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Crise et chaleur

Un marché des céréales hésitant, les huiles en repli


AFP le 15/06/2022 à 18:05
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Sur le marché des céréales, les craintes viennent surtout du ciel : une vague de chaleur précoce s'est abattue sur l'Espagne et remonte en France. (©Pixabay)

Les marchés des céréales se montraient hésitants mercredi en l'absence de progrès pour faire sortir des grains d'Ukraine et à l'arrivée d'une vague de chaleur en Europe remontant du sud, tandis que les huiles continuaient de reculer.

« Le marché est hésitant, au gré d’éventuelles avancées autour d’un corridor maritime pour évacuer les 20 millions de tonnes de grains (dont environ 6 de blé et 12 de maïs) encore stockés dans les fermes ou les ports en Ukraine, et attentif à la vague de chaleur qui arrive », explique Gautier Le Molgat, analyste au cabinet Agritel.

Les cours du blé et du maïs ont oscillé toute la semaine, sans varier beaucoup, autour de 390 euros la tonne pour le blé et 335 euros pour le maïs sur Euronext, « des niveaux de prix deux fois plus élevés que l’an dernier », souligne l’analyste.

En Ukraine, les nouvelles du front agricole ne sont pas bonnes : les discussions piétinent après l’échec d’une médiation turque sur l’ouverture de couloirs maritimes et Kiev va bientôt être confronté à des difficultés logistiques pour stocker les fruits de la moisson qui arrive, alors que les silos sont encore en partie encombrés par les stocks de l’an dernier.

Sur le marché des céréales, les craintes viennent surtout du ciel : une vague de chaleur précoce s’est abattue sur l’Espagne et remonte en France, où températures élevées et manque d’eau pourraient détériorer l’état des épis de blé, encore en pleine phase de remplissage.

En Italie, la production de blé dur devrait chuter cette année de 15 % en raison de la sécheresse, estime déjà l’association d’agriculteurs Coldiretti. Une vague de chaleur est aussi attendue sur la « Corn Belt » américaine, où l’état des cultures est très bon pour l’instant. Les prix baissent, « mais ne s’effondrent pas non plus », note Arlan Suderman, de la plateforme StoneX. « Nous faisons encore face à beaucoup de risques, à une offre mondiale insuffisante », dit-il, et « la clé » pour la récolte sera le temps dans l’hémisphère nord en juillet et août.

« Rééquilibre » des huiles

Le recul du marché des huiles, chahuté ces derniers mois, se confirme, avec un repli net de l’huile de palme sur les marchés asiatiques et des cours du colza ayant perdu 12 % en un mois sur le marché européen.« Le marché va se rééquilibrer tranquillement », estime Antoine de Gasquet, président de la société de courtage en huiles Baillon-Intercor. La crise sanitaire avait « cassé une dynamique haussière » favorisée par une baisse de production notamment de l’huile de palme, victime du phénomène de la Niña. « Depuis l’été 2020, le marché était remonté de façon constante et linéaire », rappelle-t-il.

La guerre en Ukraine, qui exportait la moitié de l’huile de tournesol mondiale, a accéléré les choses. Cette huile a vu ses prix flamber – « jusqu’à 4 000 euros la tonne alors qu’elle vaut deux fois moins » – ce qui a poussé les importateurs à se replier sur d’autres produits, comme l’huile de palme.

La forte demande a poussé fin avril l’Indonésie, premier producteur de cette huile avec environ 50 millions de tonnes par an, à interdire les exportations pour protéger sa population confrontée à une hausse insoutenable des prix. Son retour sur le marché a encouragé un repli de l’ensemble des huiles, en dépit des cours élevés du pétrole. Le cas de l’Indonésie est intéressant car le pays, « qui n’a pas de capacité de stockage », a favorisé ces dernières années l’essor du biogazole pour évacuer ses surplus d’huile. Une huile qui est venue à manquer aux hommes. 

Cette situation pousse certains pays européens, comme l’Allemagne et avant elle la Lettonie et la Finlande, à envisager de réduire la production d’agrocarburants, relève Antoine de Gasquet.