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Dans les Pyrénées Orientales

La sécheresse fait craindre des incendies inhabituels avant l’été


AFP le 24/02/2023 à 14:30

Déficit de pluies record à l'échelle nationale, incendies inhabituels en plein hiver : les Pyrénées-Orientales connaissent une sécheresse exceptionnelle, selon météorologues et pompiers, qui redoutent de violents feux de forêt dès maintenant et a fortiori cet été.

« En 2022, on a eu à la fois un manque de pluie et des températures très élevées » et, de ce fait, « une sécheresse record » dans ce département méditerranéen frontalier de l’Espagne, déclare la référente de Météo-France pour le Languedoc et le Roussillon, Florence Vaysse, à l’AFP.

Les précipitations ont été de moitié par rapport à la moyenne : « C’est la deuxième année consécutive qu’on a un bilan plus bas que la normale » et « c’est l’année la plus sèche depuis 1959, depuis qu’on calcule un indicateur à l’échelle du département », précise-t-elle.

Quant aux températures – déterminantes car la chaleur accroît l’évaporation et la transpiration des plantes – elles ont été les plus élevées depuis 1947, première année enregistrée.

Pour 2023, la tendance persiste : « La sécheresse se prolonge dans notre département et tend même à s’accentuer dans certains secteurs (…) malgré l’arrivée des températures hivernales depuis plusieurs semaines », avait averti jeudi la préfecture.

Arbres qui sèchent sur pied

Cette situation affecte le travail des pompiers. Le manque d’eau « entraîne la mort de végétaux sur pied », ce qui accroît la quantité de bois ou de feuilles sèches pouvant s’embraser, selon le colonel Stéphane Clerc, directeur adjoint du SDIS 66 (Service départemental d’incendie et de secours). « Le plus préoccupant pour cet été, c’est que les feux risquent d’être beaucoup plus intenses parce que le volume de combustible est plus fort », ajoute-t-il.

Le colonel Clerc cite ainsi les chênes Kermès, ou chênes des garrigues, essence très résistante en train de mourir au beau milieu de l’hiver, notamment dans des massifs tels que les Corbières, entre Pyrénées-Orientales et Aude, ou les Albères, à la frontière avec l’Espagne.

Le biologiste Eric Fabre a observé de près ce phénomène en arpentant la Serre du Scorpion, colline de garrigue dans la partie des Corbières la plus proche de la Méditerranée. Il y a vu des oliviers sauvages, des pistachiers lentisque appelés aussi « arbres à mastic », et même des pins d’Alep, parmi d’autres, qui sèchent sur pied. Pourtant, « le pin d’Alep est un arbre qu’on trouve à la limite du désert, une des végétations les plus résistantes à la sécheresse », souligne-t-il.

Terre craquelée sur plusieurs hectares, lits de rivières à sec, comme l’Agly réduit à un torrent de cailloux et de roches : nombre d’autres paysages, à l’aspect inattendu à cette époque de l’année, témoignent de la pénurie d’eau dans les Pyrénées-Orientales.

Les pompiers affrontent déjà des incendies inédits alors que l’été est encore loin : en à peine plus d’un mois, entre le 1er janvier et le 6 février, le nombre de feux a doublé par rapport à la même période en 2022.

Dizaines d’hectares brûlés

La surface touchée a été multipliée par quatre, passant de 7 à 28 hectares, sans compter les 60 hectares brûlés à Torreilles le 5 février dernier, « exceptionnel » à cette époque, selon le SDIS 66.

Si elle est plus prononcée dans les Pyrénées-Orientales qu’ailleurs, la sécheresse touche d’autres régions de France métropolitaine et d’Europe, et s’est là aussi traduite par une augmentation des surfaces affectées par des incendies.

Le territoire métropolitain n’a pas connu de véritable pluie pendant 32 jours, du 21 janvier au 21 février, une durée jamais enregistrée auparavant par Météo-France, toutefois interrompue avec le retour mercredi de quelques précipitations limitées.

Les Pyrénées-Orientales, en alerte sécheresse depuis juin 2022, ont ainsi été rejointes par la majeure partie du Var, placée en alerte le 17 février.

Sur le front des incendies, l’Union européenne a enregistré l’an dernier un record de surfaces brûlées : plus de 785 000 hectares du 1er janvier au 19 novembre 2022, selon le système européen d’information sur les feux de forêt (Effis) et le programme européen sur le changement climatique Copernicus.

De gigantesques feux ont notamment affecté l’Espagne et le sud-ouest de la France, où deux brasiers successifs en Gironde ont ravagé l’été dernier plus de 21 000 hectares.

Avec la sécheresse de cet hiver, les pompiers se préparent au pire.