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Engrais

Vers de nouvelles contraintes pour le stockage d’ammonitrates ?


TNC le 31/01/2022 à 16:31
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Deux projets de textes, soumis à la consultation publique jusqu'à 15 février, prévoient un renforcement de la réglementation concernant le stockage des ammonitrates haut dosage. (©TNC)

À la suite des travaux d’une mission gouvernementale pour évaluer les modalités de contrôle des flux d'ammonitrates dans les ports français, deux projets de textes visent à renforcer la réglementation des stockages agricoles. Mis en consultation publique, ils prévoient d’abaisser le seuil de déclaration de stockage d’ammonitrates à haut dosage en vrac et en conditionné à 150 tonnes, ce qui soumettrait un certain nombre de producteurs au régime des ICPE (installations classées pour la protection de l’environnement).

À la suite de l’explosion dans le port de Beyrouth, en août 2020, la ministre de la transition écologique et le ministre de l’économie ont commandé une mission relative à la gestion des risques liés à la présence d’ammonitrates dans les ports maritimes et fluviaux, et dont les conclusions rendues en mai 2021 préconisent de renforcer l’encadrement réglementaire de ces produits.

Dans ce cadre, tous les lieux sensibles accueillant des ammonitrates sont concernés, y compris les endroits de stockages dans le monde agricole. Deux projets de textes, soumis à la consultation publique depuis le 26 janvier, proposent ainsi d’abaisser les seuils qui relèvent du régime des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) : le seuil proposé pour les ammonitrates haut dosage est désormais de 150 tonnes, tous conditionnements confondus (vrac et big bag), contre 250 tonnes de vrac ou 500 tonnes de big-bags actuellement, précise le ministère de la transition écologique.

Un projet d’arrêté fixe prévoit l’application de ces nouvelles règles aux installations déclarées après le 1er août 2022, mais aussi aux installations existant avant cette date, avec une mise en conformité attendue entre six mois et trois ans et demi en fonction des dispositions. Au final, toutes les installations devront être conformes au 1er février 2026.

Retrouvez ici le projet de décret et le projet d’arrêté proposés à la consultation publique.

Investir « entre 80 et 120 000 euros par exploitation agricole »

Une situation dénoncée par bon nombre d’organisations agricoles, notamment la FNSEA, la Coopération agricole, la Fédération du Négoce agricole, l’AGPB, l’AGPM, la CGB, la Fop, l’Unifa et l’Afcome qui s’inquiètent, dans un communiqué du 28 janvier, d’un « énième arbitrage réglementaire sans fondement scientifique, ni mesure d’impact sur la Ferme France et la souveraineté alimentaire du pays ».

« Rien que sur le plan logistique, 30 à 50 % des sites de stockage de proximité pourraient fermer et nombre de producteurs relèveraient désormais des Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE). Répondre à cette nouvelle législation nécessitera des investissements supplémentaires conséquents évalués entre 80 et 120 000 € par exploitation agricole », dénoncent les organisations.

À travers cette nouvelle réglementation, l’objectif de la recommandation de la mission était d’inciter à l’utilisation d’engrais moins dangereux, et moins nocifs pour l’environnement. Mais dans les faits, passer aux ammonitrates bas ou moyen dosage présente des difficultés : avec un dosage moins fort, il faudrait transporter et stocker davantage pour conserver la même dose d’azote. Et face aux difficultés à s’approvisionner en azote, il s’agit aussi, pour les organisations agricoles, d’une question de souveraineté : « le contexte économique et géopolitique international sur les matières premières, l’énergie et les intrants expose la ferme France à une forte insécurité. Si la France s’obstine à contraindre le monde agricole, c’est sa capacité à nourrir ses citoyens et à assurer sa souveraineté alimentaire qu’elle contraint. C’est un signal extrêmement négatif à l’approche des échéances électorales du printemps », rappellent-elles dans leur communiqué.