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[Reportage] Déficit hydrique

Une situation inquiétante mais pas catastrophique dans le Sud-Est


TNC le 05/04/2019 à 18:04
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Le sud-est de la France est en proie à une situation paradoxale. Les pluies abondantes de la fin d'année 2018 ont détrempé les sols et très largement perturbé les semis des cultures d'hiver mais la quasi absence de précipitations depuis le début d'année 2019 a rendu le sol très sec en surface, obligeant ceux qui sont équipés à débuter la campagne d'irrigation. Les pluies annoncées seront bienvenues.

En fin d’année 2018, les départements du Sud-Est de la France ont connu des précipitations records. Depuis le début de l’année 2019, c’est tout le contraire qui se produit puisqu’il n’est tombé en moyenne que 30 % des précipitations attendues. « C’est bien simple, résume Michel Pontier, céréalier à Fabregues (Hérault), nous avons eu énormément d’eau sur les mois d’octobre, novembre et décembre si bien que nous n’avons pu semer nos cultures d’hiver qu’en janvier. Et, à partir de là, nous n’avons pratiquement pas eu de pluie. Nous nous attendons à une très petite récolte sur nos blés durs située entre 15 et 20 quintaux/hectare contre 50 qx/ha habituellement. Quant à nos cultures de printemps, l’absence de pluie et de froid nous oblige à préparer la terre avec des outils animés alors que nous utilisons, d’ordinaire, des outils à dents ».

« Un niveau d’eau en surface habituellement rencontré en juillet »

Cette situation se retrouve sur tout le pourtour méditerranéen, comme l’explique Noël Piton, en charge de la gestion quantitative de l’eau à la chambre régionale d’agriculture Provence-Alpes-Côte-d’Azur (Paca) : « Les nappes phréatiques se sont très largement rechargées du fait de ces pluies de fin d’année. Par contre, le manque de pluie combiné à un vent qui souffle depuis le janvier a rendu les sols très secs en surface ».

Une analyse partagée par les experts en eau du bassin méditerranéen comme Anne-Lise Galtier, responsable du pôle eau à la chambre d’agriculture du Gard qui évoque « des mesures de restriction déjà envisagées ». Dans l’Aude, Daniel Casteignau, responsable de la gestion quantitative de l’eau à la Chambre d’agriculture décrit « un niveau d’eau en surface habituellement rencontrée en juillet ». La situation est donc inquiétante mais pas catastrophique. Du moins, pas encore. « Sans pluie importante d’ici 15 jours-trois semaines, cela va commercer à devenir sérieusement compliqué », note encore Noël Piton.

Constat déficit hydrique dans le Sud-Est (©Chambre d’agriculture de l’Aude)

Irrigation : Déjà 100 millimètres d’eau versés sur certains colzas

Sur le terrain, on s’inquiète évidement de ce manque d’eau. Sylvain Audemard, viticulteur à Besse-sur-Issole (Var), par ailleurs secrétaire général de la FDSEA du Var, décrit « une terre dure comme en août » et s’inquiète des conséquences notamment pour ses collègues éleveurs : « Le plus dramatique, c’est pour eux. Ils ont déjà entamé leurs stocks de fourrages et la phase d’engraissement risque d’être compliquée, faute de nourriture suffisante ». Dans le département voisin, les Alpes-de-Haute-Provence, Gérard Brun, installé à Oraison en culture de semences en est déjà à sa troisième irrigation sur ses colza semences, « le principal problème étant que l’azote s’évapore et que la plante n’absorbe pas ou peu ». Déjà 100 millimètres d’eau sur ses colzas et une facture qui s’annonce d’ores-et-déjà salée, du fait « des tarifs d’hiver beaucoup plus onéreux pour les pompages » Et une organisation du travail modifiée : « Quand la pluie tombe du ciel, on regarde. Là, il faut réfléchir aux chantiers d’irrigation et placer et déplacer les enrouleurs en conséquence ». Le céréalier a même été contraint d’arroser la terre qui s’apprête à accueillir ses maïs qu’il devrait semer cette semaine.

Déjà un peu d’eau cette semaine … et d’autre annoncée

Nicolas Granget, installé sur une culture d’amandiers et radis sous serres à Bedarrides   dans le Vaucluse a lui aussi commencé l’irrigation très tôt. « J’ai débuté début mars, contre début mai habituellement ». Avec une organisation de travail bouleversée : « L’irrigation, c’est du boulot à 100 %. Il y a toujours une fuite, un branchement qui ne fonctionne pas ». D’autant que, celui qui est aussi président de l’Association des irrigants de Vaucluse (Adiv) travaille par micro-aspersion depuis l’année dernière. « Avant, j’irriguais trois heures d’affilée sur une semaine par exemple. Maintenant, j’arrose deux fois une heure ». Une stratégie payante puisqu’il ne constate pas de baisse de rendement et réalise de belles économies. « Nous constatons des années très aléatoires, l’irrigation est donc un moyen de sécuriser ma production ».

Nicolas Granget travaille par micro-aspersion depuis l’année dernière dans ses amandiers. (©Good’Amande)

Après un milieu de semaine plus humide, Météo France annonce plusieurs jours de pluie la semaine prochaine. Un printemps pluvieux serait, en effet, bienvenu pour assouplir les terres provençales.

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