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Bovins lait et viande

La sécheresse 2018 a mis les éleveurs à sec


TNC le 05/06/2019 à 14:55
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En 2018, à cause de la sécheresse, « les éleveurs ont réduit leurs effectifs de vaches laitières et allaitantes », explique l'Institut de l'élevage. (©TNC)

La sécheresse a marqué fortement l'année économique 2018 pour les producteurs laitiers et allaitants. Dans le bilan annuel qu'il réalise pour les deux filières, l'Institut de l'élevage Idele détaille ses multiples conséquences, tant au niveau de la production que du revenu des éleveurs.

Par sa durée et son intensité, la sécheresse de l’an dernier restera dans les annales, comme ses conséquences pour l’élevage de vaches laitières et allaitantes. Pour chacune de ces deux filières, l’Institut de l’élevage Idele en fait l’événement marquant de l’année économique 2018, détaillée dans ses publications annuelles Économie de l’élevage bovins lait et Économie de l’élevage bovins viande. Le déficit hydrique a en effet commencé au printemps et s’est prolongé pendant près de neuf mois, jusqu’à l’automne. Il a touché non seulement la France mais tout le nord de l’Europe. Le manque d’herbe dans les prairies et les faibles récoltes de fourrages ont à la fois impacté les productions laitière et allaitante, ce dans de nombreux pays européens, y compris en Irlande et en Pologne, deux grands producteurs de lait.

La collecte laitière de l’Union européenne s’est donc repliée au second semestre et « a ainsi facilité la remise sur le marché des stocks d’intervention de poudre maigre » mais « qui ont été vendus à bas prix par la commission européenne », précise l’Institut de l’élevage. Cet épisode de sécheresse « confirme le rôle central de l’UE sur la scène laitière internationale depuis la fin des quotas » même si la Nouvelle-Zélande a compensé en partie la baisse de la production européenne par une collecte abondante fin 2018 en raison d’une météo propice à la pousse de l’herbe.

Le revenu des éleveurs s’est fortement dégradé

Deuxième effet mis en avant par l’Idele : « Les éleveurs ont réduit leurs effectifs de vaches laitières et allaitantes ». D’où un « afflux de femelles réformées dans les abattoirs qui a provoqué une baisse des prix » et une accentuation de la décapitalisation du cheptel bovin viande initiée au début de l’année précédente. Fin 2018, il est passé sous les 3,9 millions de tête, « son plus bas niveau depuis 20 ans », souligne l’organisme. Autre incidence de la sécheresse : les producteurs ont dû acheter des fourrages, de la paille et parfois des céréales pour faire face à la production déficitaire, ce qui entraîné une hausse des charges d’autant que cette même sécheresse a fait grimper les prix. Or, ceux de l’aliment et de l’énergie, notamment des carburants, ont également augmenté.

Lire aussi : Bovins viande − Un début d’année difficile

Par conséquent, le revenu des éleveurs laitiers, malgré un prix du lait relativement stable par rapport à l’an passé, et allaitants, français comme européens, s’est dégradé dans quasiment tous les systèmes. « Seules les exploitations laitières avec cultures de vente s’en sortent mieux », nuance l’institut. Pour les élevages bovins viande qui n’en produisent pas en revanche, la perte de revenu « est estimée entre 10 et 30 % même si les aides calamités ont pu limiter les dégâts ». Il faut dire que le cours des jeunes bovins baisse d’une année sur l’autre.

Plus d’infos sur l’année économique laitière 2018 avec Gérard You, chef du service conjoncture laitière de l’Institut de l’élevage Idele, dans cette vidéo publiée sur Vimeo :

Gérard You Tendances mars 2019 from Institut de l’Elevage on Vimeo.

La situation s’améliore, mais des craintes subsistent

Pour ce qui est du prix du lait, l’Idele pense qu’il restera « bien orienté » en 2019 et « peut stimuler la production pour peu que les transformateurs manifestent un appétit de lait ». En Europe, l’organisme table des volumes importants surtout si les conditions climatiques demeurent favorables. Mais ne cache pas ses craintes à propos des répercussions du Brexit sur les échanges européens et de celles de l’altération des relations diplomatiques et commerciales entre les États-Unis, la Chine, la Russie et l’UE.

Concernant le marché de la viande bovine, « les retards de naissances au second semestre 2017 ont limité les disponibilités de broutards et les exportations européennes ont diminué de 4 % dès l’année suivante ». Toutefois, la bonne demande a soutenu les cours des bovins maigres, en particulier pour les femelles. La consommation s’est effectivement accrue de 2 % en Europe comme en France et les importations ont progressé de 6 % comparé à 2017. « Un paradoxe », selon l’Institut de l’élevage vu « les messages anti-viande qu’on nous serine ». Néanmoins, ce sont la restauration hors foyer et les plats cuisinés qui tire la consommation de viande bovine. « Difficile dans ce contexte de distinguer la viande d’origine allaitante ! »

Voir également le bilan d’Agreste pour les bovins viande en 2018 :
Agreste dresse un bilan en demi-teinte

Et pour 2019 ? Le marché pourrait être dirigé par le recul des disponibilités de viande bovine, jusqu’à leur niveau de 2014, comme le prévoit l’institut. L’assainissement de la situation laitière, avec l’élimination des stocks communautaires de poudre de lait, devrait réduire le nombre de réformes et la production de jeunes bovins devrait aussi reculer. Par contre, davantage de broutards devraient être mis sur le marché. « Cette conjoncture pourrait ouvrir la porte à davantage d’importations en provenance des pays tiers et il faudra suivre de près les négociations avec le Mercosur, les États-Unis et l’Australie. » Sauf aléa climatique ou d’une autre nature, l’année économique 2019 serait donc meilleure en lait comme en viande. Des questions se posent malgré tout quant aux incidences de la loi Égalim, particulièrement en bovins viande car « les premiers résultats sont encourageants en lait », et à la poursuite ou non de la décapitalisation des troupeaux allaitants.