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Groupes de développement

[Témoignages] « Dès l’installation, investir du temps pour en gagner derrière »


TNC le 02/11/2020 à 06:14
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« Ensemble, on est plus fort ». Cette expression prend tout son sens avec les groupes de développement agricole comme les Geda ou les Ceta. L'intérêt de ces échanges est encore plus marqué pour les jeunes éleveurs, qui viennent de s'installer et qui ont souvent besoin d'un appui technique et moral pour répondre à leurs nombreuses questions et doutes. Témoignages de plusieurs d'entre eux.

En plus de l’exploitation familiale et de la passion pour le métier d’agriculteur, le père de Quentin Dubois lui a transmis l’esprit « groupe de développement agricole » et l’envie de s’impliquer dans ce type de structure. « Au départ, il faut se faire violence, explique-t-il. Quand on vient de s’installer, on a beaucoup à faire. Entrer dans un collectif de producteurs, qui se connaissent bien, fait aussi souvent un peu peur. » Le jeune agriculteur s’est vite intégré grâce à la « bienveillance » des exploitants agricoles comme des animateurs, qui lui a permis de se sentir « rapidement à l’aise ».

« Vouloir partager et progresser étaient déjà dans mon état d’esprit, poursuit Quentin. Aucun sujet n’est tabou et ça, c’est vraiment appréciable ! » Au sein du Ceta, les adhérents parlent de leur exploitation, de leur organisation du travail, de leurs résultats technico-économiques, librement avec chiffres à l’appui. Alors mieux vaut ne pas avoir de réticence à les montrer. « Il faut accepter de se remettre en question mais les remarques sont toujours constructives, sans jugement », précise le jeune homme. « La plus-value est à la fois technique, économique, sociale, environnementale, ajoute Martial Coquio, animateur du Geda 35 (Ille-et-Vilaine). Par exemple, les agriculteurs membres de groupes de développement sont, selon les banques qui les suivent, plus résilients économiquement. » Un atout d’autant plus important pour les jeunes installés.

« Ne pas rester seul face à un problème » 

Quentin Dubois, lui, a amélioré le GMQ de ses génisses entre 0 et 6 mois mais également le taux de cellules de son lait, d’où un gain de 2 500 €/an sur la paye de la laiterie. « Moralement, cela fait du bien de ne pas rester seul face à un problème. Et en cherchant des solutions à plusieurs, on a plus de chance d’en trouver !, insiste-t-il. On en sort remotivé ! » Il ne regrette pas son engagement dans le Ceta même si les premières années, il « culpabilisait de partir de la ferme pour participer aux réunions ». Lui qui manquait de temps en a finalement gagné puisqu’il s’estime aujourd’hui « plus efficace » dans sa façon de travailler.

Quand Caroline Le Bodic s’est installée seule, en 2014, sur l’élevage de ses parents dans le Morbihan (70 ha de SAU et 45 mères blondes d’Aquitaine), elle a dû se « mettre à niveau », comme elle le reconnaît elle-même. La jeune femme de 35 ans, certes du monde agricole, l’avait quitté plusieurs années pour exercer une activité commerciale. Dès son installation, elle s’est inscrite dans un groupe de développement spécifique pour les jeunes agriculteurs. Les échanges, programmés le midi, n’empiètent pas trop sur le travail de l’exploitation. « On évoque nos ressentis du moment, nos difficultés, nos réussites, ce qu’on envisage de faire », détaille-t-elle.

Voir également :
Les coopératives et l’installation (3/3) − Paroles de jeunes : « Une sécurité financière et agronomique »
Coopératives et jeunes agriculteurs (2/3) − « Une relation gagnant-gagnant financière, technique et humaine »

« Écoute, respect, bienveillance »

Pour se former sur le plan technique plus particulièrement, elle décide d’adhérer, en plus, au groupe « vaches allaitantes » qui n’est pas réservé qu’aux jeunes installés. Ces réunions entre une petite dizaine d’éleveurs, tous les mois et demi, lui ont énormément appris, sur les soins vétérinaires, la contention des animaux et la gestion des pairies notamment. « J’ai fait évoluer certaines pratiques que je pensais mettre en place et j’ai repensé les bâtiments pour une meilleure efficacité », indique Caroline. Après des formations, des visites de fermes et deux voyages d’étude, dans la Creuse et les Pyrénées-Atlantiques, Caroline peut « se positionner par rapport aux autres zones de production » et se rend compte « des contraintes mais aussi des avantages de sa région ».

Si au début, elle appréhendait « la manière dont elle allait être perçue des autres adhérents », elle qui cumule les « particularités » − une femme, devenue agricultrice tardivement, après un parcours non agricole −, elle a immédiatement bénéficié « d’une écoute attentive et d’un profond respect ». « Nous prenons soin les uns des autres, souligne-t-elle. Chacun s’y retrouve, il n’y a aucun intérêt personnel, juste de la transparence et de l’humilité. En exposant ses soucis, on voit que d’autres les ont aussi rencontrés. On se donne ses petites astuces qui nous font avancer ensemble, main dans la main. » En plus de l’appui technique, les producteurs s’entraident dans leur travail, se prêtent du matériel et se retrouvent pour des moments conviviaux.

« J’ai ainsi fait connaissance avec un voisin à moins de 3 km de chez moi », témoigne Caroline. « C’est aussi le moyen de faire des amis », enchaîne Irène qui, n’étant pas du milieu et avec un BTS de mécanique industrielle, a également pu parfaire son bagage technique auprès d’agriculteurs installés depuis plus longtemps. « À plusieurs, on ose se former et expérimenter, conclut celle qui s’est mise aux médecines alternatives grâce à cela et « regarde désormais ses animaux différemment ». « Les groupes de développement permettent de s’épanouir et d’être connectés avec ce qu’il se passe autour de son exploitation.