Les députés veulent limiter les recours pour conflits de voisinage
AFP le 04/12/2023 à 17:15
Les députés discutent lundi d'une proposition de loi transpartisane qui vise à limiter les conflits de voisinage, afin d'éviter notamment la multiplication de plaintes de néo-ruraux contre des agriculteurs.
Le texte porté par la députée Renaissance du Morbihan Nicole Le Peih et qui comporte un article unique, introduit dans le code civil le principe de responsabilité fondée sur les « troubles anormaux de voisinage » tout en l’assortissant d’une exception.
Les plaintes déposées pour trouble anormal de voisinage étaient jusqu’à présent laissées à la libre appréciation des juges, faisant l’objet au fil des années d’une construction jurisprudentielle.
L’article soumis au vote des députés stipule que tout « propriétaire, locataire (…) à l’origine d’un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage, est responsable de plein droit du dommage qui en résulte ».
Mais il introduit aussi une exception qui exclut l’auteur de toute responsabilité lorsque ce trouble provient d’activités préexistantes à l’installation de la personne lésée, « qui se sont poursuivies dans les mêmes conditions et qui s’exercent conformément à la législation en vigueur ».
Le texte rappelle l’affaire du coq Maurice sur l’île d’Oléron en Nouvelle-Aquitaine, accusé par ses voisins de chanter trop tôt. En 2019, la justice avait donné raison à sa propriétaire en rejetant la plainte des voisins, une querelle de voisinage devenue le symbole des tensions entre la population locale et les nouveaux arrivants dans les campagnes.
L’inscription dans la loi de la définition du trouble anormal du voisinage permettra « de rendre le droit plus lisible et plus accessible à tous nos concitoyens », a indiqué à l’AFP Nicole Le Peih, elle-même issue du monde agricole.
« C’est également le moyen de garantir une application homogène sur l’ensemble du territoire national », a-t-elle poursuivi, tout en soulignant que la clause exonératoire de responsabilité « ne donne pas pour autant un blanc-seing aux responsables des troubles anormaux du voisinage ».
De fait, si l’activité ne respecte pas la législation ou la réglementation, notamment en matière environnementale, le responsable verra sa responsabilité engagée.
En déplacement dans le Morbihan vendredi, le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti a réitéré son soutien au texte. « Ceux qui viennent s’installer dans la ruralité ne peuvent pas exiger que les paysans, qui sont des travailleurs, qui nous nourrissent, changent de mode de vie », a-t-il déclaré, évoquant 1 300 procès à ce sujet « qui sont totalement inutiles ».