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Environnement et élevage

Les émissions d’ammoniac, « le nouveau sujet chaud »


TNC le 25/08/2020 à 10:02
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La Commission européenne a mis en demeure la France pour qu'elle améliore ses règles en matière de lutte contre la pollution atmosphérique et fasse baisser ses émissions d'ammoniac (NH3). 98 % de ces rejets proviennent en France par le secteur agricole et 43 % par l'élevage bovin. « C'est le nouveau sujet chaud », estime Sylvain Foray de l'Idele. Des objectifs de réduction des émissions de NH3 ont été fixés à l'horizon 2030 et un guide de bonnes pratiques à destination du monde agricole a été publié.

Alors que les émissions de gaz à effet de serre par l’élevage reviennent de façon récurrente sur le devant de l’actualité, les émissions d’ammoniac (NH3) restent pour le moment dans l’ombre. Pourtant, il s’agit « d’un sujet chaud » comme l’a rappelé Sylvain Foray, responsable de projet environnement à l’Idele lors du webinaire Grand angle lait en juin dernier. La Commission européenne vient en effet de mettre en demeure la France afin qu’elle améliore ses règles en matière de lutte contre la pollution atmosphérique et qu’elle baisse ses émissions d’ammoniac. Et cela va impacter fortement le secteur agricole.

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L’ammoniac émis sur toute la chaîne de gestion des déjections

« L’ammoniac est un enjeu de santé publique car créateur de particules fines dans l’air, mais aussi un enjeu environnemental puisqu’il est à l’origine de l’acidification de l’air et de l’eutrophisation », rappelle Sylvain Foray. Le secteur agricole en est le principal émetteur puisqu’il représente 94 % des émissions d’ammoniac en Europe (81 % au Royaume-Uni, 87 % aux Pays-Bas et 98 % en France), et plus précisément l’élevage bovin. En France, il est responsable de 43 % des émissions d’ammoniac (44 % au Royaume-Uni et plus de 80 % en Irlande).

« L’ammoniac est émis sur toute la chaîne de gestion des déjections, a expliqué l’expert. Les pertes au bâtiment représentent 27 % des émissions totales d’ammoniac, celles au stockage 25 %, à l’épandage 34 % et au pâturage 15 %. »

Alors que les émissions d’ammoniac se sont réduites de 24 % en Europe entre 1990 et 2010, elles sont reparties à la hausse (+ 2,5 %) entre 2014 et 2017 et notamment en Allemagne, en Irlande et aux Pays-Bas. La France a suivi pratiquement le même mouvement : après une stagnation de ses émissions entre 1990 et 2013 (- 2 %), une tendance à la hausse a été constatée entre 2013 et 2017 suivie d’une baisse en 2018 pour atteindre le plus bas niveau inventorié depuis 1980, soit 594 kt.

Réduire de 19 % les émissions en 2030

La directive européenne NEC, (National emission ceilings ou Plafonds nationaux d’émission) se donne pour objectif de réduire de 19 % le plafond d’émissions d’ammoniac de l’UE en 2030 par rapport à 2005. Chaque pays se voit ainsi attribuer des objectifs à atteindre dans ce sens pour la période 2020-2029 et pour l’après 2030.

Les objectifs de réduction des émissions de NH3 par pays. (©Idele)

Pour la France, les objectifs fixés sont de – 4 % pour les années de la période 2020 à 2029 et de – 13 % au-delà. Paris a donc transposé cette directive avec le Plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques (Prepa), encadré par le décret n°2017-949 du 10 mai 2017 et l’arrêté du 10 mai 2017.

Pour le secteur agricole, un guide de bonnes pratiques a été réalisé par l’Ademe et publié en septembre 2019 (téléchargeable en bas de cet article). Il liste les leviers à mettre en œuvre pour réduire ses émissions, avec plusieurs grands chapitres pour les élevages. En voici quelques exemples sur :  

  • Alimentation des bovins : Diminuer les apports protéiques brutes apportés dans l’alimentation des bovins pour réduire les rejets azotés.
  • Gestion des effluents dans les bâtiments d’élevage : pour un potentiel de réduction des émissions de NH3 de 20 % : Évacuer rapidement et efficacement les déjections vers des ouvrages de stockage adaptés grâce à un raclage régulier. Agir sur les différents types de sols ou caillebotis afin de séparer l’urine et les fèces.
  • Sur le stockage des effluents : Couvrir les fosses à lisier d’une couverture rigide ou souple (potentiel de réduction des émissions de NH3 de 60 à 80 %). Favoriser le développement d’une croûte naturelle en installant un système de refroidissement pour que la température à la surface du lisier ne dépasse pas les 12 °C (potentiel de réduction des émissions de NH3 de 40 %)
  • Au niveau de l’épandage, l’utilisation de matériels peu émissifs (type rampe à pendillards ou injecteur) couplée ou non avec un enfouissement immédiat ou le plus rapidement possible permet de baisser de – 40 % à – 80 % l’émission de NH3 par rapport à la buse palette. Sylvain Foray a d’ailleurs indiqué qu’à partir de 2025, les matériels les plus émissifs comme la buse palette seront supprimés.

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