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Stratégie agricole d'Emmanuel Macron

X. Hollandts : « La ferme familiale ne sera plus le modèle agricole dominant »


Politique et syndicats le 14/03/2018 à 16:04
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Selon Xavier Hollandts, enseignant-chercheur à la Kedge Business School ayant notamment travaillé sur la gouvernance des coopératives agricoles, la « révolution culturelle » qu’Emmanuel Macron a demandée au secteur agricole pourrait enterrer le modèle agricole familial qui domine en France.

Les agriculteurs sont-ils prêts à participer à la « révolution culturelle » de l’agriculture qu’Emmanuel Macron a défendue devant la « nouvelle génération agricole », jeudi 22 février à l’Elysée ? Doivent-ils s’inquiéter de cette ligne politique ? Pour Xavier Hollandts, enseignant-chercheur à la Kedge Business School qui s’est particulièrement penché sur la gouvernance des coopératives agricoles, tout dépend de ce qu’envisage concrètement le chef de l’État.

« Si cette révolution culturelle est envisagée comme un changement de métier et un alignement des pratiques liées à l’innovation et l’augmentation de la taille des exploitations, alors oui, cela peut être inquiétant pour les agriculteurs. En revanche, si cette révolution porte sur les relations commerciales et sur les acteurs en aval de la production, c’est-à-dire la transformation et la distribution, alors c’est plutôt un motif d’espoir pour eux. »

Dans tous les cas, l’universitaire estime que l’exploitation familiale, le modèle agricole historiquement défendu en France, « est en danger ». Pour lui, deux types d’agriculture vont se distinguer encore davantage : « un modèle bien armé pour une économie mondialisée d’un côté, et un modèle de production plus local de l’autre ».

Cette distinction croissante de deux modèles agricoles nécessitera peut-être une adaptation politique. « La stratégie agricole française et la politique agricole commune doivent répondre aussi bien à l’agro-industrie mais aussi à des modèles agricoles plus locaux et qualitatifs. »

En Europe, et en particulier en France, les autorités ont toujours cherché à soutenir différents modèles agricoles par une seule ligne politique. « Pour mener à bien cette révolution culturelle, il faudra peut-être mettre en place des moyens différents et des subventions différenciées. »

Hors de l’Union européenne, cette distinction est d’ailleurs mise en œuvre dans certains pays. Au Brésil par exemple, le ministère de l’agriculture conduit une politique destinée à l’agrobusiness exportateur, représentant environ 800 000 exploitations, tandis que le ministère du développement agraire et social a la charge des 4,3 millions d’exploitations familiales fournissant les deux tiers de l’alimentation des Brésiliens.

Et le spécialiste de remarquer : « L’un des points positifs de la révolution déjà en cours, c’est la place croissante du consommateur, qui peut agir par son acte d’achat. »