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Station expérimentale, Mauron (Morbihan)

Le Cirveau, une structure unique pour le veau de boucherie


TNC le 22/03/2024 à 05:01
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Plan du Cirveau Centre d'innovation et de recherche sur le veau (© © TNC)

Pour répondre aux questionnements de la filière veau de boucherie, l’Institut de l’élevage a déménagé la ferme de Monvoisin à Mauron (Morbihan). Une structure qui a pour vocation de tester les futures modalités d'élevage du veau.

Le travail en élevage, le renouvellement des générations, mais aussi les attentes sociétales sur le bien-être animal et l’environnement ; les défis qui attendent la filière veau de boucherie sont nombreux. C’est pour répondre aux nouveaux questionnements de ses acteurs que l’Idele vient de déménager sa station expérimentale de Monvoisin, du Rheu (Ille-et-Vilaine), à Mauron (Morbihan). Au passage, la station a été entièrement repensée et restructurée pour créer un centre d’expérimentation tout neuf, unique en Europe.

Toute la filière concernée

« Le veau de boucherie est une petite filière par le nombre de ses éleveurs, explique Didier Bastien, directeur du Cirveau. Mais actuellement, beaucoup de questionnements émergent en son sein. La station de Monvoisin ne permettait pas d’y répondre, notamment par manque de place. Et comme il était impossible de l’agrandir, il a été décidé d’en faire une nouvelle ».

C’est l’Idele qui est aux commandes et qui a assuré une grande partie du financement, avec le concours de la région Bretagne et de France relance. Ce qui ne l’empêche pas de travailler en liens étroits avec tous les acteurs de la filière, y compris ceux de l’aval : « C’est une production pour la viande mais aussi pour les cuirs », précise Didier Bastien.

4 ateliers

Pour pouvoir tester le plus de modalités d’élevage possible, il a d’abord été envisagé de créer un atelier modulable. Mais face aux difficultés de conception, ce sont quatre ateliers qui ont été mis en place. Grâce à cela, de nombreuses modalités seront mises à l’essai.

« Chacun des bâtiments a son petit nom », précise Didier Bastien.

Le Digi’bat est le plus proche des bâtiments actuels. Il est constitué de deux salles de 96 places, pour pouvoir travailler avec des lots de 24.

Dans chaque salle, 12 cases de huit veaux sont dotées d’une double façade et d’une barre au garrot. Elles sont équipées de deux auges, pour le lait et pour l’aliment fibreux.

« Le logement en cases collectives est conforme à la réglementation en veau de boucherie », précise Didier Bastien.

L’intérêt d’avoir deux salles est de comparer deux techniques de ventilation. L’une d’elles dispose d’une ventilation dynamique classique, avec entrée d’air sur les bouts de bâtiment et sortie par les cheminées.

Dans la deuxième, un système innovant a été installé : « L’air rentre par le toit et circule à travers des sortes d’assiettes, qui le font rebondir sur les veaux, détaille Didier Bastien. Il est ensuite extrait sous les animaux, c’est-à-dire sous les planchers ajourés, de manière à éviter les remontées d’ammoniac. C’est un système qui existe en volaille et en porc et que nous allons tester sur le veau de boucherie ».

Plan du Cirveau : les différents bâtiments sont répartis autour du Central ; une structure qui permet de tester de nombreuses modalités d’élevage. (© Institut de l’élevage)

Avant tout produire des références

L’Indi’bat regroupe quatre lots de 24 veaux. Ceux-ci sont logés dans des salles bio-climatiques, dont l’ambiance -la température, l’hygrométrie – peut être gérée individuellement. Il est même possible d’en faire monter la température pour simuler un stress thermique.

Les consommations des veaux sont mesurées individuellement : non seulement le lait mais aussi l’aliment solide, grâce à des auges peseuses. « L’animal est bouclé électroniquement, explique Didier Bastien. Grâce au capteur, il est possible de savoir exactement à quelle heure il vient consommer l’aliment solide, le début et la fin de son repas, ainsi que les poids de l’auge au début et à la fin. Par déduction, les consommations réelles de l’animal sur chaque repas et tout au long de la journée sont enregistrées ».

Les mêmes mesures sont effectuées pour l’eau, grâce à des abreuvoirs connectés.

Quant au veau, il est pesé à chaque fois qu’il vient boire ; un certain nombre de poids sont donc enregistrés tout au long de la journée.

Parallèlement, la production de lisier est examinée lot par lot : des pré-fosses extérieures permettent de mesurer les quantités, les volumes et la composition de chacun des lisiers produits.

« Notre rôle est de produire des références et, pour ce faire, nous devons tout mesurer », souligne Didier Bastien.

Des veaux de boucherie sous igloo

Radicalement à l’opposé, l’Open’bat est un bâtiment très innovant pour la filière veau de boucherie, puisqu’il est ouvert côté sud et fermé côté nord par un filet brise-vent, qui peut être escamoté par fortes chaleurs. Les veaux sont sur litières et il sera possible de tester différents types de litières. Devant le bâtiment, des accès extérieurs ont été aménagés. Des courettes partiellement couvertes rendront possibles des modalités d’élevage avec plein air partiel.

« Et les parcelles qui sont juste devant le bâtiment nous appartiennent, ajoute Didier Bastien. Nous aurons donc la possibilité de mettre en place des essais en plein air intégral ».

Dernier bâtiment qui n’en est pas un, une plateforme bétonnée va accueillir des igloos pour un élevage en extérieur. Les veaux seront logés dans un parc cinq mètres sur cinq, couvert, paillé, avec un igloo à l’arrière pour servir de refuge.

Sur l’ensemble du site, des panneaux photovoltaïques couvrent la quasi-totalité des toitures, une unité de micro-méthanisation et des panneaux solaires thermiques assurent un préchauffage de l’eau de chauffage. Ces installations, voulues par l’Idele, doivent servir autant à conduire des essais qu’à faire baisser la facture énergétique et le bilan carbone de la station.

Prendre des risques à la place des éleveurs

Enfin, le bâtiment central accueille les bureaux mais aussi un showroom en hauteur qui permet d’observer les veaux sans compromettre la biosécurité. Il a vocation à accueillir des groupes pour montrer les essais en cours, et surtout, pour faire de la formation.

« Nous nous sommes rendu compte que les écoles d’agriculture parlaient très peu de production de veau de boucherie, note Didier Bastien. C’est pourtant un besoin fort de la filière. Elle nous demande d’agir auprès des jeunes pour les sensibiliser et les former. C’est une question de renouvellement de génération ; l’enjeu étant d’installer des jeunes dans cette production ».

Ouverte début 2024, cette nouvelle structure tombe à pic. « En 2023, l’actualité nous a rattrapés et l’Europe a imposé une évolution du bien-être animal. Il est donc urgent de travailler sur ces questions. Et nous sommes là pour prendre des risques à la place des éleveurs », conclut Didier Bastien.