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[Reportage] Alexandre Contal (77)

Filtrer l’eau pour réduire au moins de moitié les doses phytos


TNC le 18/11/2019 à 08:59
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La réduction des phytos s'inscrit dans une démarche globale pour Alexandre Contal : rotation, travail du sol, observations... et filtration de l'eau utilisée pour les pulvérisations. (©TNC)

Originaire des Ardennes, Alexandre Contal est installé sur la commune de Tournan-en-Brie (Seine-et-Marne) depuis juillet 2018 en tant que directeur d’une exploitation de grandes cultures. À son arrivée, les propriétaires lui ont confié la mission d' « optimiser économiquement l’exploitation agricole ». Pour cela, il s'est équipé d'un système de traitement de l'eau pour les pulvérisations, qui lui permet de réduire les doses en conservant la même efficacité. Cet objectif s'inscrit bien évidemment dans une démarche plus globale.

Dès son arrivée sur l’exploitation de Tournan-en-Brie, Alexandre Contal envisage l’installation d’une solution de traitement de l’eau du puits servant aux pulvérisations. L’ayant déjà utilisé lorsqu’il était chef de culture dans une ferme non loin de là, il témoigne aujourd’hui de douze années d’expérience avec ce système.

– 80 % en fongicides/insecticides et – 75 % en herbicides

L’eau peut « faire varier l’efficacité d’un traitement de 30 à 80 % » car « elle est rarement pure », comme le présente la PME française Aquaphyto, spécialisée dans la filtration des eaux à des fins agricoles. La station de traitement est donc là pour adapter l’eau aux produits chimiques utilisés en « l’accommodant au pH de la matière active utilisée qui devient plus soluble, en augmenter sa conductivité et en la tempérant selon les préconisations du fabricant pour l’incorporation de la molécule dans le pulvérisateur ». Objectif : optimiser les traitements réalisés sur les cultures.

« Si la dose homologuée est de 2 l/ha pour 200 l/ha d’eau, le technicien recommande généralement 1 l/ha pour 100 l/ha d’eau et avec le système de filtration de l’eau utilisé, je suis plutôt passé à 0,5 l/ha pour 50 l/ha d’eau, voire 0,3 l/ha pour 30 l/ha d’eau », explique Alexandre Contal. Sur son exploitation, il arrive, en moyenne, « à – 80 % en fongicides et insecticides et – 75 % en herbicides, excepté pour le Kerb sur colza (0,9 – 1 l/ha au lieu de  1,9 l/ha, les conditions étant plus difficiles en décembre). Avec ces réductions, « l’installation Aquaphyto a été amortie en un an », ajoute-t-il.

Le maître-mot : anticiper !

Pour améliorer les résultats d’efficacité, il est important de « bien respecter les conditions d’application : sans vent et jamais en-dessous de 80 % d’hygrométrie pour que les plantes réceptionnent au mieux les matières actives. Sinon, il faut travailler avec la rosée (mais uniquement une belle rosée) pour les produits de contact/systémiques. En ce qui concerne les produits racinaires, on ne traite que sur sols humides : cette année, j’ai donc dû attendre un mois pour le désherbage du maïs », explique l’agriculteur, qui commence généralement les traitements vers 3 h du matin (compte-tenu de la SAU de l’exploitation). En tout, « cela représente 14 nuits ». Les seules interventions qu’il réalise plutôt le soir : « les insecticides après 22 h, une fois que les abeilles sont rentrées ».

Alexandre Contal utilise aussi des buses à limitation de dérive : 110°, 2,5 bars, ADI 110-0,15, avec des rampes à maximum 50 cm de la cible. Vu la vitesse nécessaire (18 km/h), c’est ce qui lui permet la « meilleure surface de recouvrement ». Il est également important de « tout anticiper », rien que pour programmer le traitement de l’eau de pulvérisation. L’agriculteur, qui construit lui-même son programme phyto, est très rigoureux vis-à-vis de l’observation des parcelles : « au moins un à deux tours de plaine par semaine, généralement le lundi et le jeudi ». Pour chaque parcelle, « je fais un tour en X pour surveiller les cultures en fonction des différents ronds de terre », ajoute-t-il.

Une démarche globale

Outre l’eau et les conditions d’application, « la réduction des phytos s’inscrit bien sûr dans une démarche globale », précise Alexandre Contal. En système non-labour, il privilégie les outils de travail du sol à dents : « je suis contre les outils à disques, qui ne font que couper les mauvaises herbes ». Pour les semis, il ne veut pas utiliser d’outil animé et dispose d’un semoir semi-porté. Avec des sols imperméables, « il est important de travailler le sol dans les meilleures conditions possibles ». L’agriculteur compte aussi sur l’alternance des cultures de printemps et des cultures d’automne dans les parcelles afin « d’allonger la rotation et ainsi d’alterner les matières actives utilisées ». Il revient, par exemple, tous les six ans en colza.

Autre point d’attention d’Alexandre : le taux de matière organique (MO) du sol. « Pour bien fonctionner, un sol doit avoir un taux de MO au minimum de 2 % ». À ce jour, celui de son exploitation est autour de 1,8 – 2 %, l’agriculteur n’exporte donc plus les pailles et apporte du fumier pour y remédier. Il a aussi recours à un conditionneur de sols, Nutrigéo de Gaïgo, utilisé à 30 l/ha pour le premier passage et à 20 l/ha pour l’entretien (avec 50 l/ha d’eau déminéralisée), pour améliorer la porosité des sols.