Une bonne récolte de miel en 2025 mais toujours des menaces sur les abeilles
AFP le 16/10/2025 à 10:15
La récolte française de miel 2025 a été la meilleure en 20 ans, mais ce bilan national cache la miellée « catastrophique » des apiculteurs du sud-est après la canicule, et de multiples pressions sur les abeilles : climat, produits phytosanitaires, frelon asiatique...
En 2025, 23 000 à 25 000 tonnes de miel ont été produites en France, soit près de deux fois plus que pendant la mauvaise année 2024 affectée par des pluies et gelées tardives, et plus qu’en 2023 (environ 20.000 tonnes), selon le bilan annuel de l’Union nationale de l’apiculture française (UNAF) publié mercredi.
Il faut remonter à 2004 pour trouver un volume de production supérieur.
Cette « forte progression » est liée à une météo très favorable ce printemps dans le nord, l’ouest, l’est et le centre de la France, explique le principal syndicat du secteur apicole, qui a connu ces dernières années une production en dents de scie.
En revanche le sud-est « continue de subir de plein fouet les effets du changement climatique » : « quelques jours de canicule ont réduit à néant tout espoir de récolte digne de ce nom », souligne ce bilan produit à partir des remontées du réseau de l’UNAF mais aussi des chiffres de négociants conditionneurs.
En Provence, la collecte de miel de lavande a été « catastrophique », quatre fois inférieure à une année moyenne, souligne l’UNAF qui réclame des aides « pour empêcher la faillite d’exploitations ».
En revanche, elle a été bien meilleure dans « les nouveaux secteurs » de production de lavande, comme le centre du pays.
Sur le pourtour méditerranéen, les miellées de romarin, thym, bruyère blanche ou garrigue ont été des plus réduites. A l’inverse, les récoltes de miel de montagne, toutes fleurs ou de tilleul ont été « très généreuses » en Bretagne, Limousin, Auvergne, dans l’est, le nord.
Le changement climatique « rend les récoltes de plus en plus irrégulières, les exploitants ne peuvent rien prévoir », souligne le porte-parole de l’UNAF, Henri Clément.
« Traditionnellement la grande zone de production en France c’était le sud, de Paca jusqu’en Aquitaine. Aujourd’hui c’est là où les producteurs souffrent le plus », ajoute l’apiculteur cévenol, qui avec les années constate une remontée vers le nord de nombre de ses collègues : Paca, puis Rhône-Alpes, aujourd’hui la Bourgogne…
80 millions d’années
Dans le même temps, la menace du frelon asiatique ne faiblit pas. Cet insecte « peut décimer un rucher en 48 heures », explique Patrick Granziera, secrétaire général de l’UNAF et apiculteur dans le Lot-et-Garonne.
Selon le Museum national d’histoire naturelle, un nid de frelons mange 11 kilos d’insectes par an. C’est aussi un enjeu pour la reproduction, car les butineuses, stressées, restent cloitrées dans la ruche quand elles devraient sortir chercher le pollen nécessaire pour que la reine ponde.
Parmi les moyens de lutte, les apiculteurs comptent sur le piégeage au printemps des reines fondatrices des frelons. Mais « il faut structurer l’aide au piégeage », souligne M. Granziera : il est inefficace quand seules quelques communes volontaires s’engagent.
Une loi adoptée en mars contre le frelon asiatique prévoit des plans de lutte déclinés au niveau territorial. Mais ses décrets ne sont pas sortis. Sollicité par l’AFP, le ministère de l’Agriculture, cosignataire de l’acte de promulgation, renvoie vers le ministère de la Transition écologique.
« L’abeille a au moins 80 millions d’années. Les premiers humains c’est 300 000 ans, l’agriculture 10 000, l’agriculture intensive moins de cent… », souligne M. Clément. « L’abeille est un insecte très résistant, mais aujourd’hui il est extrêmement fragilisé », prévient-il, évoquant la menace des produits phytosanitaires.
La production de miel en France a été divisée par deux entre le milieu des années 1990, date d’introduction des néonicotinoïdes, et le milieu des années 2010, selon le CNRS. Ces pesticides ont été interdits en France pour l’usage agricole en 2018.
Le menace du retour en France du dernier néonicotinoïde encore autorisé en Europe, l’acétamipride, via la loi Duplomb votée cet été, a remobilisé les apiculteurs.
« Le sujet reste entier », a prévenu le député PS Pierrick Courbon, qui accueillait mercredi l’UNAF à l’Assemblée nationale. « Il ne faut pas exclure que d’autres textes de loi notamment venant du Sénat remettent le sujet sur la table. »