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Réduction du travail du sol

Trois producteurs témoignent des atouts et contraintes de leurs pratiques


TNC le 14/06/2019 à 18:11
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Plutôt labour ou non-labour ? Bien que l'utilisation de la charrue reste majoritaire en France, cette question mérite d'être approfondie. Claude Bassineau, Dominique Coueffé et Samuel Lechat, trois agriculteurs, témoignent de leurs expériences des techniques culturales simplifiées et du semis direct sous couvert.

D’après une enquête d’Agreste (service statistique du ministère de l’agriculture) réalisée en 2014, environ deux tiers des surfaces françaises sont labourées. On observe une certaine disparité en fonction des régions et du type de cultures. C’est en Occitanie et en Bourgogne-Franche-Comté notamment qu’on laboure le moins. La pratique est, par contre, très répandue en Normandie et en Auvergne-Rhône-Alpes. Si le colza et le blé sont moins labourés (50 %), la part de surfaces sans labour est plus faible pour les cultures de maïs (20 %) ou de betteraves (15 %) par exemple. Bien que la réduction du travail du sol soit un sujet phare aujourd’hui, le semis direct reste encore une pratique marginale en France : il représente 3 % des surfaces de grandes cultures.

Une vie du sol améliorée et des charges de mécanisation réduites

Abandonner la charrue ? Claude Bassineau, Samuel Lechat et Dominique Coueffé, agriculteurs respectivement en Charente-Maritime, Maine-et-Loire et Mayenne, ont franchi ce cap et ne le regrettent pas. Pour Claude Bassineau, « les motivations de départ étaient surtout économiques ». Après trois années de techniques culturales simplifiées (TCS), il se lance en 1999 dans la pratique du semis direct sous couvert : « progressivement, j’ai observé une nette amélioration de mes sols. […] Le semis direct et les couverts végétaux permettent aussi de favoriser la faune auxiliaire », précise l’agriculteur qui n’utilise plus d’anti-limaces. Samuel Lechat constate également un « progrès physique notable et un meilleur ressuyage des sols » depuis son passage en semis direct en 2016. Auparavant, son père avait recours aux TCS sur toute l’exploitation.

De gauche à droite : Jérôme Labreuche, ingénieur travail du sol chez Arvalis-Institut du végétal, Samuel Lechat, Dominique Coueffé et Claude Bassineau, agriculteurs engagés dans la réduction du travail du sol, respectivement en Charente-Maritime, Mayenne et Maine-et-Loire. (©TNC)

Outre la restauration des sols, les agriculteurs mesurent, grâce à l’arrêt du labour, une réduction des charges de mécanisation. « Je réalise désormais ma vidange de tracteur tous les ans et demi et la facture de carburant annuelle s’est allégée de 35 000 euros », explique Claude Bassineau. En fonction des systèmes, Jérôme Labreuche, ingénieur travail du sol chez Arvalis-Institut du végétal, estime en moyenne une économie de carburant de l’ordre de 40 l/ha entre le semis direct et les techniques culturales conventionnelles.

Comment faire sans glyphosate ?

Installé en Mayenne, Dominique Coueffé a également arrêté le labour, en 1994 suite à des problèmes de battance. L’objectif était aussi de « remontrer la matière organique en surface ». Il a ainsi testé le semis direct, puis est revenu finalement vers les TCS. « Avec la production de semences de graminées fourragères, je n’ai pas de retour en arrière possible ! », explique l’agriculteur. Le travail du sol est un moyen supplémentaire pour maîtriser les adventices. Il n’utilise pas du tout de glyphosate. Sur leurs exploitations, Claude Bassineau et Samuel Lechat y ont recours, à des doses faibles : 0,5 à 1,5 l/ha. L’avantage de cet herbicide non sélectif est qu’il « permet de reprendre la main sur le couvert ». Ils partagent tous les deux le même sentiment : se passer du glyphosate sera compliqué. Ils n’envisagent toutefois pas d’utiliser à nouveau leur charrue et espèrent trouver des solutions.

L’allongement des rotations constitue un des leviers, précise Samuel Lechat : attention toutefois « il faut aussi arriver à vendre ses productions ». De son côté, Dominique Coueffé travaille beaucoup avec les dérobés (il retarde ses semis de printemps de trois semaines). Ces derniers contribuent à « maîtriser les adventices et permettent de nourrir mes vaches laitières », commente l’agriculteur mayennais. Pour Jérôme Labreuche, les couverts végétaux constitueront une des solutions majeures face à l’enherbement. Il faudra peut-être « envisager aussi le retour à un léger travail du sol. Le scalpage fonctionne bien à cette époque de l’année. Il peut s’avérer, par contre, plus compliqué à l’automne ou en sortie d’hiver en fonction des conditions météorologiques ».