Accéder au contenu principal
Filière chanvre

Vers une évolution de la réglementation pour plus de production


TNC le 22/10/2021 à 18:04
fiches_Chanvre

Selon la reglementation, le chanvre doit avoir une teneur en THC inferieur a 0,2 % en France. (©TNC)

En juillet, un projet d’arrêté sur l’utilisation de la totalité de la plante de chanvre, entraînant des évolutions majeures sur la filière et les marchés, a vu le jour. En attente de validation par la Commission européenne, il pourrait entrer en vigueur début 2022 avec à la clef un nouveau débouché pour les agriculteurs dans une filière plus structurée.

« De 4 000 ha en 1990 à 20 000 ha en 2021, la filière chanvre se développe en France », entame Alexis Verniau, ingénieur régional de développement Aura-Paca chez Terre Inovia, lors d’une conférence au salon Tech&Bio, le 21 septembre. Et des évolutions réglementaires sont en passe de créer un vrai attrait pour le chanvre, notamment du fait du cannabidiol ou CBD, une molécule à l’effet apaisant, ne relevant pas de la législation des stupéfiants comme le Tétrahydrocannabinol ou THC. Ludovic Rachou, président de l’Union des industriels pour la valorisation des extraits de chanvre, évoque « un marché estimé à 700 millions d’euros pour les produits à base de CBD dès la première année en cas d’évolutions réglementaires, avec une croissance annuelle de l’ordre de 100 % pour les compléments alimentaires avec du CBD. »

Pour le développement de ce marché si attractif, tout réside dans une évolution de la réglementation française avec l’arrivée d’un nouvel arrêté en date du 20 juillet 2021. Il remplace l’arrêté du 22 août 1990, interdisant l’utilisation des feuilles et fleurs de chanvre. De fait, la commercialisation de tous les produit dérivés, fabriqués à partir de feuilles ou de fleurs de chanvre, et donc de la plante entière, était également interdite, notamment les produits, par exemple alimentaires, à base de CBD.

Un nouvel arrêté autorisant l’utilisation de toute la plante

Le nouvel arrêté vient donc modifier le marché. Il a été notifié à la Commission européenne qui doit donner son avis entraînant un arrêté définitif en France fin 2021 ou début 2022. « Le projet d’arrêté prévoit que l’autorisation de culture, d’importation, d’exportation et d’utilisation industrielle et commerciale du chanvre est étendue, sous certaines conditions, à toutes les parties de la plante de chanvre », explique le gouvernement sur son site internet.

(©Interchanvre)

Plus globalement, cet arrêté permettra, toujours selon le gouvernement la mise en place « d’un cadre réglementaire global » afin d’autoriser « un développement sécurisé en France de la filière agricole du chanvre ainsi que des activités économiques liées à la production d’extraits de chanvre et à la commercialisation de produits qui les intègrent […]. » À noter que pour produire du chanvre, il faudra contractualiser « ce qui peut entraîner des situations ubuesques », estime Ludovic Rachou, qui parle de flou réglementaire et d’une filière en structuration. Dans les faits, l’enjeu tourne autour de la teneur en THC, même si « pour détourner un champ de chanvre, il faudrait le fumer en entier ! », s’exclame-t-il.

Limiter les distorsions de concurrence européenne

Selon la réglementation, le chanvre doit avoir une teneur en THC inférieur à 0,2 % en France. Or le taux de CBD dans la plante est corrélé positivement au taux de THC, entraînant dans certains pays d’Europe « des traitements chimiques pour abaisser le taux de THC dans la plante », observe Ludovic Rachou. De plus, en Italie, le taux légal est de 0,6 % de THC, dans la plante, alors qu’en Suisse, il est de 0,1 %. Se dessine à l’horizon des distorsions de concurrence auxquelles l’Europe va devoir faire face. « Il est très probable que le taux sera à l’avenir entre 0,2 et 0,3 %, commente Ludovic Rachou. Quant à l’extraction du CBD, le cadre réglementaire n’est pas encore connu mais il sera impossible de faire cela dans son garage car il faut séparer le CBD du THC ». Mais le marché du chanvre n’est pas que le CBD. Ainsi, la filière à travers la fibre vise clairement à « concurrencer le coton », selon Ludovic Rachou qui rappelle que le chanvre a été remplacé par le nylon à une autre époque, avec la perte d’un savoir-faire. « L’huile de chanvre n’est pas très compétitive. La graine, riche en protéines, est fortement concurrencée par le quinoa ou le pois chiche et là encore la teneur en THC, avec des discussions réglementaires, va avoir un impact sur son utilisation (débat sur les méthodes d’analyses et marge d’erreur) », observe-t-il. L’enjeu majeur reste donc la valorisation de la fibre et du CBD avec en arrière-plan, la question du THC.