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Croisement et production de bœufs

Des pistes pour mieux valoriser les veaux laitiers au sein de la filière bio


TNC le 21/12/2022 à 05:02
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Le collectif "Bio en Hauts-de-France" dresse les prémices d'une filière pour la valorisation des veaux laitiers bio. L'objectif : engraisser les veaux croisés pour proposer des carcasses de bœufs légères et bien finies. Si ce type de produit existe déjà en conventionnel via les contrats Herbopack, le cahier des charges bio donne à la filière des défis techniques supplémentaires à relever, avec la gestion de la phase lactée et du parasitisme sur les jeunes animaux.

Chaque année, environ 6 000 veaux laitiers mâles bio naissent dans les Hauts-de -France. Aujourd’hui, les trois quarts de ces veaux rejoignent la filière conventionnelle sur le marché du maigre, une solution que Bertrand Follet, conseiller pour Bio en Hauts-de-France juge non seulement « peu éthique » mais en plus « peu rémunératrice pour l’éleveur ».

Dans ce contexte, Bio en Hauts-de-France travaille pour faire émerger une filière pour la valorisation des veaux laitiers via le projet « Pré Veau ». « L’objectif est de faire du bœuf plutôt que des veaux, avec des animaux abattus à 24 mois pour les plus précoces. Le croisement Angus ou Hereford permet d’atteindre l’âge adulte aux environs de deux ans. Avec des animaux mixtes, ou des races allaitantes plus typées françaises, il faudra attendre un peu plus longtemps, autour de 27 mois ».

Gérer la phase lactée…

Le cahier des charges bio pousse à l’utilisation de lait naturel, de préférence maternel jusqu’aux trois mois de l’animal. « Une tolérance existe pour l’utilisation de lait en poudre bio, mais son prix avoisine les 5 000 €/t » explique Bertrand Follet. La gestion de la phase lactée est ainsi l’une des principales problématiques. « On a imaginé qu’une solution pouvait être l’utilisation de vaches nourrices ». Cette technique permet également de renforcer l’immunité des veaux, ce qui assure un démarrage plus précoce. L’utilisation de seaux à tétines peut également être envisagé.

…et la pression parasitaire

Bio-en-Hauts de France cherche à proposer aux consommateurs des veaux nourris à l’herbe. Le parasitisme est cependant une problématique importante pour les agriculteurs bio. « Les jeunes animaux y sont particulièrement sensibles constate Bertrand Follet. Le pâturage tournant, avec des temps de repos assez longs permet de le gérer mais ça ne marche pas toujours. »

Des essais, menés au Gaec de la Petite Prée à Archon soulignent cette problématique. S’il est possible d’atteindre des GMQ de 850 g/j au pâturage avec des veaux nés à l’automne, les veaux Montbéliards croisés présents sur l’exploitation affichent un GMQ avoisinant les 560 g/j. En cause : le parasitisme. « Il faut faire attention à ne pas faire passer les animaux de moins d’un an deux fois au même endroit, préconise le conseiller, et bien nettoyer les prairies avec des vaches plus âgées, voire avec un lot « esclave ». Surveiller la croissance des animaux par des pesées régulières aide aussi à identifier les problèmes et cibler les traitements sur les animaux les plus concernés. »

Construire une filière

Les éleveurs bio valorisent généralement l’intégralité de leurs surfaces fourragères via la production laitière. Produire des veaux sur les exploitations reviendrait à effectuer un arbitrage entre la production de viande et la production laitière, « c’est pour cela que les veaux sont vendus le plus tôt possible », mais pour Bertrand Follet, « il faut créer une filière ». « Si on veut élever les veaux laitières dans la filière bio, il faudra créer un nouveau métier : engraisseur à l’herbe, qui n’existe quasiment pas aujourd’hui. L’objectif est de créer des relations entre naisseurs et engraisseurs pour que chacun puisse exercer ses compétences ». 

Au delà du volet production, la valorisation des veaux laitiers pose question. « Les contrats Herbopack, proposés par le groupe Bigard se développent en conventionnel et montrent qu’il y a une voie pour ce type de produits. C’est assez proche de ce que l’on veut faire en bio, avec pour enjeux supplémentaires la gestion du parasitisme et de la phase lactée ».

« Des Holstein croisés Angus, les marchands de bestiaux n’en veulent pas parce qu’ils ne connaissent pas la marchandise, il faut trouver d’autres débouchés », note Guillaume Baloche, qui engraisse des veaux croisés qu’il valorise via la filière Herbopack. A l’initiative du groupe Bigard, Herbopack permet de valoriser des animaux croisés issus de la filière conventionnelle (Hereford ou Angus), conduits à l’herbe et abattus entre 24 et 30 mois, avec pour objectif d’avoir des carcasses légères (autour de 260 – 350 kg) et bien finies.

Bio en Hauts-de-France est en phase de démarchage pour structurer la filière. « Est-ce que les prix seront suffisants pour garantir une rémunération correcte des éleveurs ? On ne l’a pas encore tout à fait vérifié. C’est en cours, mais c’est déjà possible de poursuivre la démarche pour que le consommateur se rende compte que nous avons un mode de production très éthique à proposer » conclut Bertrand Follet.