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Un cédant et son repreneur témoignent

Pour une transmission réussie, « avoir la même vision sur le maximum de choses »


TNC le 29/11/2021 à 15:09
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Pour la Quinzaine de la transmission/reprise d'exploitations agricoles, du 19 novembre au 6 décembre dans toute la France, la rédaction vous partage le témoignage d'un passage de relai entre cédant et repreneur comme on aimerait que tous se passent : celui de l'exploitation laitière de Frédéric Cathelin, en Indre-et-Loire, à Gaby Barillet. Principales clés de succès, pour l'un comme pour l'autre : « avoir des objectifs communs », une même façon d'élever les animaux notamment, et « passer du temps à deux » pour« construire l'avenir différemment, ensemble. »

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Éleveur laitier à Sepmes en Indre-et-Loire depuis 1978, Frédéric Cathelin a travaillé 10 ans en Gaec avec son père, avant de s’installer en 1997 avec sa femme, non issue du milieu agricole. « On avait 60 vaches et 60 ha. Aujourd’hui, on est à 80 vaches pour un droit à produire de 900 000 l de lait », détaille-t-il. Depuis 2012, le couple a « enclenché le processus de transmission de l’élevage », comme dit Frédéric.

L’important est d’anticiper, de beaucoup anticiper.

Une succession, qui n’est pas familiale puisque leur fils s’est orienté vers un autre secteur, mais avec la ferme intention que « l’exploitation et le cheptel demeurent ». « L’important est d’anticiper, de beaucoup anticiper, d’au minimum cinq voire sept ans », alerte l’exploitant. Quand j’ai suivi la formation Cap transmission de la chambre d’agriculture, je n’avais que 55 ans. Il ne fallait pas plus. » En effet, deux ans ont été nécessaires aux cédants pour : « se décider sur ce que nous allions faire, voir ce que nous allions perdre ou gagner », raconte le producteur.

Dès le départ, nous avons fonctionné comme deux associés.

« Une fois ce chemin-là parcouru dans notre tête, on a mis la ferme au RDI (répertoire départ installation, NDLR) », poursuit-il. Trouver un repreneur a ensuite pris un à deux ans. L’heureux élu, Gaby, a été d’abord embauché comme salarié pour « une période de tuilage ». « Dès le départ, nous avons fonctionné comme si nous étions associés, indique l’éleveur. Pour tout cela, il faut du temps, beaucoup de temps. »

Selon le cédant : « un successeur cochant de nombreux critères » 

« Se faire accompagner pour la transmission de son exploitation est aussi essentiel, ajoute-t-il. On peut avoir des conseils techniques assez facilement, dans les centres de gestion notamment. Sur les aspects humains car au bout du compte, on en revient toujours à ça même si l’économique est également crucial, c’est moins évident. » D’une part, le successeur doit avoir conscience qu’il va exercer « un métier un peu particulier, de passion », dans lequel on ne compte pas ses heures.

Du jour au lendemain, on n’est plus tout à fait chez nous. C’est normal, mais faut en avoir conscience.

Le futur retraité, lui, doit savoir que « du jour au lendemain, il n’est plus tout à fait chez lui ». « C’est normal, c’est consenti. Mais il ne faut pas l’oublier. » Par exemple, « là où on était habitué à décider seul ou en couple, on va devoir le faire avec le repreneur », un tiers qui plus est, fait remarquer Frédéric Cathelin.. L’idéal étant d’avoir la même vision sur le plus de choses possibles, « comme Gaby et moi », souligne l’éleveur.

En particulier, « sur la manière d’élever les animaux ». « Nous aimons regarder les vaches au pâturage. Parfois, on reste un quart d’heure à les observer. C’est du temps de travail, mais du bonheur aussi ! » Autre sujet sur lequel ils sont sur la même longueur d’onde : la vie familiale doit être préservée. « Je ne sais pas si c’était le parfait successeur, mais il répondait à la plupart de nos critères », résume Frédéric.

Et pour le repreneur ?

Diplômé d’un BTS productions animales en 2007, Gaby Barillet a été salarié agricole pendant une dizaine d’années, principalement en élevage, avec pour but à terme de s’installer en élevage laitier. « J’ai visité beaucoup de fermes avant de lire, sur le RDI, l’annonce de Frédéric. Tout était clair. Il y avait les chiffres, ce qu’il fallait reprendre », mentionne-t-il.

Quand on veut reprendre une exploitation, il faut passer du temps avec le cédant.

En rencontrant les exploitants, ce dernier a tout de suite senti qu’ils étaient « passionnés d’élevage, attachés à ce qu’il perdure sur l’exploitation », comme lui. Le jeune homme a commencé par travailler à 80 % au sein du Gaec, pour faire la transition avec ses anciens employeurs « qui avaient encore besoin » de lui. « Quand on veut reprendre une exploitation, seul ou en société, il faut passer du temps avec le cédant. C’est comme un mariage, ça se prépare ! », lance-t-il.

Avec Frédéric, j’ai découvert l’envie de travailler à deux.

Le jeune éleveur recommande, par ailleurs, de prendre rendez-vous très tôt au PAI (point accueil installation) « pour vérifier qu’il n’y a pas de lacune sur certains points et connaître le panel de conseils dont on peut bénéficier ». « On est dans un secteur très dynamique en matière d’accompagnement », constate-t-il. Aujourd’hui, face au départ en retraite imminent de Frédéric, Gaby cherche un associé. « Avec lui, j’ai découvert l’envie de travailler à deux. Partager les tâches et les décisions, alléger la charge de travail et se dégager du temps libre : « une nécessité autant pour moi que pour l’exploitation », souligne-t-il.

La ferme, ou va la construire ensemble, la penser différemment selon ses envies.

« Il n’y a qu’à acheter les parts sociales, pas le capital » (foncier, bâtiments, cheptel, etc.), « moins de 40 000 €, ce n’est pas un gros risque », met en avant le futur installé. Il prévient cependant les candidats potentiels : « Il ne faut pas tout de suite dire « je m’installe et on bosse ». La ferme, ou va la construire ensemble, la penser différemment en fonction de ses envies, comme pour moi quand je suis arrivé ici. De même, il faudra une phase d’adaptation, via du salariat ou un stage de parrainage. »