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Pêche en mer

Des balises satellites pour lutter contre la pollution des filets fantômes


AFP le 05/07/2020 à 15:35

Pris au piège dans les mailles des filets de pêche perdus, espadons, araignées de mer et daurades ne seront jamais mangés. Pour lutter contre ces ravages au fond des mers, un projet expérimental va les tracer par satellite.

Dans les eaux de Méditerranée dans un premier temps, puis dans l’Atlantique, au large de la Bretagne, du Canada ou de la Guyane, cette expérimentation menée par une société française et des scientifiques, vise aussi à réduire la pollution plastique des océans.

« Perdre un filet, c’est un drame financier pour les pêcheurs traditionnels mais aussi pour l’environnement », explique Pierre Morera, président d’un regroupement de 200 pêcheurs artisanaux dans le Var.

Chaque année, quelque 9,5 millions de tonnes de plastiques sont déversées en mer, selon des chiffres de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) dont des filets fantômes. Aux Açores, ils représentent 100 % des déchets au fond de la mer, selon François Galgani, océanographe à l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer).

Les pêcheurs artisanaux du Var vont donc tester en primeur la technologie développée par la société toulousaine CLS, filiale du Centre national d’études spatiales (CNES), avec l’appui de l’Ifremer.

Casiers, palangres et filets seront munis de balises mesurant à peine 10 centimètres. Chacune d’entre elles contient une puce reliée à l’un des huit satellites, qui, avec 25 autres à horizon 2022, couvriront l’ensemble de la terre.

Elles émettront un signal permettant aux pêcheurs dotés d’une tablette de connaître la position de leurs engins de pêche.

« Fait pour tuer »

« Le problème, c’est qu’un filet c’est fait pour tuer, et quand il est perdu ou abandonné il continue à tuer, des poissons, mais aussi parfois des tortues ou des phoques » qui sont des espèces menacées, commente François Galgani.

Sur son bateau, Pierre Morera, qui pêche à trois ou quatre heures de navigation de la côte, derrière les îles d’Hyères, quand le jour n’est pas encore levé, compte sur ce système pour retrouver plus facilement ses outils de travail partis à la dérive.

« La perte d’un engin de pêche s’avère coûteux pour les pêcheurs artisanaux. Une palangre – ligne de pêche sur laquelle sont accrochés des hameçons – coûte 3 000 euros », souligne cet homme qui pratique une pêche artisanale, respectueuse des ressources.

A ses côtés, sur le port de Carqueiranne, Olivier Sacchi, biologiste marin et plongeur pour l’association des professionnels de la mer, LRS, rappelle que pêcheurs, plongeurs et scientifiques travaillent depuis « plus de 10 ans » pour réduire l’impact des filets fantômes.

Les deux robots sous-marin téléguidés, équipés de caméras, acquis par cette association peuvent repérer les filets échoués à plusieurs centaines de mètres de profondeur.

« Grâce à cette nouvelle technologie, les professionnels pourront réduire le temps perdu en mer, synonyme de surcoût, et prendre moins de risques », défend M. Sacchi.

« Si cette technologie est viable économiquement ici pour les pêcheurs artisanaux, alors elle le sera pour tous », estime le directeur de l’innovation de CLS, Gaëtan Fabritius. Une balise coûterait environ 60 euros à l’achat, une somme à laquelle s’ajouterait l’abonnement aux services de traçage et de récupération.

A terme, une réglementation internationale pourrait obliger les pêcheurs à équiper leurs engins de balises afin de lutter contre la pollution marine des filets fantômes, relève CLS, dans les starting-blocks en vue d’un important marché potentiel.

En 2018, le nombre total de navires de pêche dans le monde, des petits bateaux non motorisés aux grands navires industriels, était estimé à 4,56 millions, par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).