconnaissance

Les acteurs en amont et en aval de l’agriculture ont un rôle à jouer dans la diffusion de ce modèle, selon Mickaël Pourcelot, manager chez Agrosolutions. L’agriculture régénératrice reste aujourd’hui affiliée surtout à des initiatives individuelles ou locales, ces acteurs doivent permettre de « passer à une autre échelle ». Ils peuvent notamment aider à expliciter ce système auprès des consommateurs, mais aussi contribuer à la construction d’indicateurs pour mesurer les progrès. « La transition a un coût » et pour Mickaël Pourcelot, « ce sont tous les acteurs de la chaîne qui doivent le prendre en charge, pas uniquement les agriculteurs ». 

« Trouver les bons modèles économiques pour une agriculture durable est, en effet, un véritable enjeu. » Sébastien Roumegous, qui accompagne les agriculteurs au quotidien, note l’importance de prendre en compte le « rapport coûts/bénéfices » de la transition. « On peut trouver des itinéraires techniques qui permettent de restaurer en grande partie les fonctionnalités d’un écosystème, ne demandent pas de grands investissement et permettent de faire gagner de l’argent dès la première année de transition. Mais cela reste un travail d’équilibriste » « L’aversion au risque peut être un frein aujourd’hui à la transition. » Les trois experts s’accordent alors sur le besoin d’une reconnaissance économique, mais aussi professionnelle et sociétale des agriculteurs engagés dans ce modèle. 

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